WORKSHOPS, July 21, 2009
Antoine CAZÉ (Université Denis-Diderot – Paris 7)
Sites poétiques contemporains
Dans une lettre adressée en 1955 à Ed Dorn, Charles Olson conseille au jeune poète de s’ancrer dans un site spécifique pour en transmuer la substance en langage :
DOCUMENTS PRIMAIRES. Et s’ancrer à cet endroit représente
toute une vie d’assiduité. Le mieux, c’est de creuser une seule
chose, un seul endroit, un seul homme jusqu’à ce que toi, tu en saches +
sur la question que n’importe qui d’autre. Peu importe qu’il
s’agisse du Fer Barbelé, du Pemmican, de Paterson ou bien de l’Iowa.
Mais épuise le sujet. Sature-le. A fond.
Et là TU SAIS
tout le reste très vite : un seul truc jusqu’à saturation (ça peut
prendre 14 ans). Et hop, c’est gagné, pour toujours.
(Charles Olson, Additional Prose, Four Seasons Foundation, Bolinas, CA, 1974, p.11)
Pour Olson on le sait, ce site fut Gloucester, dont l’arpentage finit par modifier radicalement le paysage poétique américain en produisant l’œuvre d’une vie : The Maximus Poems.
Le site naturel est littéralement un lieu commun de la poésie américaine d’aujourd’hui. Il offre la possibilité au langage poétique de définir un commun du lieu qui puisse simultanément rendre hommage à sa spécificité et s’en abstraire pour viser l’universel. Qu’il s’agisse de Paiute Creek pour Gary Snyder, des grottes du paléolithique pour Clayton Eshleman, d’un Ouest mythifié chez Ed Dorn, des bois de la Nouvelle-Angleterre coloniale pour Susan Howe, de la « forêt sacrée » de Robin Blaser, du taillis non moins sacré des Journaux de Thoreau pour John Cage, des plaines du Dakota chez Tom McGrath, des marais du Wisconsin dans le superbe Paean to Place de Lorine Niedecker, et de bien d’autres encore, les sites de la poésie américaine invitent à une réflexion sur l’articulation entre langage de la nature et nature du langage.
Situer un poème, et conjointement définir un site poétique (voire un site pour la poésie), voilà une question éminemment environnementale. Aujourd’hui, la dématérialisation du concept même de site par le biais de l’Internet invite à repenser « l’impératif écologique » (Jed Rasula) de la poésie américaine : une textualité expérimentale s’élabore dans l’espace virtuel dont l’imaginaire volontiers tourné vers la nature (cf. p. ex. John Cayley, riverIsland) interroge le rapport entre site poétique et site naturel.
Cet atelier voudrait donc contribuer à l’analyse des pratiques poétiques qui s’appuient sur le type d’archéologie environnementale préconisée par Olson pour transformer la nature d’un lieu en site de langage poétique.
Les propositions sont à envoyer à Antoine Cazé
Claude CHASTAGNER (Université Paul Valéry – Montpellier 3)
Take a walk on the wild side
Explorer l’habitat de la musique populaire américaine
La musique populaire américaine a un rapport schizophrénique à son environnement. Depuis les années cinquante, ses formes électrifiées, du rock’n’roll au grunge, du punk au post-rock, du R&B au rap, se sont toutes présentées comme la musique des villes américaines, traitant de problématiques urbaines et produites le plus souvent pour un public citadin. Le constat reste valable pour la musique country dont le nom suscite pourtant des images plus bucoliques. Là encore, malgré ses origines rurales, la country trouve l’essentiel de son public dans les villes et les banlieues.
Cette prédominance de la ville comme milieu naturel ne pourrait être que le reflet de l’évolution démographique des États-Unis. Pourtant, la musique populaire est tiraillée par une énergie contraire. Avec force, les artistes ont chanté leur attirance pour la wilderness comme pour une Amérique pastorale. Leur refus de la ville s’exprime aussi bien par la prolifération de chansons célébrant la vie rurale ou adoptant des perspectives écologiques que par le renouveau du bluegrass et de l’old-time music et l’explosion récente de l’anti-folk. A l’instar du cinéma et du roman américains, des problématiques parallèles, comme l’importance de la route et de l’espace viennent confirmer cette tension entre enracinement urbain et quête de ruralité, entre prolifération et effacement de l’humain.
Le rapport de la musique populaire américaine à son environnement pose la question de ses sources profondes. D’où vient la sauvagerie qui l’habite ? Est-ce le rêve jeffersonien qui la traverse qui doit nous amener à la lire comme une musique de l’inculte, du sauvage, et donc, littéralement, du non civilisée, du non policée ? Ou est-ce au contraire dans l’énergie électrique urbaine qui en émane qu’est l’origine de sa frénésie, de sa violence parfois ? Dans quelle mesure le rapport contradictoire de la musique populaire à son environnement permet-t-il à ses auditeurs de mieux « habiter la terre », de trouver leur place entre l’humain et le non-humain, de s’enraciner dans un territoire ?
Cet atelier examinera les tensions qui animent le rapport de la musique populaire à son environnement. Nous nous poserons la question des formes que ces tensions peuvent prendre, mais surtout de leur sens. Dans quelle mesure peut-on y observer, là aussi, un glissement de la notion de nature vers celle d’environnement, un gauchissement de leurs implications idéologiques ? Quel rôle jouent-elles dans notre compréhension et notre appréciation de la musique populaire américaine ? De quelle façon permettent-elles d’inscrire cette musique dans une évolution plus globale de la culture et des arts nord-américains ?
Les propositions peuvent prendre la forme de case studies portant sur des formes artistiques contemporaines et mettant en valeur le sens et la fonction des notions évoquées, ou de communications plus théoriques et diachroniques permettant de saisir l’évolution du rapport de la musique populaire à son environnement.
Les propositions (500 mots + une courte bio) doivent être envoyées à Claude Chastagner. Les communications se feront en anglais.
Take a walk on the wild side
Exploring the Natural Habitat of American Popular Music
American popular music has developed a schizophrenic relation to its surroundings. From the 50s onwards, the various forms of electrified music, from rock’n’roll to grunge, from punk to post-rock, from R&B to rap, have all been regarded as urban music, dealing with urban issues, and aiming at an urban clientele. Even country music, despite its name, has become a genre whose main audience is found in towns and suburbs.
The prevalence of the City as American popular music’s natural habitat could merely be the consequence of demographic evolution. However, another force is pulling these musics in a different direction. American artists have repeatedly sung their attraction for the wilderness as well as for pastoral settings, as the number of songs celebrating rural lifestyles, the revival of bluegrass and old-time music, and the recent explosion of anti-folk exemplify. As in numerous American movies and novels, the emphasis on the road and on the open space is but a trace of the tension between an urban anchorage and a quest for nature, between the proliferation and the effacement of the human element.
Popular music’s relation with its milieu raises the question of the music’s foundations. What is the source of the savageness it often betrays? Does the Jeffersonian dream that runs through it make it the music of the uncultivated, of, literally, the uncivilized, what does not belong to the city? Is it rather its urban energy that fuels its frenzy, its violence? To what extent do these contradictions allow audiences to “inhabit the earth”, to find their place between the human and the non-human, to explore their roots?
This workshop aims to investigate the tensions underlying popular music’s relation to its milieu and its contradictory leanings. To what extent can we observe, here too, an evolution from the notion of nature to that of environment, with what ideological consequences? How does this inform our understanding and appraisal of American popular music, and beyond, of North American arts and cultures?
Participants are invited to submit either case studies of contemporary musical genres highlighting the meaning and function of the notions alluded to, or diachronic proposals focusing on the evolution of popular music’s relation to its surroundings.
Proposals (500 words, and a short bio) should be sent to Claude Chastagner. Papers will be delivered in English.
Olivier FRAYSSÉ (Paris Sorbonne) et Donna KESSELMAN (Paris XII)
De nature à environnement, des enjeux sociaux médiatisés
Le passage de la notion de nature à celle d’environnement, y compris la fusion/confusion de deux concepts ayant chacun une longue histoire peut-elle s’analyser sans la médiation du social et du politique ?
Esclavage des races adaptées au climat, loi naturelle du marché, fondation explicite des institutions sur la nature humaine, darwinisme social, Bell Curve, toute l’histoire américaine nous renvoie au fondement idéologique d’une prétendue naturalité du social, assise sur la notion de Création.
Dans la réalité, c’est plutôt le social qui détermine le rapport à la nature, et l’environnement « naturel » où vivent les hommes. Aux États-Unis, il est plus qu’ailleurs directement exprimé par le politique. Des paysages créés par la politique fédérale des terres publiques et les tracés des lignes de chemin de fer à la relance verte d’Obama, en passant par les town plans, King Cotton, l’extermination des bisons, le réseau hydrographique dessiné pendant le New Deal, le Highway Act de 1954, les Clean Air Acts, les réglementations minières, etc., un continent « vierge » a été façonné en deux siècles par le travail humain dans un cadre social qui a déterminé des décisions politiques.
Si le travail est la principale médiation entre l’homme et la nature, c’est en effet dans le cadre de rapports sociaux donnés qu’il réalise cette médiation : chaque prise de position sur « la nature », et aussi « l’environnement » est une prise de position dans les rapports sociaux, chaque prise de décision dans les rapports sociaux modifie le cadre dans lequel l’homme agit sur la nature, et le résultat concret du travail humain sur la nature est déterminé par le jeu des forces sociales dans le champ politique.
Les forces sociales dont la résultante est le travail de transformation de la nature agissent par le biais d’intermédiaires : lobbies, associations, syndicats, organes de presse, puissance publique. La manière dont les enjeux sociaux sont ainsi médiatisés influe in fine sur la nature depuis longtemps, mais aussi sur l’évolution des concepts : les débat sur l’érosion des sols cotonniers, les inondations, le ranching, le boll weevil, le Dust bowl, les enseignements de l’USDA ou du National Geographic ont joué un rôle crucial.
Les questions sociales ont toujours modelé la pensée des rapports de l’homme avec la nature et l’environnement : quand William Jennings Bryan parlait d’environnement, il parlait de « l’environnement chrétien de son enfance », il parlait de Dieu quand il parlait de la Nature, et refusait le darwinisme parce qu’il refusait le darwinisme social. Quand B.F. Skinner faisait disparaître le sujet dans l’interaction comportementaliste entre stimuli internes et externes, il s’inscrivait dans l’environnement marketing de la société de consommation.
Quels sont donc les enjeux sociaux et politiques qui ont permis le glissement de la notion de nature à celle d’environnement au sens actuel du terme, quelles sont les conséquences sociales et politiques de ce glissement, comment les forces sociales en ont-elles fait usage ?
C’est à cette dimension socio-politique de la question que nous nous intéresserons dans cet atelier.
Les propositions sont à envoyer à Olivier FRAYSSÉ et Donna KESSELMAN
From Nature to Environment: the Social and its mediations as Mediator
When nature as notion turns into environment, through the fusion / confusion of two concepts with their own narratives, can this be understood without the social and political as mediators?
Enslavement of races adapted to climate, natural market laws, institutions explicitly conceived to deal with human nature, social Darwinism, Bell Curve… American history perpetually renews the ideological foundations of an allegedly natural social reality, within the paradigm of Creation.
In reality, the way human beings interact with nature and their “natural” environments is driven by social forces. In the US – more than elsewhere? –, this socially driven interaction is expressed in political terms. From landscapes sketched out by federal public land and railroad policies to Obama’s green recovery plan, not to mention town plans, King Cotton, the extinction of the buffalo, the New Deal’s hydrographical network, the 1954 Highway Act, Clean Air Acts, mining regulations… a “virgin” continent was sculpted by two centuries of human labor, at work within social relations that shape political decisions.
Work is the main mediator between human beings and nature, operating within social relations at a given time: the stance one takes vis-à-vis “nature” and / or “environment”, depends on one’s place within the social; decisions affecting society’s relations modify the frame in which human beings act upon nature, and the materialization of human work applied to nature proceeds from social forces as they play out in the realm of politics.
Social forces which impact nature through work are expressed via intermediaries: business, associations, labor unions, the press, and public powers. Such mediation of social stakes has left its mark upon nature, as upon concepts and their evolution: debates over the erosion of cotton fields, floods, ranching, boll weevil, Dust Bowl, or the education provided by USDA or The National Geographic have played a crucial role.
Social issues have consistently cast relations between humans, nature and the environment: when William Jennings Bryan spoke of environment, he was speaking of the “Christian environment of his youth”, of God when he spoke of Nature, and his refusal of Darwinism was inseparable from his fight against social Darwinism. When the person as subject vanished into B.F. Skinner’s behaviorist interaction between internal and external stimuli, it did so within the marketing environment of consumer society.
What are the social and political determinants of the move “from nature to environment”? What are the social and political stakes and consequences of this evolution, how has it been exploited by social forces? This panel proposes to explore the socio-political dimension of this transition.
Proposals should be sent to Olivier FRAYSSÉ et Donna KESSELMAN
Wendy HARDING (Toulouse le Mirail ; CAS) & Jacky MARTIN (Montpellier 3)
Habiter l’inhabitable
Cette formulation paradoxale a pour but de dégager le thème de cet atelier et dénoncer son apparente banalité. Notre problématique sera l”habiter”, une autre façon de contourner l’inévitable dualité nature/culture.
Le glissement terminologique de “nature” à “environnement » dans le discours ambiant semble avoir résolu l’incidence et conséquences de l’inscription de l’homme dans son univers. Autrefois « nature » était tout ce qui n’était pas habitable ; aujourd’hui, dans le cadre des idéologies de l’ « environnement», notre habitation ne distingue plus ce qui est habitable de ce qui ne l’est pas. Nous sommes placés dans une niche écologique quelque part au centre ou dans la complexité d’un univers avec lequel nous interagissons. Le problème de l’habiter semble évacué, non pertinent.
Or ce problème continue à se poser, comme par le passé, peut-être de façon encore plus aiguë. L’habiter en tant qu’interface entre humain et non humain nous semble brouiller les concepts d’humain et de non humain en ce sens qu’elle concerne la nécessité pour les hommes de s’adapter et/ou d’adapter leur environnement. Les deux processus ne sont pas seulement en interaction, ils sont interdépendants. Ils ne concernent plus des concepts stables mais des processus. En envisageant les deux limites extrêmes de cette interface :1/ l’adaptation de l’humain dans les milieux hostiles (Les lieux extrêmes sont les espaces préférés des Nature Writers) et 2/ l’adaptation des milieux hostiles à la présence des hommes (On pense aux régions autrefois désertes ou marécageuses qui ont vu surgir d’immenses ensembles urbains), nous avons voulu sensibiliser le colloque non seulement à ce phénomène, mais à ses nombreuses réalisations dans le contexte américain : on pense aussi au paradoxe sociologique de certains Parcs Nationaux vidés de leurs habitants pour redevenir sauvages et à l’exil de ces mêmes populations vers des territoires inhospitaliers.
Dans ce processus d’adaptation mutuelle, ni l’humain ni le non humain ne sortent indemnes. On est dans le domaine des mixtes, des hybrides, des « cyborgs » et des phénomènes d’interférences que nous observons aussi bien dans la littérature que dans la culture américaine. Habiter est aussi bien habiter l’espace qu’être habité par l’espace.
Les propositions sont à envoyer à Wendy HARDING et Jacky MARTIN
Dwelling in uninhabitable places
The paradoxical title of this session aims to focus on the question of dwelling in a way that will take us beyond its apparent banality. Our focus on dwelling in uninhabitable places is hopefully a way to get around the apparently inevitable duality between nature and culture. The transition from the term “nature” to that of “environment” in current discourse seems to have revised and resolved the question of humanity’s insertion in the universe. Formerly. “nature” designated all that was not habitable ; now, with the concept of environment, our dwelling places no longer distinguish what is suitable for habitation from what is not. Instead they are placed somewhere within an ecological niche at the center of or within the complexity of a universe with which we interact. The question of dwelling as intermediary between habitation and location seems to have been evacuated, or seems not pertinent.
Yet this problem remains, as in the past, perhaps even more acutely. Redefining dwelling as an interface between the human and non-human seems to blur the two categories insofar as it requires human beings to adapt their environment or to adapt to it. The two processes are not only interactive, they are also interdependent. They no longer involve fixed concepts but processes. We can envisage two extreme limits of the interface between humanity and the non-human: 1) human adaptation to hostile environments (American Nature writers have a tendency to seek out extreme conditions) and 2) the adaptation of hostile environments to the presence of man (consider the desert regions or former swamps in which vast urban conglomerations have grown up). Such apparently perverse situations are fairly common in the American context. We could also consider the sociological paradox of some National Parks which have been emptied of their inhabitants in order to be converted to wilderness, while at the same time, government policy has exiled those populations into inhospitable territory.
In the process of mutual adaptation, neither the human nor the non-human comes out unchanged. Instead we are in the domain of mixtures, hybrids, “cyborgs” and other phenomena of interference to be found in American literature and more generally in the culture. Dwelling means both living in space and being inhabited by space.
Proposals should be sent to Wendy Harding and Jacky MARTIN
Abigail LANG (Université Denis Diderot – Paris 7)
Poétique(s) écologique(s). Formes et genres
Les critères qui définissent les « textes environnementaux » concernent avant tout leur contenu. Il s’agira ici de s’interroger sur les effets formels qu’une prise de conscience écologique peut avoir en littérature.
Quelques pistes, non exhaustives :
– Les textes présentant une sensibilité écologique manifestent-ils une affinité pour certains genres (fiction, poésie, théâtre, essai) ou certaines formes ?
– En biologie comme en littérature, la classification par genres donne lieu à des croisements et des hybrides. La « naissance » de Dolly et les manipulations scientifiques du vivant ont-elles des échos formels en littérature ?
– L’écologie remet l’homme à sa place dans la chaîne des êtres et dans le système des échanges. Par quels moyens formels la littérature réalise-t-elle ce changement de perspective ? Comment la littérature reflète-t-elle la remise en cause du schéma sujet-objet ?
– Les animaux sont traditionnellement mis à contribution par la littérature pour les abécédaires et les fables, réduits à une lettre ou à un trait, stéréotypés et humanisés. En philosophie, l’animal est le faire-valoir de l’exception humaine, le fond sur lequel se détache le propre de l’homme : raison et langage. Quels sont les procédés qu’invente la littérature pour représenter son autre, les êtres hors-la-langue ?
– Quand l’écologie devient militante et se fait écologisme, la littérature retrouve les écueils traditionnels de l’engagement et de la propagande. Les écrivains à sensibilité écologiques ont-ils développé de nouvelles formes pour convaincre ?
– Parmi les innombrables pratiques citationnelles contemporaines, peut-on dégager des techniques et une esthétique du recyclage ?
– La « découverte » de la nature à la fin du XVIIIe siècle a partiellement défini le romantisme. L’acuité de la crise écologique actuelle suscite(ra)-t-elle un semblable bouleversement esthétique ?
Au final, peut-on esquisser une, plusieurs poétiques(s) écologique(s) ?
Tous les genres littéraires pourront être abordés : fiction, poésie, théâtre, essai, théorie.
Les propositions sont à envoyer à Abigail LANG
Ecological poetics. Forms and genres
« Environmental texts » tend to be defined in terms of content and approach. This panel proposes to consider and explore the formal effects that a growing ecological awareness produces in literature. All literary genres may be considered : fiction, poetry, theatre, essay and theory.
The following topics might be considered:
– Do texts that display an ecological awareness favor certain genres (fiction, poetry, theatre, essay) or forms?
– In biology as in literature, classifying individuals by genres creates cross-breeding and hybrids. Have the “birth” of Dolly and other genetic manipulations had formal echoes in literature?
– Ecology puts man in his place within the chain of beings and the system of exchanges. By what formal means does literature enact this change of focus? How can it question the ingrained subject-object pattern?
– Literature has used the service of animals for alphabet books and fables, reducing them to a letter or a trait. Western philosophy has used animals as foils, as a ground for the figure of man’s exceptionality: reason and language. By what techniques can literature represent its other — beings outside language?
– When ecology turns to politics and activism, its literature runs the familiar risk of propaganda. Are ecologically-minded writers inventing new forms of persuasion?
– Among the countless current practices of citation, do specific techniques and an aesthetic of recycling emerge?
– Romanticism partly emerged from the “discovery” of nature at the end of the XVIIIth century. Is the acuteness of the current ecological crisis about to produce an aesthetic revolution even remotely similar in scope?
Ultimately, can a (or various) poetics of ecology be sketched?
All literary genres may be considered: fiction, poetry, theatre, essay, theory.
Proposals should be sent to Abigail LANG
Lionel LARRÉ (Université Bordeaux 3)
Les Amérindiens, de la nature à l’environnement
L’objectif de cet atelier sera dans un premier temps de dépasser les clichés trop communs quant aux Indiens et aux rapports qu’ils entretiennent avec la nature. Il s’agira cependant dans un deuxième temps, en examinant l’histoire et les pratiques ancestrales, certes, mais surtout les cultures et sociétés modernes amérindiennes, de comprendre ce rapport avec ce qu’il conviendra de définir comme nature ou comme environnement : les Amérindiens forment-ils/ont-ils formé des sociétés naturelles ou des cultures environnementales ? À quel point les conceptions amérindiennes ont-elles inspiré les formes écologiques euro-américaines ? Peut-on dire que les formes écologiques euro-américaines ont influencé les manifestations modernes de préservation ou de conservation des Amérindiens ? Quel est le lien à établir – certains le font – entre la préservation de cultures ancestrales et la protection de l’environnement ? Il y aura un intérêt à tenter de répondre à certaines questions proposées dans l’appel du Congrès d’un point de vue amérindien, au regard des cultures et pratiques amérindiennes : entre autres, « la place de l’homme au centre est-elle la meilleure façon de penser la relation entre l’humain et le non-humain » ? Quels sont les « droits des animaux dans une nature devenue environnement » ? « Quel est le rôle de l’enracinement dans un lieu » ?
Si les supports de la réflexion peuvent être des textes littéraires, la réflexion devra se mener dans une perspective de cultural studies et jeter des ponts entre littérature et civilisation.
Les propositions sont à envoyer à Lionel LARRÉ
Native Americans from Nature to Environment
The first objective of this workshop is to move beyond the usual clichés about the Native Americans and their relationship to nature. Participants are invited to examine not only the history and the ancient cultural practices but also modern Native American cultures and societies in order to understand the relationship they have with what will be defined as nature or environment. Have Native Americans ever formed natural societies or environmental cultures? To what extent have Native concepts inspired Euro-American forms of ecology? Have Euro-American ecological manifestations inspired modern preservation policies of Native America? What is the link one can establish between the preservation of ancient cultures and the protection of the environment? Besides these questions, it will be interesting to try to answer some others suggested by the conference call for papers: should the relationship between the human and the non-human be constructed with man occupying the center? What are the rights of animals when nature has become the environment?
Literary texts are only some of the documents which should be examined to answer these questions and others to be posed, but the analysis should be placed in a cultural studies perspective.
Proposals should be sent to Lionel LARRÉ
Béatrice PIRE (Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3)
« Où vont les canards en hiver ? »
Central Park et autres parcs dans l’imaginaire littéraire américain
Dessiné par les architectes paysagistes Frederick Law Olmsted et Calvert Vaux en 1857, Central Park est le premier grand parc public aux États-Unis. « Trouée géante dans la grille de Manhattan » (Hubert Damisch) abritant quelque 200 espèces d’oiseaux et une dizaine de mammifères, il est une célébration de la monumentale nature américaine, divisée en trois ensembles : la pastorale, le pittoresque et une partie d’inspiration plus formelle. Espace de sauvagerie au sein de la civilisation, corps primitif en marge du corps institutionnel, il permet l’inscription dans la géographie urbaine d’un temps mythique, parallèle à l’histoire. Le but de l’atelier est de cerner, dans la littérature (romans, poésie, théâtre), comment cette réserve naturelle (eau, végétation, faune) crée un environnement spécifique dans la ville et module identités et relations : surgissement des fantasmes et des pulsions, rapport spécifique à la liberté et au plaisir, nouveau lien démocratique. Les participants sont invités à souligner en quoi Central Park – comme toile de fond, métaphore ou personnage à part entière – détermine une ontologie urbaine originale et distincte de la jungle en asphalte alentour. D’autres grands parcs publics peuvent aussi être abordés.
Les propositions sont à envoyer à Béatrice PIRE
« Where do the ducks go in winter ? »
Central Park and other parks in American literary imagination
Designed in 1857 by landscape architects Frederick Law Olmsted and Calvert Vaux, Central Park was the first urban public park in the United States. « A gigantic gap in the Manhattan grid » (Hubert Damisch), it is a wildlife sanctuary, an oasis for a few hundred migrating birds, an American nature in miniature that divides into three different kinds of landscapes, pastoral, picturesque and a more formal one. As a wilderness surrounded by civilization, a primitive locus set aside by the social and institutionalized world, it allows access to mythic time outside history. This workshop looks at the way this natural reserve has created a unique environment within the city and mapped new identities and relations. How do animals, water and vegetation in a public park deeply redefine the urban self, others and the very notions of freedom, pleasure and democracy? Participants to this pannel should show how Central Park, as a setting, a metaphor or a character even, determines a specific urban ontology that is different from the asphalt jungle around. Other public parks, also central in American literary imagination (whether in fiction, poetry or theater) can be picked up.
Proposals should be sent to Béatrice PIRE
Serge RICARD (Sorbonne Nouvelle – Paris 3)
Préservation contre conservation ; d’une nature idéalisée à un environnement maîtrisé :
les théories et politiques environnementales aux États-Unis du XIXe siècle à nos jours
On s’intéressera aux sensibilités et à l’héritage de deux courants et de deux philosophies antagoniques dont on trouve les prémices au XVIIIe siècle et que vont incarner deux pères fondateurs de l’écologie américaine, John Muir et Gifford Pinchot. La vision idéalisée de Muir d’une nature dont la pureté originelle doit être préservée sera partagée un temps par Pinchot qui s’en écartera et se verra préférer très vite, sous l’influence de ce dernier, une conception utilitaire de la conservation des ressources naturelles pour les générations futures qui conduira aux politiques actuelles de développement durable.
Les propositions sont à envoyer à Serge RICARD
Preservation vs. Conservation; from Idealizing Nature to Taming the Environment:
Environmental Theories and Policies in the United States from the 19th Century to Our Day
Emphasis will be placed on the positioning and legacies of two antagonistic trends and philosophies embodied by two founding fathers of American ecology, John Muir and Gifford Pinchot, and whose origins can be traced back to the 18th century. Muir’s idealized view of nature whose primeval purity must be preserved was shared for a short while then abandoned by Pinchot. Under the latter’s influence Muir’s vision was quickly superseded by a utilitarian conception of the preservation of natural resources for the generations to come which would lead to today’s policies of sustainable development.
Proposals should be sent to Serge RICARD
Marie-Jeanne ROSSIGNOL (Paris – Diderot) et Rahma JERAD (Paris 1)
Slavery, abolition and their natural environments in America 1765-1865
Par la fuite, la mission de prosélytisme ou le voyage vers d’autres régions, les acteurs de la question de l’esclavage et de l’abolition ont inscrit la nature au cœur d’un combat politique, et ont ainsi défini des « environnements » naturels de l’esclavage, contextes actifs d’un combat politique.
Au cœur de l’histoire de l’esclavage et de l’abolition en Amérique se trouve un environnement naturel qui façonne l’institution, contraint et libère l’esclave à la fois. On pense par exemple à l’esclave en fuite, qui utilise la nature environnante pour dissimuler sa fuite, une nature qui peut aussi le trahir. De même, certains abolitionnistes ont-ils inscrit leur combat dans de longues traversées de l’Amérique, où ils arpentent les chemins sur d’immenses distances, à cheval ou même à pied, sensibles à la sauvagerie de la nature et de ses habitants autochtones, à la variété des régions et des réactions de ses habitants. D’autres acteurs états-uniens de ce grand processus, pro-esclavagistes, sont fascinés par une « nature » propice à la société et l’économie esclavagistes et vont chercher cet environnement au-delà même des frontières de leur pays, dans des lieux exotiques et pourtant proches.
Les communications pourront porter sur la fuite dans les récits d’esclaves et les romans, sur l’environnement réel géographique de l’esclavage (et son impact sur l’économie), sur l’environnement rêvé de l’esclavage et sur les lieux de confrontation des esclavagistes et des émancipationnistes (frontière des Appalaches par exemple).
Atelier transversal civ-litt présenté par Marie-Jeanne Rossignol (Université Paris-Diderot) et Rahma Jerad (Université Paris 1). Les propositions sont à envoyer à Marie-Jeanne Rossignol, et Rahma Jerad
Slavery, abolition and their natural environments in America 1765-1865
Through flight, a proselytizing mission or journeys to other regions, actors of the slavery and abolition question inscribed nature within their political struggle, and thus defined natural « environments» for slavery, the living contexts of a political struggle.
At the heart of the history of slavery and abolition in America lies a natural environment that shaped the institution, while constraining and freeing slaves at the same time. One may think of the runaway slave, using nature to hide his flight, but sometimes exposed by this very nature. In the same way, some abolitionists inscribed their struggle in long journeys over vast distances, riding horses or even walking, while being made sensitive to a wild nature and its wild native inhabitants, and realizing the diversity in North American regions and its inhabitants’ reactions. Other proslavery participants in this great debate, were fascinated by the idea of a « favorable » environment for their slave society and economy, and went looking for it beyond the borders of their own country, in exotic yet nearby climes.
Papers can bear on runaway slaves in slave narratives and novels, on the real geographical environment of slavery (and its impact on the economy) as well on its imagined environment and on the places of confrontation between slave-owners and emancipationists (the Appalachian frontier for instance).
This is an interdisciplinary American Studies workshop open to scholars both in literature and history. Proposals should be sent to Marie-Jeanne Rossignol and Rahma Jerad
Amy D. WELLS (Limoges / Blaise Pascal – Clermont 2 ; Espaces Humains et Interactions Culturelles – EHIC) et William DOW (Paris-Est – Marne-la-Vallée)
American Modernist Literary Landscapes 1900 to 1950:
From “Nature” to “Environment”
The relation of people to land is finally a product of the interaction of three factors: the basic physical nature of the environment, the preconceptions with which it is approached by its inhabitants, and the changes man makes in it. (Leonard Lutwack, The Role of Place in Literature)
In their quest to establish a truly American literary tradition, Modernist American writers such as William Carlos Williams (In the American Grain, 1925) and Sherwood Anderson (Winesburg, Ohio, 1919) strive to capture elements of American paysage and its identity in their writings. This Modernist tradition evolves from the literary force of the American frontier, which suggests that there is something innate in American soil (of a physical nature) which contributes to the American literary tradition.
The turn of the century and the development of urban spaces are underlying elements of Modernist Literature, and a factor which contributes to the transition from “nature” to “environment” is the important role the cityscape plays in Modernist texts. While Flannery O’Connor’s and William Faulkner’s literature of the South still hinges upon the literal “nature” of its setting, urban writers such as Djuna Barnes and Anaïs Nin employ the city “environment” and networks to structure their narratives. Whether rural or urban, writers’ and readers’ preconceptions of these spaces are relied upon to make characters and stories work.
American Modernist Literary landscapes are also a question of perspective and changes. More precisely, the literature of the expatriate movement offers a view of America from abroad, creating a sub-genre of American literature. In Paris France (1940), Gertrude Stein speaks to the importance of both physical and metaphorical distance when writing about a place:
After all everybody, that is, everybody who writes is interested in living inside themselves in order to tell what is inside themselves. That is why writers have to have two countries, the one where they belong and the one in which they live really. The second one is romantic, it is separate from themselves, it is not real but it is really there. […] Of course sometimes people discover their own country as if it were the other […] but in general that other country that you need to be free in is the other country not the country where your really belong. (2-3).
It was in writing about America from Paris that Stein attempted to capture the essence of The Making of Americans (1906-08/1925).
In this panel, we will reflect on the special relationships of nature—environment and landscape—cityscape—paysage in Modernist American works with a special focus on the physical nature, the preconceptions, and the changes present in these relationships. Question to consider include:
How do natural landscapes and cityscapes merge in the Modernist text?
What is written by and through the land? Can we identify “environmental” narrative strategies?
How are American landscapes and cityscapes represented from an expatriate perspective?
How does “writing the land” play a role in preservation?
Do literary representations of landscape, cityscape and paysage break down along gender lines?
Proposals should be sent to Amy D. WELLS and William Dow
Paysages littéraires du modernisme américain, 1900-1950
Dans leurs efforts pour établir une tradition littéraire purement américaine, des écrivains américains modernistes tel que William Carlos Williams (In the American Grain, 1925) et Sherwood Anderson (Winesburg, Ohio, 1919) saisissent les éléments du paysage américain dans leurs écrits. Cette tradition moderniste, qui se nourrit de la force littéraire du front pionnier américain, révèle l’importante contribution de l’essence de la terre américaine (une nature physique) à la tradition littéraire américaine.
Le début du XXe siècle et l’essor des espaces urbains sont des topos de la littérature moderniste. Ces facteurs contribuent à la transition de « nature » à « environment » du fait du rôle important joué par le paysage urbain dans les textes modernistes. Ainsi la littérature du Sud de Flannery O’Connor et William Faulkner s’appuie toujours sur une « nature » littérale inscrite dans son contexte, tandis que des écrivains urbains comme Djuna Barnes et Anaïs Nin se servent de « l’environnement » urbain et de ses réseaux pour structurer leur textes. Rurales ou urbaines, les préconceptions de ces espaces par les écrivains et leurs lecteurs sont impliquées dans la compréhension des textes.
Dans la littérature moderniste américaine, les paysages sont aussi une question de perspectives et de changements. Plus particulièrement, les écrits des expatriés proposent une perspective sur les États-Unis depuis l’étranger, créant un sous-genre de la littérature américaine. Dans son ouvrage Paris France (1940), Gertrude Stein évoque l’importance de la distance, à la fois physique et métaphorique, en écrivant sur un endroit :
After all everybody, that is, everybody who writes is interested in living inside themselves in order to tell what is inside themselves. That is why writers have to have two countries, the one where they belong and the one in which they live really. The second one is romantic, it is separate from themselves, it is not real but it is really there. […] Of course sometimes people discover their own country as if it were the other […] but in general that other country that you need to be free in is the other country not the country where your really belong. (2-3).
C’est justement en écrivant sur les États-Unis depuis Paris que Stein veut capturer l’essence américaine dans son texte The Making of Americans (1906-08/1925).
Dans cet atelier, nous réfléchirons sur les rapports entre « nature », « environment » et landscape—cityscape—paysage dans la littérature moderniste américaine, en soulignant en particulier la nature physique, les préconceptions et les changements présents dans ces rapports. Quelques questions sont ainsi à considérer :
Comment les paysages ruraux et urbains sont-ils fusionnés dans les textes modernistes ?
Qu’est-ce qui est écrit par et à travers le paysage et le territoire ? Peut-on identifier des stratégies narratives « environnementales » ?
Quelle est la représentation des paysages ruraux et urbains américains du point de vue des expatriés ?
Le fait « d’écrire le territoire » joue-t-il un rôle dans sa préservation ?
Existe-t-il des rapports entre le genre de l’écrivain et sa représentation des paysages ruraux et urbains ?
Les propositions sont à envoyer à Amy D. WELLS and William Dow