Michel Bandry nous a quittés. Beaucoup de ceux qui l’ont connu en seront surpris. Pendant deux ans, il s’est battu avec un courage admirable contre l’horrible maladie de Charcot. Même ceux qui, comme moi, ont pu suivre l’évolution très rapide de la maladie restent incrédules devant cette disparition soudaine.
Le parcours professionnel de Michel Bandry est exemplaire, d’autant plus que contrairement à tous ceux qui ont reçu le soutien de parents aisés, il a dû se battre pied à pied pour franchir les obstacles successifs qui l’ont conduit du baccalauréat (obtenu par le CNED, tout en travaillant comme surveillant d’internat) au poste de professeur des universités, puis à la présidence du CAPES et à celle du Comité Consultatif des Universités.
Je connaissais Michel depuis plus de dix ans lorsqu’en 1989, Daniel Royot, qui enseignait à l’Université Paul-Valéry de Montpellier, nous a proposé de postuler ensemble aux deux postes de professeur qui étaient vacants : le sien (pour Michel), et celui de Claude Richard, récemment décédé, pour moi. Michel avait enseigné successivement à Aix-Marseille et à Nice. Nous avons donc rejoint l’UPV en même temps, et nous avons travaillé en parfaite harmonie, de 1989 à 2004, date de notre retraite commune, nous partageant les cours de littérature et de civilisation — partage facilité par nos spécialités respectives : le Sud pour lui, la Nouvelle-Angleterre pour moi. Michel a assez vite accepté la responsabilité de l’UFR 2, qu’il a gérée avec autorité, rigueur et humanité — trois qualités qui vont rarement de pair. Il a ensuite été président du jury de CAPES. Je n’en ai pas été membre, mais je sais par ceux qui l’y ont secondé qu’il y a manifesté les mêmes qualités. Enfin, et surtout, il a été vice-président, puis président de la 11ème section du CNU. J’y ai été nommé lorsqu’il a accédé à la présidence, et ai donc pu constater, lors des premières réunions, son talent de démineur : le climat était tendu, en raison d’oppositions de tous ordres, et il est d’emblée parvenu à imposer une autorité sereine, qui n’aurait pas été possible sans l’estime qu’il recevait de chacun. Je me souviens de la chaleur avec laquelle tous l’ont remercié à l’issue de la dernière session.
Nous ne nous sommes jamais perdus de vue, au cours des quinze dernières années. Il s’était habitué avec la même facilité à sa nouvelle vie. Il était en parfaite santé lorsqu’il nous a fait part de son inquiétude devant une perte de sa force musculaire. C’était la maladie de Charcot, qui l’a emporté en deux ans, sans jamais lui faire perdre le self-control qui avait toujours été sa qualité première. J’ai été honoré d’être son ami, et d’avoir conservé son amitié, jusqu’au bout.
Yves Carlet (Université Paul Valéry Montpellier 3)