Colloque international
Pas de (ré)conciliation sans décolonisation ?
Dialogue(s) et dissonance(s) entre communautés autochtones,
allochtones et autorités publiques en Amérique du Nord
Université de Poitiers, 7, 8 et 9 Mars 2024
Organisé à l’Université de Poitiers par le MIMMOC, en partenariat avec :
– À l’Université de Poitiers : l’IEAQ, la chaire de recherche Senghor sur la francophonie, la MSHS et le festival Bruits de Langues ;
– Sur le plan régional : la Fédération pour l’étude des civilisations contemporaines (FE2C) : D2iA La Rochelle, Rémélice Orléans et EHIC Limoges ;
– À l’international : le Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones CIÉRA-MTL de l’Université de Montréal.
Appel à communication (English version available below)
Malgré un processus dit de réconciliation initié en 2008 au Canada (Commission Vérité et Réconciliation), le dialogue entre populations autochtones, allochtones et autorités publiques au Canada et aux États-Unis, quand il est amorcé, semble souvent se heurter à des obstacles. Si certains sont évidents, tels que la discrimination systémique qui perdure envers les Autochtones, d’autres le sont moins, et découlent par exemple des difficultés à exposer et assumer la mémoire des crimes passés (Madley) ou de l’éloignement entre les différents acteurs en question, produit du colonialisme. Parfois, il s’agit encore d’un manque de connaissance « patent » (Bousquet). Face à ce constat, ce colloque se donne pour but de chercher à cerner ce qui demeure de l’ordre du colonialisme, du néo-colonialisme, de la colonialité(Escobar), des impasses du post-colonialisme – autant de concepts essentiels qu’il s’agira d’explorer. En somme, l’objectif est d’étudier ce qui empêche encore, souvent, une relation « équitable et inclusive » (Principes de réconciliation, CVRC) entre populations autochtones et allochtones.
Qu’est-ce qui perdure des pratiques coloniales, structurellement ou systémiquementdans le récit historique, les politiques publiques, les mémoires collectives et les représentations ? Quelles sont les forces de transformation de ces processus « encore » coloniaux, actives aux échelles locales, des États ou provinces, nationales, mais aussi inter et transnationales ? Quelles sont les voix qui, dans les mouvements sociaux, politiques, littéraires, philosophiques, artistiques proposent un renversement, un renouvellement du rapport au passé et la possibilité d’altérités constructives ? En quoi cette dynamique de décolonisation pourrait-elle être bénéfique aux populations autochtones, et permettre d’envisager une coexistence collaborative libérée du poids et des entraves du passé ?
Ce colloque pluridisciplinaire tentera de répondre à certaines de ces questions en explorant, parmi d’autres, les axes de réflexion suivants :
ü les effets du colonialisme et du néo-colonialisme sur la situation actuelle des populations autochtones d’Amérique du Nord, et sur les relations entre les populations autochtones et les autres ; une réflexion sur la notion de colonialité (Escobar) ;
ü l’impact, sur la situation actuelle, de la (non) reconnaissance et la (non) mémorialisation des politiques discriminatoires et/ou génocidaires, subies par les populations autochtones d’Amérique du Nord, politiques souvent tout simplement tues par les autorités (Dunbar-Ortiz) ;
ü l’état des réflexions et discussions sur la réparation des crimes passés à de multiples échelles, entre le local, le national et le transnational, entre histoire particulière et histoire collective (Bousquet)
ü des réflexions autour des notions de ruptures et/ou de continuité, de fixité (Bhabha) et de progrès, de temporalité et d’atemporalité (Fabian), qui remettraient en question la vision linéaire de l’histoire de la colonisation, des relations entre autochtones et allochtones, de l’action et de l’inaction, du visible et de l’invisible, des dites « ruptures » dans les pratiques coloniales ou post-coloniales ou encore les représentations des actions de résistances autochtones ;
ü les notions de collaboration, de co-création et de co-résistance dans la lutte pour la décolonisation et pour l’autochtonisation, mais aussi le décentrement et l’humilité culturelle, l’intégration des savoirs et perspectives autochtones, ainsi que l’inclusion d’une vision holistique et d’une approche relationnelle dans le rapport à l’individu et au groupe ;
ü la décolonisation des épistémologies en vue de la déconstruction des concepts normatifs occidentaux, de terminologies (« découverte », « progrès », « universalisme ») et de la représentation de l’altérité, notamment par l’apprentissage des langues autochtones, la traduction des œuvres autochtones et l’utilisation de cadres méthodologiques et théoriques autochtones (Battiste) ;
ü envisager la « structure coloniale » (Wolfe) dans son ensemble, les liens, les réseaux, ramifications et espaces interconnectés qui entravent le processus de décolonisation ;
ü le lien intime entre territoire et (dé)colonisation : le territoire, la frontière, la territorialisation et la déterritorialisation (Rifkin) ;
ü le rôle de l’art, de la comédie, de l’humour, de la littérature dans le processus de rencontre interculturelle et de co-création (Wagamese, King, Théâtre Menuentakuan).
Les propositions de communication peuvent être présentées en anglais ou en français. Merci de faire parvenir le titre et le résumé de votre communication (250-300 mots), ainsi qu’une courte bio-bibliographie, au comité d’organisation avant le 15 décembre 2023. Les collègues seront notifiés de l’acceptation ou non de leur proposition à la mi-janvier 2024.
Une publication découlera des travaux du colloque.
Comité organisateur :
Kelly Fazilleau : kelly.fazilleau
André Magord : andre.magord
Julien Zarifian : julien.zarifian
En collaboration avec Marie-Pierre Bousquet, Université de Montréal et le CIÉRA-MTL
Bibliographie:
Ashcroft, Bill, Gareth Griffiths, and Helen Tiffin. The Empire Writes Back: Theory and Practice in Post-Colonial Literatures. London: Routledge, 1989.
Barnd, Natchee Blu. Native Space: Geographic Strategies to Unsettle Settler Colonialism. Corvallis : Oregon State University Press, 2017
Battiste, Marie. “Decolonizing the University: Ethical Guidelines for Research Involving Indigenous Populations”. Findlay LM, Bidwell PM (eds) Pursuing Academic Freedom: “Free and Fearless”? Saskatoon, SK: Purich Press, 2001, p. 190–203.
Bhabha, Homi K. The Location of Culture. 1994. London: Routledge, 2004.
Bousquet, Marie-Pierre. « La constitution de la mémoire des pensionnats indiens au Québec : Drame collectif autochtone ou histoire commune ? ». Recherches amérindiennes au Québec, 46(2-3), 2016, p. 165–176.
Commission de Vérité et de Réconciliation au Canada. Appels à l’action. 2012, version électronique, site web : www.trc.ca
Commission de Vérité et de Réconciliation au Canada. Ce que nous avons retenu : Les principes de la vérité et de la réconciliation. 2015, version électronique, site web : www.trc.ca
Coulthard, Glen. Red Skin, White Masks: Rejecting the Colonial Politics of Recognition. Minneapolis: University of Minnesota Press, 2014.
Dunbar-Ortiz, Roxanne. An Indigenous People’s History of the United States, Beacon Press, Boston, 2014.
Escobar, Arturo, et Retrepo Eduardo. « Anthropologies hégémoniques et colonialité », Cahiers des Amériques latines, n° 62, 2009, p.83-95.
Fabian, Johannes. Time and the Other: How Anthropology Makes its Object. New York: Columbia UP, 2014.
Gaudry, Adam, and Lorenz, Danielle. « Indigenization as inclusion, reconciliation, and decolonization: navigating the different visions for indigenizing the Canadian Academy ». AlterNative, 14(3), 2018, p. 218-227.
King, Thomas. The Inconvenient Indian: A Curious Account of Native People in North America. Anchor Canada, 2013.
Lonetree, Amy. Decolonizing Museums: Representing Native America in National and Tribal Museums. Chapel Hill : The University of North Carolina Press, 2012.
Loomba, Ania. Colonialism/Postcolonialism. 1998. London: Routledge (2nd ed.), 2005.
Madley, Benjamin. “Reexamining the American Genocide Debate: Meaning, Historiography, and New Methods”, The American Historical Review, vol. 120, n° 1, 2015, p. 98-139.
Mencé-Caster, Corinne, et Cécile Bertin-Elisabeth. « Approches de la pensée décoloniale ». Archipélies, 2018.
Rifkin, Mark. « Settler Common Sense ». Settler Colonial Studies, vol. 3, n° 3–4, 2013, p. 322–40.
Smith, Linda Tuhiwai. Decolonizing Methodologies Research and Indigenous Peoples [1999]. Londres : Zed Books, 2012 [2e éd.].
Wagamese, Richard. Indian Horse. Douglas & McIntyre, 2012.
Wolfe, Patrick. “Settler Colonialism and the Elimination of the Native”. Journal of Genocide Research, vol. 8, n° 4, 2006, p. 387-409.
International Conference
No (re)conciliation without decolonization? Dialogue(s) and dissonance(s) between indigenous communities, non-indigenous communities, and public authorities in North America
University of Poitiers, France, March 7, 8, and 9, 2024
Organized at the University of Poitiers by the MIMMOC, in partnership with:
– At the University of Poitiers: the IEAQ, the Senghor Research Chair in Francophonie, the MSHS and the festival Bruits de Langues;
– Regionally: the Fédération pour l’étude des civilisations contemporaines (FE2C): the D2iA La Rochelle, Rémélice Orléans and EHIC Limoges;
– Internationally: the Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones (CIÉRA-MTL) at the University of Montréal.
Despite a so-called reconciliation process initiated in 2008 in Canada (Truth and Reconciliation Commission), the dialogue between indigenous and non-indigenous populations and public authorities in Canada and the United States, when it is initiated, often seems to encounter significant obstacles. While some are obvious, such as the systemic discrimination that persists against Aboriginal people, others are less so, and stem, for example, from the difficulties in exposing and coming to terms with the memory of past crimes (Madley) or the estrangement between the various actors in play, caused by colonialism. Sometimes, it is still a matter of a “patent” lack of knowledge (Bousquet). In light of these observations, this conference aims to seek to identify the lingering legacy of colonialism, neo-colonialism, coloniality (Escobar), the impasses of post-colonialism – all essential concepts that will to be explored. In short, the objective is to study what still often stands in the way of a “fair and inclusive” relationship (Principles of Reconciliation, Truth and Reconciliation Commission) between indigenous and non-indigenous populations.
What then persists in terms of colonial practices, structurally or systemically in the historical narrative, public policies, collective memories and representations? What are the forces of transformation of these “current” colonial processes, active at the local, state or provincial, national, but also inter- and transnational levels? What are the voices which, in social, political, literary, philosophical and artistic movements, propose a reversal, a renewal of the relationship with the past, and the possibility of constructive otherness? How could this dynamic of decolonization be beneficial to indigenous populations, and facilitate a collaborative coexistence freed from the weight and shackles of the past?
This multidisciplinary symposium will attempt to answer some of these questions by exploring, among others, the following lines of inquiry:
ü the effects of colonialism and neo-colonialism on the current situation of indigenous peoples in North America, and on the relationships between indigenous peoples and others; a reflection on the notion of coloniality (Escobar);
ü the impact, on the current situation, of the (non) recognition and (non) memorialization of discriminatory and/or genocidal policies imposed upon the indigenous populations of North America, policies that are often simply omitted by the authorities (Dunbar-Ortiz);
ü the current state of reflections and discussions on the reparation of past crimes at multiple scales, between the local, the national and the transnational, between particular history and collective history (Bousquet).
ü the discussions pertaining to the notions of breaks and/or continuity, fixity (Bhabha) and progress, temporality and atemporality (Fabian), which would call into question the linear vision of the history of colonization, of relationships between natives and non-natives, action and inaction, the visible and the invisible, so-called “breaks” in colonial or post-colonial practices or even representations of native acts of resistance;
ü the notions of collaboration, co-creation and co-resistance in the struggle for decolonization and indigenization, but also cultural decentering and humility, the integration of indigenous knowledge and perspectives, as well as the inclusion of a holistic perspective and a relational approach in the relationship with the individual and the group;
ü the decolonization of epistemologies in order to deconstruct Western normative concepts, terminologies (“discovery”, “progress”, “universalism”) and the representation of otherness, in particular through the learning of indigenous languages, translation of indigenous works and the use of indigenous methodological and theoretical frameworks (Battiste);
ü to consider the “colonial structure” (Wolfe) as a whole, the links, networks, ramifications and interconnected spaces that hinder the process of decolonization;
ü the intimate link between territory and (de)colonization: the territory, the border, territorialization and deterritorialization (Rifkin);
ü the role of art, comedy, humour, literature in the process of intercultural interaction and co-creation (Wagamese, King, Menuentakuan Theatre).
Proposals for papers may be submitted in English or French. Please send the title and abstract of your paper (250-300 words), together with a short bio-bibliography, to the organizing committee by December 15th, 2023. Colleagues will be notified whether or not their proposal has been accepted by mid-January 2024.
A publication will result from the conference.
Organizing committee:
Kelly Fazilleau : kelly.fazilleau
André Magord : andre.magord
Julien Zarifian : julien.zarifian
In collaboration with Marie-Pierre Bousquet, University of Montréal and the CIÉRA-MTL
Bibliography:
Ashcroft, Bill, Gareth Griffiths, and Helen Tiffin. The Empire Writes Back: Theory and Practice in Post-Colonial Literatures. London: Routledge, 1989.
Barnd, Natchee Blu. Native Space: Geographic Strategies to Unsettle Settler Colonialism. Corvallis: Oregon State University Press, 2017
Battiste, Marie. “Decolonizing the University: Ethical Guidelines for Research Involving Indigenous Populations”. Findlay LM, Bidwell PM (eds) Pursuing Academic Freedom: “Free and Fearless”? Saskatoon, SK: Purich Press, 2001, p. 190–203.
Bhabha, Homi K. The Location of Culture. 1994. London: Routledge, 2004.
Bousquet, Marie-Pierre. « La constitution de la mémoire des pensionnats indiens au Québec : Drame collectif autochtone ou histoire commune ? ». Recherches amérindiennes au Québec, 46(2-3), 2016, p. 165–176.
Commission de Vérité et de Réconciliation au Canada. Appels à l’action. 2012, version électronique, site web : www.trc.ca
Commission de Vérité et de Réconciliation au Canada. Ce que nous avons retenu : Les principes de la vérité et de la réconciliation. 2015, version électronique, site web : www.trc.ca
Coulthard, Glen. Red Skin, White Masks: Rejecting the Colonial Politics of Recognition. Minneapolis: University of Minnesota Press, 2014.
Dunbar-Ortiz, Roxanne. An Indigenous People’s History of the United States, Beacon Press, Boston, 2014.
Escobar, Arturo, et Retrepo Eduardo. « Anthropologies hégémoniques et colonialité », Cahiers des Amériques latines, n° 62, 2009, p.83-95.
Fabian, Johannes. Time and the Other: How Anthropology Makes its Object. New York: Columbia UP, 2014.
Gaudry, Adam, and Lorenz, Danielle. « Indigenization as inclusion, reconciliation, and decolonization: navigating the different visions for indigenizing the Canadian Academy ». AlterNative, 14(3), 2018, p. 218-227.
King, Thomas. The Inconvenient Indian: A Curious Account of Native People in North America. Anchor Canada, 2013.
Lonetree, Amy. Decolonizing Museums: Representing Native America in National and Tribal Museums. Chapel Hill : The University of North Carolina Press, 2012.
Loomba, Ania. Colonialism/Postcolonialism. 1998. London: Routledge (2nd ed.), 2005.
Madley, Benjamin. “Reexamining the American Genocide Debate: Meaning, Historiography, and New Methods”, The American Historical Review, vol. 120, n° 1, 2015, p. 98-139.
Mencé-Caster, Corinne, et Cécile Bertin-Elisabeth. « Approches de la pensée décoloniale ». Archipélies, 2018.
Rifkin, Mark. « Settler Common Sense ». Settler Colonial Studies, vol. 3, n° 3–4, 2013, p. 322–40.
Smith, Linda Tuhiwai. Decolonizing Methodologies Research and Indigenous Peoples [1999]. Londres : Zed Books, 2012 [2e éd.].
Wagamese, Richard. Indian Horse. Douglas & McIntyre, 2012.
Wolfe, Patrick. “Settler Colonialism and the Elimination of the Native”. Journal of Genocide Research, vol. 8, n° 4, 2006, p. 387-409.