AFEA NEWS: Black Lives Matter : formes politiques et artistiques de l’antiracisme aux États-Unis et au Royaume-Uni Université Paul-Valéry Montpellier 3, 16 et 17 mai 2024
Appel à communications colloque international
Black Lives Matter : formes politiques et artistiques de l’antiracisme aux États-Unis et au Royaume-Uni
Université Paul-Valéry Montpellier 3, 16 et 17 mai 2024
[English version below]
Argumentaire
Prenant pour point de départ la séquence ouverte au début des années 2010 par l’émergence de mouvements antiracistes animés par le slogan « Black Lives Matter », ce colloque souhaite examiner les mobilisations antiracistes dans leurs continuités historiques, leurs circulations géographiques, leurs échos politiques, leurs impacts sur les trajectoires individuelles et collectives, ainsi que les réponses qu’elles ont suscitées, particulièrement dans le domaine artistique.
Nous appelons des communications dans un périmètre disciplinaire large, c’est-à-dire de manière non-exhaustive : littérature, civilisation, linguistique, études musicales et visuelles, études africaines-américaines, esthétique, histoire, sociologie, science politique, géographie, philosophie, études culturelles, anthropologie. L’aire de référence de ce colloque est constituée par les États-Unis et le Royaume-Uni. Des communications s’intéressant à des comparaisons et des circulations vers d’autres aires géographiques sont cependant bienvenues.
Continuités historiques, circulations géographiques
Le mouvement « Black Lives Matter » s’inscrit dans une histoire longue des mouvements radicaux noirs américains et ce sont précisément ces modalités qu’il s’agit de préciser : dans quelle(s) temporalités s’inscrit-il ? Est-il utile de penser en termes de vagues antiracistes, sur le modèle – contesté – des vagues féministes ? Ou même en termes de générations, avec pour point de repère central la génération du mouvement pour les droits civiques ? Pour ce qui est du Royaume-Uni, quelle articulation avec la double histoire des luttes décoloniales et des luttes de libération noires ?
La question des inscriptions historiques se double de celle des inscriptions locales, nationales ou continentales des mouvements « Black Lives Matter », dont les termes sont à préciser : avons-nous affaire à des traductions, des déclinaisons, des appropriations, des hybridations ?
Quelles ont été les circulations géographiques des slogans du mouvement, de ses modalités d’action et même de ses militant-e-s?
Espaces, lieux de mémoire, institutions
Les mobilisations antiracistes de la séquence « Black Lives Matter » ont politisé l’espace, ou a minima révélé les rapports de pouvoir qui le structurent. Elles l’ont fait à la fois par des occupations temporaires de l’espace public sous la forme de rassemblements et de manifestations, ainsi que par des occupations plus durables de l’espace public comme dans la capitale fédérale états-unienne Washington, DC, qui toutes toutes remettent en cause le contrôle ordinaire de cet espace public par des forces de police majoritairement blanches qui constituent une menace à l’encontre de l’intégrité physique et des libertés des personnes noires.
Le renouveau des mouvements « Black Lives Matter » au printemps 2020 a aussi été marqué par des actions menées contre l’héritage monumental de l’esclavage, de la ségrégation et du colonialisme, tout particulièrement particulier dans le Sud des Etats-Unis ainsi que dans les grandes villes du Royaume-Uni. Cette politique des statues révèle que l’espace public est aussi un lieu où co-existent, malaisément et de manière contradictoire, des lieux de mémoire raciste et antiraciste et où cohabitent donc dans les faits des mémoires opposées. La force symbolique de l’occupation de l’espace public et de la remise en cause de la statuaire raciste en a aussi fait des lieux privilégiés de (re)définition des relations entre manifestant-e-s antiracistes et autorités publiques, lesquelles ont déployé un éventail de réponses allant de la répression à la retenue et de l’indifférence à des formes de cooptation.
Faire mouvement
Les mouvements de contestation écologistes ou féministes ainsi que des épisodes protestataires comme Occupy et les Printemps arabes ont-ils informé la genèse et le développement des mouvements « Black Lives Matter », et si oui comment ? Réciproquement, quelle est la contribution des mouvements « Black Lives Matter » aux reconfigurations contemporaines de la contestation ?
Les militantes qui ont promu le slogan puis le mouvement « Black Lives Matter » ont d’ailleurs insisté sur son caractère nécessairement intersectionnel. Qu’en a-t-il été ? Les mouvements sont-ils parvenus à articuler politiquement les oppressions multiples, et si oui comment ? Les logiques de convergence/divergence se posent également entre les mouvements « Black Lives Matter » et les groupes et organisations politiques préexistantes, en particulier celles portant spécifiquement la cause de l’antiracisme.
Les divergences d’objectif et de répertoire d’action ont pu générer des tensions : les mouvements Black Lives Matter doivent-ils viser le renversement de l’ordre social raciste, ou plutôt des formes de réconciliation ou de réparation ? Quelles conceptions de la justice co-existent, plus ou moins aisément, au sein des mobilisations antiracistes ? Faut-il accréditer l’hypothèse d’une division entre des primo-manifestant-e-s dont l’action reposerait sur un fondement expérientiel et pour qui les réseaux sociaux numériques constitueraient une arène privilégiée, par rapport des militant-e-s plus expérimenté-e-s conduits par des convictions idéologiques et davantage porté-e-s sur le rassemblement public ? Quelles sont d’ailleurs les trajectoires des militant-e-s, manifestant-e-s ou simples sympathisant-e-s qui ont participé aux mobilisations antiracistes de ces dernières années ? Quels effets transformateurs la participation à ces luttes a-t-elle eu sur ces personnes, y compris sous la forme négative du cyberharcèlement et de sorties des espaces de lutte ? Les « community organizers » ont joué un rôle spécifique dans le développement des mobilisations antiracistes et si oui lequel ? Si oui toujours, peut-on trouver des intermédiaires comparables dans les autres aires géographiques ?
Corps, vécu, expérience
Le mot d’ordre « Black Lives Matter » met en évidence l’impact du racisme et du suprémacisme blanc sur les corps et les vies noires. Ce slogan puissamment incarné gagne à être examiné à plusieurs titres, depuis les modalités électroniques de sa diffusion (faut-il parler de « Black Lives Matter » ou de « #BlackLivesMatter ») jusqu’à ses déclinaisons au sein des mouvements antiracistes, voire à ses négations et parodies violentes par les tenant-e-s du suprémacisme blanc.
Ce slogan s’inscrit aussi dans une tradition littéraire noire marquée par l’héritage d’une littérature abolitionniste dépeignant les souffrances des esclaves et par celui d’autrices féministes noires soulignant la centralité du vécu expérientiel, la nécessité de parler en son nom propre et l’éclairage cru apporté par un point de vue noir minoritaire sur la société blanche majoritaire. Le déploiement des mouvements « Black Lives Matter » dans la décennie qui suit la diffusion du slogan #BlackLivesMatter en 2013 est d’ailleurs concomitante d’une activité d’écriture et d’édition intense d’auteurs et autrices noires interrogeant la condition noire et les configurations contemporaines du racisme, à l’instar des ouvrages à succès de Ta-Nehisi Coates (Between the World and Me) et de Reni Eddo-Lodge (Why I’m No Longer Talking to White People about Race) qui articulent logique de témoignage et logique d’intervention.
Antiracisme et production artistique
Pour finir, les mobilisations antiracistes récentes ont constitué une inspiration puissante pour les productions artistiques qui interrogent l’héritage de la traite, de l’esclavage, du colonialisme et de la ségrégation depuis les arts plastiques, la littérature, le théâtre, le cinéma, la musique et le street art.
Le mouvement Black Lives Matter et les violences qui en sont à l’origine ont suscité des développements artistiques riches et variés qui ont en retour apporté vigueur et cohésion au mouvement, à l’instar de « Alright » de Kendrick Lamar, morceau qui thématise les violences policières racistes et dont le refrain « We gon’ be alright » est devenu l’un des hymnes des manifestations antiracistes du printemps 2020. Autres exemples, la poétesse Claudia Rankine ou l’écrivaine Jesmyn Ward créent des œuvres en miroir du mouvement, alors que les graffeurs sur les murs des villes honorent dans leurs peintures murales les morts sous les coups des policiers.
Modalités de soumission
Les propositions de communication, en anglais, doivent être adressées à montpellierblmconference@gmail.com pour le 1er juin 2023. Elles doivent comprendre :
• un résumé de 500 mots maximum assorti d’une bibliographie
• une présentation rapide de l’auteur/autrice
Le Comité scientifique examinera l’ensemble des résumés reçus à la date limite indiquée. Les résumés feront l’objet d’une double relecture à l’aveugle. Un retour sera fait aux auteurs et autrices concernant l’acceptation ou non de leur proposition de communication.
Call for papers International conference
Black Lives Matter: Political and artistic mobilization against systemic racism in the US and the UK
Université Paul Valéry Montpellier 3, Montpellier, France 16 and 17 May 2024
Within the context of the Black Lives Matter movements in the United States and the United Kingdom in the 2010s and 2020s, this conference will examine antiracist mobilizations and their historical continuities, their transatlantic circulations, their political resonance, as well as the many responses they have elicited, particularly in the arts.
We welcome papers from a broad disciplinary field, especially from African American studies, history, sociology, geography, political science, philosophy, anthropology, literature, linguistics, music, film, photography, fine arts, media studies (etc.). The focus on English-speaking countries does not exclude comparisons with or reference to other geographical areas.
Historical continuities, geographical circulations
Far from being an isolated movement, Black Lives Matter is part and parcel of the history of African American radicalism. Which temporalities should best define it? Should it be conceptualized in terms of “waves”, like the history of feminism? Or in terms of generations, with the Civil Rights Movement as its reference? In the UK context, how did the Black Lives movement connect with earlier decolonial as well as black liberation struggles?
How, too, is one to conceptualize the global—national, local, continental—variations of the movement: should one think of them as translations, declensions, appropriations, hybridizations? What has been the geographical circulation of BLM’s slogans, tactics and activists?
Space, sites of memory, institutions
Antiracist mobilizations have brought to the fore the power relations that structure public space, both through temporary demonstrations, gatherings and protests and through longer occupations, all of which question and challenge the control exercised by the police over black bodies, in the wake of George Floyd’s murder by a white policeman kneeling on his neck for nine minutes.
In the US and in the UK the toppling or removing of statues that celebrate slavery (e.g. the statues of Edward Colston in Bristol and of General Lee in Richmond, VA) show that public space is the site of contested memories. Institutional responses have been diverse, due to the
antagonisms within the different, national, regional, local, levels of political institutions. Public response has ranged from repression and preemptive action to forms of support and institutionalization.
Building a movement
Have recent environmentalist, feminist (#metoo), anti-capitalist (Occupy), revolutionary (Arab springs) protest movements informed the genesis and the development of the BLM movements? If so, in what ways? Conversely, is BLM changing contemporary protest movements?
The founders of BLM insisted on its intersectionality: how intersectional has BLM been? has the movement contributed to bringing together the struggles against multiple oppressions? This logic of convergence/divergence is also at play between BLM and existing political organizations of the left.
Tensions may exist due to activists seeking different objectives: should BLM seek to topple a racist social order, or lead to reconciliation or/and reparation? What conceptions of justice co-exist within antiracist mobilizations? Should credence be given to the notion of a generational divide between younger protesters organizing and mobilizing primarily on the social networks, and older, more ideologically-minded activists pushing more traditional forms of public protest? What have been the individual and collective trajectories of the activists and protesters of the movement? What impact has participation in the movement had on their lives, especially with cyberbullying rife on social networks? Have community organizer-like figures played a role in the development of antiracist mobilizations in countries other than the US?
The body and lived experience
The slogan BLM foregrounds the impact of racism and white supremacy on black lives and bodies. The itself requires examination, as do its electronic and non-electronic variations — Black Lives Matter or #BlackLivesMatter? — in antiracist protests and even white supremacists’ violent parodies and negations.
The slogan speaks to a long tradition in African American literature, from the slave narratives and their emphasis on the physical sufferings of black people to the black feminist writings putting to the fore lived experience, speaking in one’s voice, reversing the gaze, and revising history. The decade following 2013 saw a flowering of editorial interventions and essays, such as Ta-Nehisi Coates’ (Between the World and Me) and Reni Eddo-Lodge’s (Why I’m No Longer Talking to White People about Race). The double articulation of these works as testimony and as political intervention needs to be probed.
Antiracism and artistic production
Finally, recent antiracist mobilizations have been a powerful inspiration for artistic productions that interrogate the legacy of the slave trade, slavery, colonialism, and segregation, in a wide range of fields in the graphic arts, literature, drama, cinema, and music and street art. In powerful echoes between antiracist protest and artistic production, Kendrick Lamar’s “Alright” became the hymn of the antiracist protests of Spring 2020, while poetess Claudia Rankine or writer Jesmyn Ward create works that mirror the movement, and graffiti artists honor the dead at the hands of the police in their ephemeral murals.
How to submit?
Submissions should be sent to montpellierblmconference@gmail.com by the 1st of June 2023. They should include
• a 500-word abstract and a bibliography
• a short presentation of the author
The Advisory Board will consider all abstracts received by the published deadline to ensure that the proposed submission is relevant to the conference. The abstracts will be double-blind peer reviewed by members of the Advisory Board. Abstract selection notifications and feedback will be sent out to relevant authors.
Advisory Board
• Hélène Charlery, Senior Lecturer in American Studies, Université Toulouse Jean-Jaurès, CAS
• Claude Chastagner, Professor of American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Elodie Edwards-Grossi, Senior Lecturer in American Studies and Sociology, Université Paris Dauphine, IRISSO
• Olivier Estèves, Professor of British Studies, Université de Lille, CERAPS
• Carline Encarnacion, Senior Lecturer in American Literature, Université Toulouse Jean-Jaurès, CAS
• Vincent Latour, Professor of British Studies, Université Toulouse Jean-Jaurès, CAS Hélène Le Dantec-Lowry, Professor of American Studies, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, CREW
• Monica Michlin, Professor of American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Claudine Raynaud, Professor of African American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Jean-Paul Rocchi, Professor of American Literature and Culture, Université Gustave Eiffel, CFR / LISAA
• Michaël Roy, Senior Lecturer in American Studies, Université Paris Nanterre, CREA
Organising Committee
• Lawrence Aje, Senior Lecturer in American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Claude Chastagner, Professor of American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Anne Crémieux, Professor of American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Marianne Drugeon, Senior Lecturer in British Literature, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Manon Lefebvre, Lecturer in American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Marc Lenormand, Senior Lecturer in British Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Hervé Mayer, Senior Lecturer in American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Monica Michlin, Professor of American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Niaz Pernon, Lecturer in British Studies, Ecole nationale supérieure de chimie de Montpellier et docteure en civilisation britannique, EMMA
• Claudine Raynaud, Professor of African American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Raphaël Ricaud, Senior Lecturer in American Studies, Université Paul-Valéry Montpellier 3, EMMA
• Url de référence :
https://ufr2.www.univ-montp3.fr/fr/recherche/unités-de-recherche/l’équipe-emma-études-montpelliéraines-du-monde
• Adresse :
université Paul-Valéry, Montpellier, France
Source: Raphaël RICAUD