Liste des ateliers

Liste des ateliers pour le Congrès 2014 (doc word)

Les propositions sont à envoyer avant le 20 Décembre 2013.

1. Récits et/en/de poésie. – Narratives And/Of/In Poetry

Vincent Broqua, UPEC et Christophe Lamiot Enos

A ne même considérer que la période définie depuis l’avènement de la modernité littéraire, intervenant vers la fin du XIXème siècle aux Etats-Unis d’Amérique, poèmes et récits ne se construisent ni ne se développent sans emprunts réciproques ou étroites relations.
Feuilles d’herbe de W. Whitman propose ainsi un ensemble de textes lyriques se lisant aussi comme une histoire, avec des personnages particuliers, et les divers fils et intrigues qui les nouent. Du point de vue de la narratologie, l’histoire sous-jacente au volume de Whitman s’organise au moins suivant l’extension de la sympathie ou de l’enthousiasme du poète—soit, en d’autres termes, une certaine aventure sur les limites du genre lyrique. Au commencement du XXème siècle, comment apprécier pleinement les formes brèves d’une G. Stein, sans un passage par la prose de La Fabrique des Américains (1925)? Des œuvres devenues canoniques, telles La Terre Vaine de T.S. Eliot et Paterson de W.C. Williams passent par un recours fort à des structures narratives. La poésie dite d’inspiration confessionnelle contient ses principales visées narratives à même ce qui la nomme. L’attention portée au repérage dans le temps et dans l’espace, dans les travaux des Objectivistes, font bien souvent de ceux-ci des objets d’étude privilégiés pour qui s’intéresse aux témoignages d’une époque. Les poètes language aiment à présenter leurs travaux comme opérant la subversion de discours dominants, des points de vue culturel et économique—de tels discours correspondant eux-mêmes à des récits spécifiques avec leurs techniques propres.
Plus près de nous chronologiquement, les deux catégories de la prose et du vers tendent à se mêler jusques à se confondre, dans la poésie conceptuelle (cf. I’ll Drown My Book, Conceptual Writing by Women, ed. C Bergvall, L. Browne, T. Carmody et V. Place, 2012) et la notion d’hybridité (telle que proposée par C. Swensen, American Hybrid: A Norton Anthology of New Poetry, 2009, éditée avec David St. John). La recherche continuée chez A. Notley d’une « épopée féminine » rappelle s’il en était besoin que le recours au récit, en poésie, n’a rien de neuf. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère ne sont-elles pas écrites en vers ? Comme le soulignent de plus en plus les récentes traductions du bestseller d’entre les bestsellers de tous les temps, soit la Bible, celle-ci est aussi un poème—en entier, sans parler du « Chant des Chants » bien sûr, plus traditionnellement considéré comme appartenant directement à la poésie.
En parallèle et sous la perspective de la théorie et de la critique littéraires, le récit a commencé à recevoir ses lettres de noblesse au XXème siècle avec S. Freud et les développements de la psychanalyse, par exemple. Dans le domaine de la critique, T. Todorov a été le premier à proposer la « narratologie » comme concept (1969) et R. Barthes, G. Genette et A. Greimas parmi d’autres ont évoqué avec la « narrativité », un phénomène translinguistique allant au-delà des distinctions entre les genres. Outre les définitions réciproques de « récit » et de « narrativité », les sémioticiens proposent aussi la recherche et l’établissement de « narrèmes » ou constituants minimaux des récits. Ils posent les notions de « syntaxe narrative » et de « macrostructure » comme outils potentiels pour des avancées plus conséquentes dans le domaine de la narratologie.
« Récits et/en/de poésie » se propose d’examiner en quelle mesure telle ou telle œuvre spécifique de la modernité poétique en anglais des Etats-Unis d’Amérique mêle, concurrence, joue de, se rapporte à, subvertit ou prolonge des récits bien reconnaissables—quelle que soit la tradition à laquelle ceux-ci appartiennent. Etablir un lien entre poème(s) et récit(s) porte la promesse de jeter un regard renouvelé sur les interactions entre modèles et contre-modèles quant au récit en prose ou en vers—ou bien faut-il mieux dire «quant au récit en vers ou en prose » ?

Narratives And/Of/In Poetry
Vincent Broqua, UPEC et Christophe Lamiot Enos, Université de Rouen

Since the inception of modernity, dated as back as in the late XIXth century in the United States of America, poems and narratives in English from the USA have developed and evolved in tight relationships.
W. Whitman’s Leaves of Grass proposes a series of lyrical pieces that reads like a story with its various characters and threads or plots. From the perspective of narratology, the underlying story in Whitman’s seminal work is the poet’s seemingly all-encompassing sympathy or enthusiasm for his world—in other words, the extents of lyricism. Beginning of XXth century, G. Stein’s verse can scarcely be appreciated without also evoking her very extensive work in prose form, best exemplified by The Making of Americans. Cornerstone pieces such as T.S. Eliot’s The Waste Land and W.C. Williams’s Paterson rely on strong storylines. Today, the two categories of prose and verse tend to merge in conceptual poetry (L. Browne) and the notion of hybridity (as propounded by C. Swensen). A. Notley’s ongoing pursuit of a truly feminine epic reminds us that resorting to narrative in poetry is nothing new: indeed, Homer’s Iliad and Odyssey are written in verse. As more and more stressed by recent translations, the bestseller of all bestsellers which is the Bible, as partly authored by Moses, is also a poem—in its entirety, not to mention its “Song of Solomon” part traditionally identified as poetry.
Paralleling such a sketchily evoked tradition and from the perspective of literary theory and criticism, narratives claimed a paramount importance with S. Freud and subsequent varieties of psychoanalysis. In the field of literary analysis, T. Todorov was the first to propose “narratology” as both concept and practice (1969) and R. Barthes, G. Genette and A. Greimas among others would discuss “narrativity” as translinguistic and not specific to any particular genre. Besides distinguishing between “narrative” and “narrativity,” semioticians propose to look for “narremes” or minimal constituents of a narrative and “posit narrative syntax” and “macrostructure” as other forensic tools for further research in the field of narratology.
“Narratives And/In/Of Poetry” proposes to examine to what extent specific works from the modern United States of America, in English, mix, compete, or play with/relate to, subvert or continue widely acknowledged narratives—from whatever tradition these may be. Establishing and commenting upon clear relationships between narratives and poetry may well bring a renewed insight into the interplay of models and counter models, as far as narratives in poetry and prose go—or is it “narratives in prose and poetry?”

Les propositions sont à envoyer à Christophe Lamiot Enos et Vincent Broqua avant le 20 décembre 2013

2. Our American Cousins: Revaluing Models in American Theatre and Performance – Our American Cousins: Revaluing Models in American Theatre and Performance

Xavier Lemoine (Marne-la-Vallée)
Marie Pecorari (Paris-Sorbonne)

L’historiographie théâtrale a longtemps accrédité l’hypothèse d’une invention de l’écriture dramatique américaine au début du 20e siècle, à la suite d’une émancipation brutale vis-à-vis des modèles européens. Avec Eugene O’Neill en père fondateur, elle serait tardivement parvenue à exprimer une identité et un idiome vernaculaires.
L’objectif de cet atelier consistera à réévaluer et à bousculer ce paradigme à la lumière des évolutions critiques récentes, ainsi qu’à interroger les processus de constitution du répertoire.
Parmi les exemples de sujets possibles, dont la liste n’est pas limitative:
-la mise en question des formes et approches donnant la primauté au drame
-la formation et/ou l’inclusion de modèles antagonistes et l’évolution de leur fortune critique (le drame et la performance d’avant le 20e siècle, les écritures dramatiques expérimentales d’après-guerre, les théâtres des minorités, la performance)
-la dissolution des modèles (la table rase de l’avant-garde d’après-guerre, le réexamen des frontières disciplinaires de la pratique et de la théorie, la production de formes américaines de théâtre dans un contexte mondialisé et multiculturel)
-le retour aux modèles (la (ré)incorporation du drame dans le “théâtre d’images”, les reprises de performances, le théâtre américain comme modèle imité au-delà des frontières)

Les propositions sont à envoyer avant le 20 décembre 2013 à Xavier Lemoine (Marne-la-Vallée ) et Marie Pecorari (Paris-Sorbonne)

Our American Cousins: Revaluing Models in American Theatre and Performance

Theatrical historiography has long relied on the narrative that American drama was invented in the early 20th century, when it finally wrenched itself from European models. With Eugene O’Neill as a founding father figure, it belatedly found ways to convey its vernacular identity and idiom.
The aim of the workshop is to reappraise and challenge this paradigm in the light of recent scholarly developments and to interrogate canon-building processes.
Possible topics include, but are not limited to:
-questioning drama-centric forms of and approaches to theatre
-the formation and/or inclusion of antagonistic models and their changing critical fortune (pre-20th century drama and performance, post-war experimental drama, minority theatre, performance)
-the dissolution of models (the tabula rasa approach of the post-war avant-garde, rethinking disciplinary boundaries in practice and theory, producing American brands of theatre in a global, multicultural context)
-.the return to models (the (re)incorporation of drama in the “theatre of images”, performance art reenactments, American theatre as a model emulated beyond the borders)

3. Modèles et contre-modèles de l’autobiographie américaine des XIXe et XXe siècles – Models and counter-models in 19th and 20th century American Autobiography

Ada Savin , UVSQ, Sandrine Ferré-Rode(UVSQ)

L’historiographie théâtrale a longtemps accrédité l’hypothèse d’une invention de l’écriture dramatique américaine au début du 20e siècle, à la suite d’une émancipation brutale vis-à-vis des modèles européens. Avec Eugene O’Neill en père fondateur, elle serait tardivement parvenue à exprimer une identité et un idiome vernaculaires.
L’objectif de cet atelier consistera à réévaluer et à bousculer ce paradigme à la lumière des évolutions critiques récentes, ainsi qu’à interroger les processus de constitution du répertoire.
Parmi les exemples de sujets possibles, dont la liste n’est pas limitative:
-la mise en question des formes et approches donnant la primauté au drame
-la formation et/ou l’inclusion de modèles antagonistes et l’évolution de leur fortune critique (le drame et la performance d’avant le 20e siècle, les écritures dramatiques expérimentales d’après-guerre, les théâtres des minorités, la performance)
-la dissolution des modèles (la table rase de l’avant-garde d’après-guerre, le réexamen des frontières disciplinaires de la pratique et de la théorie, la production de formes américaines de théâtre dans un contexte mondialisé et multiculturel)
-le retour aux modèles (la (ré)incorporation du drame dans le “théâtre d’images”, les reprises de performances, le théâtre américain comme modèle imité au-delà des frontières)

Les propositions sont à envoyer avant le 20 décembre 2013 à Xavier Lemoine (Marne-la-Vallée) et Marie Pecorari (Paris-Sorbonne)

“Autobiographies have been written in almost every part of the country by presidents and thieves, judges and professors, Indians and immigrants (of nearly every nationality), by ex-slaves and slave owners, by men and women in practically every line of work, abolitionists to zookeepers, by adolescents and octogenarians, counterfeiters, captives, muggers, muckrakers, preachers, and everybody else. The catalogue is as great as one of Walt Whitman’s own… or greater. It is the true Song of Myself. And Ourselves.”
A partir d’une réflexion suscitée par cette citation tirée d’un article pionnier de Robert F. Sayre qui souligne l’ampleur et la variété du phénomène autobiographique américain, cet atelier se propose de mettre en relation les modèles euro-américains de l’écriture autobiographique et les contre-modèles qui ont pu émerger en Amérique du Nord. Si l’on peut considérer que le récit de vie proprement ancré en terre américaine commence par le récit de captivité de Mary Rowlandson, publié en 1682, c’est bien l’autobiographie de Benjamin Franklin qui établit le modèle de la « success story » à l’américaine, modèle maintes fois imité mais aussi largement remis en cause.
Le genre autobiographique tel qu’il s’élabore au XIXe siècle présente de multiples innovations par rapport aux modèles et aux contre-modèles existants. Bien que l’on ne puisse les considérer comme des autobiographies à proprement parler, Walden de Thoreau, Song of Myself et Specimen Days de Whitman relèvent du genre autobiographique à travers l’utilisation que font leurs auteurs de leur expérience personnelle du continent américain dans toute sa diversité géographique, historique et humaine. Par la remise en cause de l’exemplarité de l’autobiographie américaine, les auteurs du XIXe siècle de récits de captivité, de récits d’esclave ou de récits amérindiens interrogent eux aussi jusqu’aux fondements du modèle autobiographique, ne serait-ce qu’en permettant l’émergence d’un dialogue entre les marges et le « centre » de la société américaine. N’a-t-on pas dit de la Déclaration d’Indépendance américaine, rédigée de surcroît par trois autobiographes (Thomas Jefferson, Benjamin Franklin et John Adams), qu’elle s’apparentait à un récit d’esclave dans lequel le peuple américain se libérait de son oppresseur comme l’esclave se libère de son maître ? Colons en captivité, esclaves en fuite et Amérindiens : ces voix de « l’Autre », qui émanent de la périphérie, permettent non seulement d’américaniser le récit de vie, mais aussi de renouveler le genre par l’écriture de récits collaboratifs ou la confrontation avec d’autres genres (on pense notamment au genre mélodramatique qui s’immisce dans le récit d’esclave d’Harriet Jacobs, Incidents in the Life of a Slave Girl, ou au picaresque et au travestissement –entendu au sens propre comme au sens figuré, c’est-à-dire racial du terme– dans le récit d’Ellen et William Craft, Running a Thousand Miles for Freedom).
Au cours des années soixante, le phénomène de la contre-culture apporte son lot de modèles alternatifs tels les neo-slave narratives (Octavia Butler, Margaret Walker) et les autobiographies « ethniques » (Maxine Hong Kingston, Richard Rodriguez) qui remettent en cause les modèles existants. L’autobiographie américaine, dans ses avatars les plus récents, que ce soit sous forme imprimée ou électronique, prend ses distances avec les modèles établis pour s’intéresser par exemple plus spécifiquement au corps et à ses handicaps (Lucy Grealy) ou bien par le recours à la photographie pour accompagner les textes (Eudora Welty, Scott Momaday).
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Vos propositions liées à cette problématique sont les bienvenues (400 mots). Adressez-les à Ada Savin et à Sandrine Ferré-Rode avec une brève notice bio-bibliographique avant le 20 décembre 2013.

Models and counter-models in 19th and 20th century American Autobiography
“Autobiographies have been written in almost every part of the country by presidents and thieves, judges and professors, Indians and immigrants (of nearly every nationality), by ex-slaves and slave owners, by men and women in practically every line of work, abolitionists to zookeepers, by adolescents and octogenarians, counterfeiters, captives, muggers, muckrakers, preachers, and everybody else. The catalogue is as great as one of Walt Whitman’s own… or greater. It is the true Song of Myself. And Ourselves.
Taking as a starting point renowned scholar Robert Sayre’s remark on the bewildering number of American autobiographies and their variety, this workshop will question the relationship between Euro-American autobiographical models and the counter-models that have sprung and evolved in North America. If life writing firmly anchored on American soil began with the Narrative of the Captivity and Restoration of Mrs Mary Rowlandson (1682), it was Franklin’s Autobiography that set the pattern for the American success story, a model that was to be widely followed but also largely contested.
The 19th-century autobiographical scene offers innovative variations on the model as well as counter-models of the genre. If not autobiographies as such, Thoreau’s Walden, Whitman’s Song of Myself and Specimen Days are clearly autobiographical in their use of the author’s personal experience of the continent’s geography, history and human variety. Calling into question the exemplarity of American autobiography, 19th-century authors of captivity narratives, slave narratives and Indian narratives alter the model fundamentally, even as they implicitly engage in a dialogue with their mainstream predecessors. The Declaration of Independence, written by three autobiographers – Jefferson, Adams and Franklin – has even been considered a variant of the slave narrative in which the American people seeks freedom from their Master. Writing from the margins of American society, captives, fugitive slaves and Indians Americanize life writing by inaugurating collaborative writing or mixing genres (the melodramatic in Harriet Jacobs’s Incidents in the Life of a Slave Girl; the picaresque and “passing” in William and Ellen Craft’s Running a Thousand Miles for Freedom).
The 1960s counterculture produced alternative models of life writing, such as neo-slave narratives (Octavia Butler, Margaret Walker) or ethnic autobiographies (Maxine Hong Kingston, Richard Rodriguez) further extend the boundaries of the genre, calling into question existing models. Recent American autobiography, whether in print or in digital form, tends to depart from previous models and counter-models in its focus on the body and its disabilities (Lucy Grealy) or in the use of photographs that accompany the text (Eudora Welty, Scott Momaday).
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We welcome proposals (400-words) around these topics and authors (the list is by no means exclusive). Please address them with a short bio-bibliographical presentation to Ada Savin and Sandrine Ferré-Rode before December 20, 2013.

4. La langue modèle de la république des lettres (1828-1919) – Linguistic models for the Republic of Letters (1828-1919)
Michel Imbert, Université Paris Diderot-Paris 7
De la parution du dictionnaire de Noah Webster qui institue une langue nationale à partir de l’anglais standard (1828) à la somme de H.L Mencken qui recense les américanismes (1919), la question du modèle linguistique de la jeune nation n’a cessé d’obséder les esprits. Comment constituer la langue commune de la première démocratie moderne qui ambitionne de servir d’exemple universel sans s’enfermer à nouveau dans un purisme sclérosant qui ferait fi de la diversité intrinsèque des formes dialectales et plus largement encore, des systèmes foisonnants de signes visuels ou musicaux, non verbaux, en marge de la langue parlée ou écrite? Dès 1836, dans Nature, Emerson enjoint les lettrés non seulement de ne plus se conformer aux modèles européens mais de décaper la gangue de la langue. La création poétique doit demeurer un processus dynamique à rebours des formes figées. Tout en prétendant jouer un rôle clé sur la scène publique, les transcendantalistes pensent que la langue évolue et s’efface comme une formation éphémère. Or, l’état transitoire du langage lui interdit par nature de devenir la pierre angulaire de l’état-nation à édifier. Qui plus est, l’efflorescence des lettres en Amérique à partir des années 1840 s’enracine dans le non-dit inarticulé de la langue officielle. Comment traduire la langue originelle du cœur, celle des femmes ou des enfants assujettis à la lettre de la loi (The Scarlet Letter) ? Comment redonner la parole aux travailleurs de la mer, comment restituer la vox populi déformée par ses représentants tyranniques (Moby-Dick) ? Comment transcrire le cri barbare (« the barbaric yawp ») des peaux-rouges ou des foules sauvages au nom des laissés-pour-compte du modèle unique ? La recherche d’un modèle alternatif de langue républicaine s’avère difficile dès lors que le mythe d’une langue fédératrice menace de voler en éclats. Or, ces troubles du langage ont insufflé un nouvel élan aux lettres d’Amérique qui, du même coup, sont tentées d’ériger en contre-modèle le dérèglement de la phraséologie consacrée par l’usage. Changement de paradigme : au lieu d’épurer le pot pourri de la tribu suivant l’injonction d’Emerson (« wise men pierce the rotten diction »), la littérature s’emploie désormais à disloquer l’idiome du village global. Après la guerre de Sécession, le roman se mue en chambre d’échos où résonne la cacophonie d’une nation qui ne parle décidément plus la même langue tant elle se subdivise en une multitude de sociolectes. Les romanciers réalistes (Howells, Crane, Norris, London) prennent acte de la segmentation du corps politique en fonction des classes, des races, des sexes et des générations. Le dialecte des sous-prolétaires dans Maggie, l’argot de la Frontière dans Mc Teague ou Roughing It, le Pidgin English de Jim dans Adventures of Huckleberry Finn sont autant d’irrégularités dans la trame supposée homogène de l’Anglais américain qui ne peut plus contenir les harmoniques idiomatiques qui le parasitent et qui percent sous la langue dominante en passe de devenir langue universelle. « Why, Huck, doan’ de French people talk de same way we does ? » dément de façon éloquente l’illusion d’une seule et même langue en partage sur l’ensemble du territoire national et promise de surcroît à devenir la nouvelle lingua franca du cosmopolitisme planétaire. Le rêve de se couler dans le même moule se dissipe à mesure que l’Amérique se déclare multilingue. Par le truchement de ses écrivains, l’Amérique du Melting Pot se découvre irréversiblement multiculturelle et plurilingue et la république des lettres, loin de canoniser une pléiade d’écrivains phares, amplifie le bruit de fond de l’autre Amérique, celle des minorités tenues en lisière. En définitive, la littérature aura donné lieu à ces confrontations inédites entre des modes d’expression disparates, infiniment modulés; elle aura simulé et modélisé à la manière d’un jeu de guerre, un conflit de codes désaccordés.
L’objectif de cet atelier sera de s’interroger sur l’évolution d’un modèle linguistique invariablement modifié tout au long du XIXe siècle à travers quelques spécimens d’écrits envisagés simultanément sous l’angle poétique et politique.
Vos propositions de communication sont à adresser à
Michel Imbert (Université Paris Diderot, Paris7) avant le 20 décembre 2013.

Linguistic models for the Republic of Letters (1828-1919)
From the publication in 1828 of Noah Webster’s Dictionary that instituted a common national idiom that departed from Standard English to H.L.Mencken’s tentative thesaurus of americanisms(1919), the question of elaborating a specific linguistic model for the rising nation has always been a haunting issue. How could the leading democracy that claimed to usher in a new political era and to set an example for the whole world constitute a common language that was allegedly a purer brand of English even as it broke with the King’s English and incorporated varieties of regional dialects? How could men of letters devise a linguistic model without obliterating traces of oral speech for the sake of purism and, more largely, without blotting out the teeming diversity of non-verbal, visual and musical signs that lurked on the fringe? As early as 1836, in Nature, Emerson urged American « scholars » not only to stop conforming themselves to European models but to cleanse « rotten diction » by regenerating the living Word. He extolled poetry as a dynamic process of creation at variance with frozen forms. While they claimed to play a prominent part on the public stage, Transcendentalists assumed that language was bound to evolve and vanish like all transient configurations and that it could not serve as the immovable corner-stone of democracy on account of its mutability. By nature, the state of language precluded its political use by the State. Besides, the blossoming of Letters in the 1840s stemmed from the endeavor to express what remained unsaid in ideological phraseologies of all ilk. How could you spell out the aboriginal language of the heart, that of women and children subjected to the letter of the law (The Scarlet Letter)? How could you serve as a spokesman for inarticulate laborers like the seamen and thus be attuned to the voice of the People (vox populi) without distorting it like its tyrannical representatives(Moby-Dick)? How could you transcribe « the barbaric yawp » of Redskins or Red mobs in the name of outcasts? The search for an adequate alternative linguistic model was increasingly challenged as the myth of a common idiom threatened to break into pieces. But such speech difficulties have, paradoxically enough, instilled a new spirit to American letters that have sought to turn linguistic disorder and the disruption of the common usage into a counter-model of sorts. A radical change took place in terms of paradigm: instead of attempting to purify native speech in keeping with Emerson’s injunction (« wise men pierce the rotten diction »), American literature seemed intent on disarticulating the mother tongue by recording outlandish varieties of vernacular. After the Civil War, the novel turned into an echo chamber that resonated with the hubbub of a disunited nation that definitely did not speak the same language anymore: instead, it transcribed the multifarious shades of popular speech. Realistic novelists (Howells, Crane, Norris, London) registered the segmentation of the body politic into sub-sections according to categories such as class, race, gender and generations. The slang of the urban underworld in Maggie, Frontier dialect in Mc Teague or Roughing it, Jim’s Pidgin English in Adventures of Huckleberry Finn are so many irregularities in the supposedly homogenous fabric of American English that could hardly contain the eerie harmonics of idiomatic speech that pierced through American English even as it passed for a universal language. « Why, Huck, doan’ de French people talk de same way we does ? » speaks for itself as it belies the illusion of sharing a common tongue not only across the national territory but more largely all over the world. Linguistic unity would not cement the Melting Pot and the United States proclaimed themselves utterly multilingual. Through the intermediary of its writers, the nation of immigrants had become an outspoken advocate of multiculturalism and the republic of letters, far from enshrining a few canonical writings, relayed and amplified the clamor of the other America, that of minorities in the margins. All in all American literature, instead of promoting a single model, has collected and confronted differing modes of expression, an infinite array of modulations. It has contrived a small-scale war game by simulating the conflict of discordant codes. The purpose of this workshop is to reflect on the transformation of a linguistic model throughout the XIXth century by observing a few specimens of writings from a literary and political standpoint.
Send your proposals to Michel Imbert by December 20

5. Fin(s) du livre ? – The End(s) of the Book?
Gwen Le Cor et Stéphane Vanderhaeghe – Université Paris 8

« A book is never ‘self-identical.’ A book doesn’t close on itself as a static, inert artifact between boards or covers. » Prenant appui sur ces propos que Johanna Drucker tire d’une réflexion de Jerome McGann, cet atelier vise à interroger la façon dont le livre, en tant que support et média, dans sa matérialité même — et ce, qu’il l’abolisse dans la linéarité du texte ou l’exhibe au contraire dans sa spatialisation —, modélise ou modalise des expériences et des parcours de lecture. Ce faisant, on pourra se demander s’il existe un modèle (pattern) du livre ou si les livres, en un sens étendu pouvant aller jusqu’à comprendre aussi bien le livre d’artiste que le livre numérique, les hypertextes ou plus largement la littérature électronique, ne sont pas toujours en quête des modèles — formels et dynamiques — auxquels ils s’efforcent, dans un même mouvement, de résister.
On pourra à cet égard questionner l’impact et l’influence réciproques qu’ont pu exercer l’un sur les autres, livre et nouveaux médias. Il s’agit donc autant de s’interroger sur des modèles de lecture tels que le codex, dans la linéarité qu’il est supposé incarner, a pu et continue de les vectoriser, que sur la remise en question des « lectures modèles » qui, sous-tendues par une approche linéaire, prennent un parti résolument interprétatif et herméneutique pour s’opérer en fonction et en vertu de cette orientation vectorisée à l’intérieur du livre, dans le but d’y débusquer un sens qu’elles postulent, ce faisant, en fin de parcours, et qui, en retour, justifie tant leur existence que leur pratique critique ; car dans les termes de Michel Serres, « qu’il n’y ait rien à lire, au bout de toute lecture, qui le supportera ? » Or, la dynamique de la « manipulation » à l’?uvre dans la matérialité même de l’objet-livre, d’une part, ou les reconfigurations textuelles générées par la littérature numérique, d’autre part, semble contrevenir à de tels « modèles » en posant d’emblée l’éphémère du ou d’un sens, voire son épuisement dans des pratiques résolument performatives (on peut citer entre autres exemples Skin de Shelley Jackson ou des auteurs comme Stephanie Strickland ou Judd Morrissey…).
Comme le souligne encore Jean-Luc Nancy dans Au fond des images : « Le texte, c’est textile, c’est de l’étoffe de sens. Mais le sens en tant que tel n’a pas d’étoffe, pas de fibres ni de consistance, pas de grain ni d’épaisseur. » Comment dès lors le livre, et plus généralement les matières textuelles dans leurs diverses modalités (objet-livre, « livre » numérique…), si tant est que leur effet est de produire une écriture textile qui interroge en retour le tissage et le tressage de/du sens, permettent-ils d’articuler la pensée d’une écriture textile et celle de l’immatériel du sens ? Quel(s) (contre-)modèle(s) s’abî/yment ici ? Ceci reviendrait donc à penser, dans toute l’ambiguïté du terme, la ou les fin(s) du livre — quelle fin/finalité pour quel livre ?
On pourra en outre s’attacher à la manière dont le livre tresse l’hétérogène, en faisant entrer en résonance des modèles issus des arts plastiques, du cinéma, de la photographie, ou encore des sciences. Si on peut penser au livre d’artiste et si le roman contemporain, que l’on songe entre autres aux ?uvres de Mark Z. Danielewski, Jonathan Safran Foer ou Steve Tomasula, trouve une place de choix dans cette réflexion, on pourra tout autant retracer l’histoire de la littérature américaine pour voir que de telles forces sont peut-être déjà à l’?uvre en d’autres temps (on peut, là encore parmi d’autres, penser à Melville — des ruptures, bifurcations, digressions narratives de Moby Dick à la pratique cyclique, entre boucles et réitérations, d’un roman comme The Confidence-Man, etc. — ou aux expérimentations modernistes et post-modernistes qui substituent aux modèles linéaires des contre-modèles alliant, par exemple, pratiques de collages et juxtapositions de type cubiste venant délibérément brouiller le sens, par exemple chez Faulkner ou Coover, ou encore chez des poètes comme John Cage ou Susan Howe parmi tant d’autres…). Dans quelle mesure l’écriture n’est-elle pas alors toujours, et ce, jusque dans ses pratiques intertextuelles, un jeu de copier/coller, de recomposition permanente, et d’altération en profondeur des modèles qu’elle instaure ? Quelles modalités de lecture, quels « modes d’emploi » se plaisent à (dé)jouer les livres — en quel temps, à quelle époque ? Quels modèles mettent-ils en crise et ces modèles peuvent-ils se penser en dehors de leur mise en crise ?
En d’autres termes, cet atelier se propose d’interroger la tension qui, dans l’?uvre littéraire, s’instaure entre texte et support, entre ligne et plan, entre vecteur et espace, entre page et interface…

The End(s) of the Book?
Gwen Le Cor and Stéphane Vanderhaeghe — Université Paris 8

“A book is never ‘self-identical.’ A book doesn’t close on itself as a static, inert artifact between boards or covers.” Starting from a remark Johanna Drucker derives from Jerome McGann’s analysis, this workshop seeks to question how the book, both as object and medium, shapes and models reading experiences and reading paths in its very materiality, and this whether it abolishes materiality in the text’s linearity or brings it to light in its spatial dimension. We can thus wonder if there is such a thing as a pattern for the book or if books—in their multiplicity which encompasses artists’ books, digital books, hypertexts or more generally electronic literature—are not constantly seeking out models, be they formal or dynamic, which they simultaneously attempt to challenge.
This questioning can accordingly focus on the respective impacts and influences that books and new media can wield on one another. The aim of this workshop is thus both to probe reading models as defined and vectorized by the codex in the presumed linearity it embodies, and to see how model readings underpinned by such linear approaches come to be contested—readings fostered by interpretative and hermeneutic biases that postulate meaning along such linear vectors eventually to posit it at the end of the reading experience which thereby meets the legitimization of its moves and critical findings. For, as Michel Serres contends, “that there might be nothing to gain at the end of all reading, who could bear it?” Yet, the dynamics of handling and manipulation produced by the book-as-object in its very fabric on the one hand, and by the flickering textualities that digital literature generates on the other, seem to offset such models of “exemplary” readings by stressing the transient and flickering quality of meaning or of a meaning, not to say its exhaustion in performative works (among which the works of Stephanie Strickland or Judd Morrissey, to name but a few, along with Shelley Jackson’s Skin…).
As further stated by Jean-Luc Nancy: “Text is textile; it is the material of sense. But sense as such has no material, no fibers or consistency, no grain or thickness.” (The Ground of the Image) Given that the book’s central property, then, is to produce a textile writing which in turn questions the weaving and lacing of sense, how can the book, or more generally the very fabric of writing—be it physical or digital—articulate writing as textile with a sense that is deemed immaterial? What (counter)-model(s) can be found, or made to founder here? Ultimately, this entails a reflection of/on the end(s) of books, with all the shades of nuances thus implied: what end(s) for what book(s)?
It is also possible to focus on the way the book knits the heterogeneous by borrowing from models derived from the plastic arts, the cinema, photography, or even science. If artists’ books first come to mind, and if the place of the contemporary American novel seems prominent in this reflection, especially in the works of Mark Z. Danielewski, Jonathan Safran Foer or Steve Tomasula, one could also retrace the history of American literature to see that such forces may already come to play in previous periods. One might think, for instance and among others, of Melville—whether in the ruptures, bifurcations and narrative digressions of Moby Dick, or in the cyclical process of The Confidence Man perhaps exemplified by feedback loops and reiterations, etc. Other examples might include modernist and post-modernist experiments replacing linear models with counter-models playing with cubist-style juxtapositions and collages which deliberately blur meaning as in the works of Faulkner or Coover, or in poets like John Cage and Susan Howe among many others… To what extent, then, is writing not always a permanent game of cut and paste, notably, but not only, in its intertextual dimension, a game of radical alteration of the models it installs? What reading modes, and, in their material manipulations, what “reading manuals” do books appear to play out and outplay—in what moments of the book’s history? What are the models that they critically unsettle and can such models be thought of independently of the crisis that fosters them?
In other words, this workshop aims to question the tensions between text and medium, line and plane, vector and space, page and interface, which invest all literary works.
Les propositions sont à adresser à Gwen Le Cor et Stéphane Vanderhaeghe — Université Paris 8 avant le 20 décembre 2013.

6. Mimesis, mythe(s), modèle(s) dans la poésie et la fiction américaines (post)modernes – Mimesis, myth(s), model(s) in (post)modern American poetry and fiction

Richard Anker (Université Blaise Pascal – Clermont Ferrand 2)
et Clément Oudart
(Université Toulouse II – Le Mirail)

Si, au seuil de l’Occident, Platon veut bannir les poètes de la cité, c’est parce qu’ils sont des conteurs de mythes, des faiseurs de modèles imitables qui risquent d’éloigner les citoyens de la vérité. Le mythe, selon Platon, est un instrument d’identification, autrement dit un instrument mimétique. Nietzsche, cependant, nourrit le soupçon que Platon lui-même n’écrit pas autre chose que des « romans philosophiques » en s’appropriant le mythe en tant que fable mimétique du vrai. Le soupçon de Nietzsche procède en partie de sa connaissance des romantiques d’Iéna qui, eux, avaient rêvé d’un roman qui, s’il avait été achevé, aurait consisté en une répétition du platonisme, en ce qu’ils considéraient le roman comme la forme la mieux adaptée d’une prise en charge esthétique de l’Absolu, ou de la métaphysique telle que la philosophie l’avait transmise jusqu’à la crise ouverte par la Critique de Kant. D’où l’appel constant des romantiques à créer, à partir de l’Art et de la Littérature elle-même, un nouveau mythe, ou une nouvelle religion. Tout se passe donc comme si le mythe, relégué à la marge de l’Occident par la philosophie, avait fait retour dans la naissance même de la Littérature (comprise en tant que dépassement des belles lettres), ou en tant que naissance de la Littérature. Pourtant, puisque ce n’est pas seulement le mythe proscrit par Platon qui fait retour ainsi, mais aussi ce qu’il faudrait bien appeler le mythe « philosophique » lui-même, ou, si l’on préfère, l’onto-mimétologique de Platon, deux modalités du mythe se mêlent dans l’invention de la Littérature, deux modalités dont on voudrait tenter de démêler les répercussions dans l’après-romantisme.
L’objectif de cet atelier sera de s’interroger sur l’écriture moderne et postmoderne américaine en tant que répétition du modèle romantique, le mot « répétition » étant compris ici dans ses multiples acceptions : reprise, renversement, accomplissement, restauration, sublimation, dépassement, relève, Aufhebung, etc. Dans son traitement problématique de l’histoire et de la tradition, la modernité du modernisme poétique américain (chez Pound et H.D., en particulier) prendrait forme dans son exhumation de modèles archaïques, primitifs, ou encore, mythiques. Or il s’agit déjà de l’un des critères de la « modernité » intempestive du premier romantisme allemand, qui se préoccupait à l’origine de « la poésie de l’Antiquité », et visait à opérer la « reprise critique » des œuvres dionysiaques de la Grèce tragique pour créer (ou « refaire, en moderne ») « la grande œuvre classique dont manque l’époque » et ainsi « surpasser et compléter l’Antiquité dans ce qu’elle a d’inachevé ou d’inaccompli, dans ce qu’elle n’a pas réussi à effectuer de l’idéal classique qu’elle entrevoyait. Ce qui revient à opérer la “synthèse” de l’Antique et du Moderne, ou […] à relever—aufheben—l’opposition de l’Antique et du Moderne. » (Ph. Lacoue-Labarthe et J.-L. Nancy, L’Absolu littéraire, 1978, 19-20). Mais là où le mythe en tant que modèle archaïque est exhumé dans l’optique du renouveau littéraire chez les poètes modernistes, le roman américain postmoderne (Gaddis, Hawkes, Gass, Coover) semble s’ériger à partir d’une certaine hantise du mythe, ou d’une volonté de le transcender esthétiquement, comme le suggère le titre du livre de Marc Chénetier, Au-delà du soupçon, qui porte sur les auteurs des années 60-80, plus réticents que leurs prédécesseurs vis-à-vis de ce qu’ils voient comme des répercussions culturelles et socio-politiques du mythe. Il s’agira donc de mettre en relief les ambiguïtés des avant-gardes modernistes face aux modèles, tantôt vénérés, tantôt honnis, et d’aborder la question de leur propre héritage pour les générations de l’après-guerre, ce dans l’optique de délimiter dans leur spécificité historique et générique les « usages » littéraires du mythe depuis le modernisme. Nous encourageons tout particulièrement des réflexions sur l’émergence de la poésie moderniste et sur les auteurs de l’après-guerre, de Williams, Pound, Stein et H.D. à Duncan, Olson et Creeley, ou à John Ashbery et Michael Palmer, et de Gaddis à Everett, ou à Marcus, en passant par Barth, Barthelme, Pynchon, Markson ou encore Abish.

Les propositions sont à envoyer conjointement à Richard Anker et à Clément Oudart

Mimesis, myth(s), model(s) in (post)modern American poetry and fiction
If Plato at the dawn of the West sought to expulse the poets from the Republic, it was because poets were considered makers of myth, that is makers of models the imitation of which he feared would alienate citizens from truth. Plato saw myth as an instrument of identification, in other words as a mimetic instrument. Nietzsche however suspected that Plato had himself written “philosophical novels” in appropriating myth as a mimetic fable of truth. Nietzsche’s suspicion was nourished by his knowledge of the romantics of Jena who, themselves, had dreamt of a novel which, had it ever been achieved, would have amounted to a repetition of Platonism, insofar as they considered the novel as the form best suited for an aesthetic rendering of the Absolute, or of metaphysics such as it had been historically transmitted by philosophy until the Kantian crisis. Inseparable for the romantics from this aesthetics of the Absolute was the call for Art and Literature to create a new myth, indeed a new religion. Everything occurs as if myth, relegated to the margins of Western thought by philosophy, had returned to its center by way of Literature (understood as irreducible to “belles lettres”), or as the birth of Literature. Yet since it is not only the myth that Plato had banished which returns in this way, but also what one is obliged to call “philosophical” myth itself, or, if one prefers, the onto-mimetology invented by Plato, two modalities of myth turn out to be operative in the invention of Literature, two modalities of which it is the aim of this workshop to explore the repercussions in the wake of romanticism.
This workshop will seek to inquire into modern and postmodern writing insofar as it is a repetition of the romantic model, where the word repetition should be understood in all its acceptations: reappraisal, reversal, performance, accomplishment, restoration, sublimation, transcendence, Aufhebung, etc. Through its complex relation to history and tradition, the modernity of major modernist poetic works (like Pound or H.D.’s) could be seen as stemming from its ability to excavate archaic, primitive or mythic models. This tension already underlies the “modernity” of early German romanticism, which was initially concerned with “Classic poetry” and sought to “critically reappraise” the Dionysian works by Greek playwrights in order to create (or “remake, in modern fashion”) “the great classic work this century is lacking” and thereby “outshine and supplement Antiquity in its incompleteness, in its incompletion, in its failed attempt to implement the classic ideal it had glimpsed. This boils down to performing a “synthesis” of the Ancient and the Modern, or (…) to reappraise—aufheben—the opposition of Ancient and Modern” (Ph. Lacoue-Labarthe et J.-L. Nancy, L’Absolu littéraire, 19-20). However while myth as an archaic model is unearthed by the modernist poets and embraced for its ability to “(re)make it new”, postmodern novelists (Gaddis, Hawkes, Gass, Coover), more wary of the cultural and socio-political repercussions of myth-making, tend either to eschew myth or strive to transcend it aesthetically, as is suggested by the title of Marc Chénetier’s study of fiction from the 1960-1980’s, Au-delà du soupçon. Our goal, therefore, is to bring out the essential ambivalence characterizing the modernist avant-gardes’ relations to models, in turn revered and abhorred, and to question the modernist legacy as bestowed upon the postwar generations. Studies of the rise of modernist poetry as well as postwar literary works are particularly welcome, ranging from Williams, Pound, Stein and H.D. to Olson, Duncan and Creeley or to John Ashbery and Michael Palmer, and from Gaddis to Everett or Marcus, through Barth, Barthelme, Pynchon, Markson or Abish.

300-word proposals should be sent both to Richard Anker and Clément Oudart

7. Modèles et territoires de la littérature – Models and the territories of literature

Anthony Larson, Université Rennes 2

Dans Dialogues, une conversation avec Claire Parnet, Gilles Deleuze intitule de manière assez provocatrice « De la supériorité de la littérature anglaise-américaine » le chapitre qu’il consacre à la littérature . Au fil de cette longue discussion, le lecteur retrouve des termes clés de la réflexion deleuzienne sur la littérature : « ligne de fuite », « dé- et re-territorialisation », « délirer », et « devenir » , mais ce qui surprend sans doute le plus ici est de constater que cette discussion centrale sur la littérature est ouvertement liée à une tradition littéraire spécifique (au détriment d’autres traditions, notamment française). Comment Deleuze est-il amené à déclarer la supériorité d’une tradition littéraire nationale « supérieure » par rapport à d’autres, étant donné qu’une telle position semble en opposition totale avec la réflexion globale de Deleuze ?
Une des réponses est peut-être à rechercher dans une logique plus profonde, en l’occurrence dans la notion de devenir qui selon D justifie la supériorité de la littérature anglaise-américaine. Quand Gilles Deleuze évoque la littérature et notamment la littérature américaine, il ne parle pas d’une tradition ou d’un modèle de littérature qui aurait sa propre histoire, ou qui évoluerait par rapport à d’autres traditions nationales. Au contraire, il envisage la littérature en tant que concept. Pour Deleuze, un concept est une réponse philosophique à un problème particulier et dans le contexte de la littérature, le problème qui semble concerner Deleuze est celui de la tradition littéraire ou du modèle. La littérature elle-même répond à la lecture traditionnelle (dans les deux sens du terme : comme « tradition littéraire » et comme « habitude de lecture ») en brisant le modèle, la « loi » du signifiant et de l’interprétation. Pour Deleuze, on pourrait dire que la littérature est supérieure quand elle fonctionne comme concept car elle remet en question le modèle et ses illusions, ses frontières, et sa logique de calque. Quand la littérature crée des lignes de fuite, elle va jusqu’aux limites de la grammaire, la poussant dans ses retranchements. Devenir-délire, elle atteint une puissance supérieure qui affecte l’interprétation. Envisagée sous cet angle, la « supériorité » de la littérature se libère de ses attaches territoriales et nationales.
Néanmoins, un territoire spécifiquement américain reste bien présent dans la littérature qu’affectionne Deleuze. Cette relation paradoxale s’explique peut-être par la relation que l’on peut établir avec deux autres termes clés dans la réflexion deleuzienne : différence et répétition. L’histoire géographique des Etats-Unis est effectivement celle de la répétition politique et sociale, inscrite dans une différence de révolution et de rupture. C’est peut-être dans cette histoire spécifiquement américaine que réside un « moteur » de création littéraire, de création de la littérature. Pour Deleuze, créer, c’est résister : la puissance de la littérature américaine et sa supériorité sont inscrits dans sa résistance aux modèles et à la répétition.
Depuis l’apparition d’une littérature coloniale jusqu’au présent, on s’intéressera à ce qui semble distinguer ce territoire de la littérature américaine : qu’il s’agisse des tentatives de la littérature américaine d’établir une « voix » propre ou de mettre en ?uvre un projet qui embrasserait toute la nation (the « great American project »), on soulignera la quête d’une énergie créative qui cherche à répéter dans la différence, à résister et détruire les modèles.

Models and the territories of literature

In Dialogues, a conversation with Claire Parnet, Gilles Deleuze entitles a long reflection on literature with the provocative heading “On the Superiority of Anglo-American Literature”. The chapter-length reflection is on important traits in Anglo-American literature such as “flight,” “de-territorialization”, “deliria”, and “becoming.” While these latter themes are easily recognizable as central to the Deleuzian enterprise, tying them to a specific literary tradition (and openly condemning other traditions, such as the French one) comes as a surprise. How can one claim “superiority” for a certain national literary tradition, especially given that such a position appears to be in complete opposition to the larger work of Deleuze?
Perhaps the answer is in a deeper mechanics at work in the chapter heading, in its becoming. When Deleuze speaks of literature, and specifically American literature, he is not speaking so much of a tradition, a model of literature with its history and developments in relation to other national traditions, but of a concept of literature. For Deleuze, a concept is a philosophical response to a specific problem and the problem is expressly that of the literary tradition or model. Literature that breaks the model, the “tyranny” of the signifier and interpretation (for placing literatures inside of “traditions” necessarily requires interpretation, a God-like point of view) is superior because it reveals the model for what it is: an illusion, a boundary, a pre-traced copy of a defining idea. When literature “flees” this model, pushing up against and beyond the limits of grammar, “becoming-deliria” it reaches a higher (and superior) power, affecting one’s ability to interpret. Read this way, Deleuze’s “superior” literature loses any ties to a national territory in a “traditional” sense.
Yet a territory tied specifically to the American continent remains in Deleuze’s eyes. Might this paradoxical relationship be understood more clearly in light of another pair of terms from Deleuze’s work, those of difference and repetition? In America’s very geographical destiny as a repetition of earlier political and social structures, inscribed in the difference of revolutionary change, might one not find a central “motor” of literary creation? For Deleuze, to create is to resist and the specific power of American literature (its superiority) is in its territorially inscribed resistance to models or repetitions. Time after time, from early colonial literature, to the young republic, through the establishment of a distinctly “American” voice, to the quest for and undoing of the “great” American literary project, can one not trace a creative urge to repeat with difference, to resist and overthrow the model, foreign or native?
Les propositions sont à envoyer à Anthony Larson avant le 20 décembre 2013.

8. The US : models, counter-models… an end to models ?

Jagna Oltarzewska, Université Paris 4

Models of critical reading have succeeded each other and jostled for position over the course of the 20th century and into the early years of the 21st. A complex history of cross-cultural influence, belated translation and conjunctural rediscovery has made and unmade interpretive communities with increasing swiftness since the 1960s. Emerging from a historical moment with its distinctive episteme, critical models enjoy a long afterlife and resist chronological ordering; Russian Formalism influences structuralism, which in turn looms large in Lacan’s psychoanalytic theory; while the Lacanian “real” has been energetically taken up by trauma studies (Cathy Caruth), feminism and gender studies (Joan Copjec), as well as postmodern approaches to the visual arts (Hal Foster). Much of the recent history of critical models in literary and cultural theory is the history of two-way transatlantic transfer and reception, with the curious temporal disjunctions and felicities that attend the recontextualization of seminal works decades after their initial publication (Fredric Jameson’s Political Unconscious (1981) translated into French in 2012, its resonance as yet uncertain; Carol Gilligan’s In a Different Voice, making considerable impact in France in a paperback edition of 2008, although an earlier French translation (1986) had passed unnoticed). The New Criticism, a powerful and by no means defunct model of critical practice which dominated the American academy from the 1930s to the mid-1950s, had roots in a late Romantic ideology of the sensuous particular, and its interpretations aspired to resolve divergent meanings in the ultimate unity of an autonomous and autotelic work – the celebrated “urn” or “icon”. The New Critics were committed to a methodology of “close reading”, an imperative which has continued to impress itself on successive generations of literary scholars, regardless of critical orientation. While Paul de Man announced the “dead-end” of Formalist criticism as early as 1953, critical practice and pedagogy continued to espouse New Critical methods well into the 1970s; and they survive today as the spontaneous philosophy and practice of many a critic and teacher. If the influence of the Geneva School (Georges Poulet taught at Johns Hopkins in the 1950s) and the early structuralist writings of Barthes and Genette (imported into the US in the 70s and early 80s) favoured the continued deployment of formalist methodologies, albeit with a scientific spin, counter-models began to assert themselves with a vengeance in the 70s and 80s, when the intersecting claims of sex, race and class reinstated the neglected questions of identity and history. French theory (François Cusset) was to serve a twin agenda in this context: in the US, Derrida’s ‘deconstruction’ was instrumentalized as a radical practice of reading, exposing insuperable fractures within the ‘organic’ work; while Foucault’s concept of power found favour with gender studies and postcolonial approaches anxious to expose and critique mechanisms of oppression. The hybridization and diversification of critical discourses has accelerated from the 90s to the present day. Contemporary commentators call attention to the “disordered” or “disorganized” state of theory and practice at the present time (Vincent B. Leitch), to the “curiously hybrid and unstable mix” of disciplines informing what was once known as ‘literary theory’, now simply as ‘theory’(Philip Rice and Patricia Waugh).

In view of the above, we might ask the following:

1. What insight, if any, does the eclectic, “disorganized” use of critical models offer into our changing times? In an intellectual climate that appears endlessly accommodating, can counter-models – truly oppositional models – still arise?

2. In the last twenty-five years, the study of literary texts has ceded to the study of cultural forms, many of them image-based. The absorption of the literary into the cultural occurs in tandem with the absorption of literary theory by cultural studies. “Cultural studies” is de facto not just an institutional practice, but the dominant paradigm which defines our institutional space, the space within which scholarship is now conducted. What are the unspoken politics of such a space? Do critical paradigms still compete? Is there a polarization of institutional space, or are we witnessing its homogenization? What would a ‘counter-model’ resemble, today? What, exactly, would it ‘counter’?

3. Perry Anderson has recently sketched the shape of the inter-state system in the first decades of the 21st century; the waning of the US as global hegemon and the emergence of a new pentarchy – the US, the EU, China, India, Russia, a new “concert of powers” with a prosaic basis – economic interdependence. Collective commitment to the world market means that ideological differences are relegated to the background. What emancipatory or utopian energies can theoretical models harness in order to renew themselves in such a conjuncture?

4. Do critical models refract national ideologies? This, from Terry Eagleton: “The history of modern American criticism is among other things a rhythm of restless oscillation between a Heideggerian servility to the literary object, and an anarchic assertion of readers’ power over this dominative discourse. Perhaps both positions answer to enduring motifs of American ideology: the first to a ‘frontier’ consciousness that Nature was there before we were; the second to a euphoric individualism which sucks all Nature into its maw.” (1981) Is there any substance to such correlations? How do transnational and globalizing forces act on the ‘national’ matrix of theoretical models, supposing such a matrix exists?

Que ce soit en France ou aux États-Unis, les modèles de lecture critique se succèdent à un rythme impressionnant depuis les années 1970 ; leur histoire relève d’un processus complexe d’influences réciproques, de traductions tardives, de redécouvertes conjoncturelles. Les communautés interprétatives se créent, se défont et se reconstruisent au fil de ces événements. Les modèles interprétatifs résistent à toute tentative de classement chronologique : le formalisme russe informe le structuralisme, qui occupe une place importante dans la théorie lacanienne ; le « réel » lacanien est repris, à son tour, par les « trauma studies » (Caruth), les études sur le genre (Copjec), les esthétiques postmodernes (Hal Foster), la philosophie d’inspiration psychanalytique (Žižek, Badiou). L’histoire récente des modèles de lecture critique est avant tout celle d’un dialogue transatlantique marqué par les succès et les ratages imprévisibles qui hantent toute scène d’interlocution. La France se met à traduire une pensée américaine (Butler, Gilligan, Jameson, Spivak…) imprégnée de « French Theory » (Cusset), traduction dont les enjeux et les conséquences restent, pour l’heure, incertains. Reconnue longtemps comme modèle hégémonique dans le milieu universitaire américain, la « New Criticism » dont on annonce un peu prématurément les « impasses » en 1953 (Paul de Man), persiste jusqu’à ce jour sous la forme d’une philosophie spontanée de la lecture et de la pédagogie. Les lectures critiques d’inspiration formaliste se pratiquent jusque dans les années 70, décennie pendant laquelle les contre-modèles commencent à s’affirmer, forts des revendications issues de la matrice « sex, race and class ». Les problématiques refoulées de l’histoire et de l’identité sont réintégrées ; dans le même temps, les champs ouverts à la lecture critique connaissent une vaste expansion, les approches d’inspiration sémiologique et les « cultural studies » multipliant de manière exponentielle les objets d’étude. Depuis les années 90, on assiste à une prolifération de modèles critiques, à l’hybridation des discours interprétatifs et à leur diversification. Le théoricien Vincent B. Leitch attire l’attention sur l’état « désordonné » des pratiques théoriques contemporaines; Patricia Waugh et Philip Rice pointent « le mélange [disciplinaire] instable et curieusement hybride » qui informe ce que l’on avait coutume d’appeler la « théorie littéraire » et qu’on connaît simplement, aujourd’hui, sous le nom de « theory ».

Les questions qu’on sera amené à se poser sont les suivantes :

– l’utilisation éclectique et « désordonnée » de modèles reflète-t-elle une conjoncture ? Dans un climat qui paraît accueillir un très grand nombre de modèles critiques, qu’en est-il du modèle oppositionnel, du véritable contre-modèle ?
– quelle est la politique d’un espace institutionnel régi par les approches relevant des « cultural studies » ? Est-ce un espace qui favorise l’émergence du nouveau ?
– à l’ère d’un néolibéralisme globalisant, quelles sont les énergies émancipatrices dont les contre-modèles pourraient se prévaloir ?
– le modèle critique s’ancre-t-il dans une idéologie relevant de l’état-nation ? (Eagleton) Une matrice idéologique « nationale » ne se délite-t-elle pas sous la pression des forces transnationales et globalisantes ? Quelles en sont les conséquences pour l’émergence – et l’utilisation – des modèles ?
Paper proposals dealing with any aspect of the questions raised above are warmly welcomed. As are papers dealing with questions of cross-cultural transfer and reception of critical models. Please send proposals to Jagna Oltarzewska before December 20, 2013.

9. Au-delà du modèle puritain ? Le Voyage du Pèlerin comme intertexte de la fiction états-unienne – Revising the Puritan Model? The Pilgrim’s Progress as the ur-text of US fiction

Claude Le Fustec , Université Rennes 2 et Anne Ullmo , Université Lille 3

Dans The Reign of Wonder (1965), Tony Tanner déclare: “it is hard to think of many major American novels which do not in some way incorporate in them the notion of a search, a quest, a more than physical journey.” Le rapport presque obsessionnel que l’imaginaire culturel états-unien semble entretenir avec l’allégorie de Bunyan, The Pilgrim’s Progress, semble confirmer l’analyse de Tanner. Du symbole identitaire que représentent les « Pères Pèlerins » aux récentes adaptations cinématographiques du voyage du pèlerin comme celle de Dany Carrales en 2008, l’imaginaire américain semble habité par l’allégorie de Bunyan. En littérature, les plus grands auteurs y ont eu recours, qu’il s’agisse de Hawthorne, dont la nouvelle « The Celestial Railroad » est une réécriture, ou de la célèbre épopée des fermiers migrants dans Les Raisins de la colère. Le voyage du pèlerin donne sa profondeur tragique à l’utopie d’un Gatsby et constitue le fondement des hallucinations du voyage beat, comme l’a lui-même reconnu Kerouac, et à sa suite Krakauer (Into the Wild, 1996).
Toutefois, modèle du voyage vers un nouveau monde, la quête du pèlerin est constamment ré-écrite, parodiée, subvertie. Souvent maléfique chez Hawthorne (« Ethan Brand »), vouée à l’échec chez Edith Wharton (The House of Mirth), elle se révèle illusoire pour Gatsby et que dire des délires mystico-alcoolisés de Salvatore Paradise ? Or l’allégorie puritaine, cette possession jugée désormais inutile par les fermiers migrants qui s’en défont avant leur départ pour la Californie dans le roman de Steinbeck, continue de structurer la littérature américaine, aussi bien postmoderne (The Crying of Lot 49, parodie de la quête religieuse selon Brian D. Ingraffia) que « minoritaire » (on songera notamment au roman A Mercy de Toni Morrison, paru en 2008).
Cet atelier aimerait inviter des communications examinant le rapport de la fiction états-unienne au modèle que semble donc constituer l’allégorie puritaine de Bunyan, depuis le 19è siècle jusqu’à nos jours. On pourra examiner le type d’intertextualité mise en jeu, reprise, simple parodie ou rapports symboliques plus complexes, se poser la question de ce que devient l’allégorie d’un point de vue formel ainsi que ce qu’il en est de la quête de sens, notamment dans les avatars les plus contemporains du Voyage du Pèlerin. On tentera ainsi éventuellement de poser la question de la spécificité d’une esthétique états-unienne modelée par un certain rapport à la transcendance.
Les propositions de communication (environ 200 mots) sont à envoyer à Claude Le Fustec et Anne Ullmo avant le 20 décembre 2013.

Revising the Puritan Model? The Pilgrim’s Progress as the ur-text of US fiction.

In The Reign of Wonder (1965), Tony Tanner stated: “it is hard to think of many major American novels which do not in some way incorporate in them the notion of a search, a quest, a more than physical journey.” This is clearly illustrated by the omnipresence of Bunyan’s Pilgrim’s Progress in US culture. From the voyage of the first settlers famously known as the “Pilgrim Fathers,” to contemporary versions of the English puritan allegory such as the 2008 film adaptation by Dany Carrales, Bunyan’s spiritual quest seems to have had a special appeal for US imagination. From the early days of US fiction, it has been rewritten, as in Hawthorne’s “The Celestial Railroad” or Steinbeck’s famous epic The Grapes of Wrath. Gatsby’s utopian and tragic quest is yet another one of its versions, while Bunyan’s allegory is the basis of the hallucinated beat trip, as Kerouac himself acknowledged, a model subsequently taken up by Krakauer (Into the Wild, 1996).
However, as the model of the quest for a new World, The Pilgrim’s Progress keeps being revised, parodied, subverted by US fiction. It often leads the pilgrim to evil rather than to the Celestial City in Hawthorne’s stories, is doomed to failure in Wharton’s House of Mirth, is exposed as illusory in The Great Gatsby and becomes equated with intoxication in Kerouac’s On the Road. Still, useless though it might seem to the migrants who leave it behind among the many belongings that they now deem worthless as they set out on their journey to California in The Grapes of Wrath, the puritan allegory remains an undisputable component of contemporary US fiction, whether postmodern (The Crying of Lot 49 is a parody of the religious quest according to Brian D. Ingraffia) or African American (as in Toni Morrison’s 2008 A Mercy).
This workshop would like to discuss this relationship between US fiction and Bunyan’s allegory as an uhr text of this fiction since the 19th century. Possible approaches might be the ways in which The Pilgrim’s Progress is being revised, parodied or echoed both from the point of view of its allegorical form and symbolic significance, and the consequences this has with regards to its quest for meaning. One central concern could be to try and examine the link between American fiction and its evolving concern for transcendence.
Abstracts (200 words) should be sent to Claude Le Fustec and Anne Ullmo before December 20, 2013.

10. D’un usage particulier du modèle : vices et vertus du plagiat dans la littérature américaine – One Way of Using a Literary Model: Virtues and Vices of Plagiarism in American Literature

Gérald Préher(Université Catholique de Lille) et Frédérique Spillill (Université de Picardie Jules Vernes, Amiens).

Un modèle se définit communément comme une chose ou une personne qui, en vertu de ses caractéristiques et souvent de ses qualités, sert de référence à l’imitation ou à la reproduction. Nombreux sont les écrivains américains qui,ouvertement et sans afféterie, revendiquent leurs modèles. Longtemps empruntés au vieux continent (ainsi Shakespeare détient-il sans nul doute une position immuable à la tête du palmarès des modèles littéraires), ces modèles sont aussi bien susceptibles d’être engendrés par l’Amérique elle-même : parmi eux, William Faulkner a été—et il est probablement encore—un modèle écrasant, que Flannery O’Connor, se frayant une voie dans son sillage, comparait astucieusement à la locomotive vrombissante du Dixie Limited. Dans un article intitulé « Faulkner’s Enduring Dixie Limited », Thomas Inge fait porter l’ombre et l’influence de Faulkner, revendiquée par des auteurs aussi variés que Lillian Hellman, Richard Wright, Chester Himes, William Styron, Richard Ford, Cormac McCarthy, Toni Morrison et Ron Rash (pour n’en citer que quelques-uns), jusqu’à la Chine contemporaine : ainsi Mo Yan, détenteur du Prix Nobel de Littérature 2012, se réclame-t-il de Faulkner, Le Bruit et la fureur étant, de son propre aveu, l’un des romans qui ont le plus marqué son travail d’écrivain.
L’imitation, consciente ou non, d’un modèle est généralement suscitée par un fort sentiment d’admiration : or, de l’hommage au plagiat, la frontière est parfois poreuse et ténue – on pense au scandale qui a suivi la publication des nouvelles de Brad Vice qui avaient alors été retirées du commerce avant de reparaître dans une version expurgée en 2007. « Au sens moral, écrit Michel Schneider dans son remarquable essai intitulé Voleur de mots, le plagiat désigne un comportement réfléchi, visant à faire usage des efforts d’autrui et à s’approprier mensongèrement les résultats intellectuels de son travail. Le plagiat au sens strict se distingue de la cryptomnésie, oubli inconscient des sources, ou de l’influence involontaire, par le caractère conscient de l’emprunt et de l’effacement de ses sources » (38). Même s’il est souvent difficile d’en démontrer la preuve, le plagiat s’apparente donc à un délit de contrefaçon. Dans l’entretien que Vanessa Place a accordé à Marion Charret-Del Bove et Françoise Palleau-Papin pour Transatlantica (1, 2012), l’écrivaine explique avoir poussé les limites en publiant Gone With the Wind sous son propre nom, assumant pleinement son vol : « I also did a version of the book where I didn’t do anything to the text, it just had the entire book Gone With The Wind republished with my name on it. I keep trying to explain that I’m stealing it, I’m not parodying, I’m not rephrasing, I’m not adding artistic value, I’m just stealing ».
Mais est-il seulement possible pour un auteur de s’émanciper de tout modèle ? Une œuvre peut-elle prétendre faire table rase de celles qui la précèdent ? L’originalité absolue n’est-elle pas un fantasme ? Walter Benjamin ne dénonçait-il pas déjà le fétichisme de l’einmalig, ce qui ne se verra jamais qu’une fois ? De même, l’idée selon laquelle un auteur pourrait revendiquer l’autorité d’une ?uvre originale dont il serait également le propriétaire n’est-elle pas aujourd’hui désuète ? Un texte n’est-il pas inévitablement, comme Roland Barthes nous invite à le penser, constitué de citations « anonymes, irrepérables et cependant déjà lues : ?…? des citations sans guillemets » ? Plagier autrui n’est-ce pas, en dernière analyse, apprendre à être soi ? Tandis que Proust invitait les écrivains à « se purger du vice naturel d’idolâtrie et d’imitation » et à pasticher ouvertement les auteurs admirés pour « redescendre à n’être plus que ?soi? », l’un de ses fervents lecteurs estime que « ?l?e plagiat est l’occasion de penser cette nécessité d’en passer par les autres (images, miroirs, captures, défaites) pour devenir quelqu’un » (Schneider 84).En tant qu’imitation d’un modèle portée à son comble, le plagiat s’apparenterait-il donc à un processus identitaire ? Ferait-il partie intégrante de la recherche d’un style singulier ?
Le post-modernisme fait volontiers l’« apologie du plagiat », pour emprunter—plagier—le titre d’un ouvrage de Jean-Luc Hennig, le considérant comme une ressource de l’écriture. Tandis que, dans son article « The Ecstasy of Influence », Jonathan Lethem vante les beautés de la réutilisation d’une oeuvre confrontée à un nouveau destin—« the beauty of second use » (64)—,Jonathan Safran Foer fait sensation en découpant littéralement à l’intérieur d’un texte, Les Boutiques de cannelle (1934),pour en faire émerger une histoire inédite : « I took my favorite book, Bruno Schulz’s Street of Crocodiles, and by removing words carved out a new story ». Sous la forme de Tree of Codes (2010), le texte de Schulz, qui n’est alors plus tout à fait son texte mais un texte qui lui ressemble, connaît alors une seconde vie, près de soixante-dix ans après la mort de son auteur.L’idée très borgésienne d’une littérature universelle qui prendrait la forme d’une galerie des glaces où la notion d’auteur s’abolirait dans un interminable vertige sous-tend également The History of Love (2005), où Nicole Krauss poursuit une réflexion poétique sur la tentation d’usurper l’?uvre d’autrui et sur ses conséquences.Est-ce un hasard si son roman met également en scène un personnage qui, pour arrondir ses fins de mois, exerce les fonctions de modèle posant nu, tout rabougri qu’il est, sous le regard d’une classe de dessinateurs ? C’est cette réflexion sur les voies de frayage entre modèle et plagiat que nous vous invitons à explorer avec nous.

Les propositions sont à adresser à Gérald Préher et Frédérique Spill avant le 20 décembre 2013.

One Way of Using a Literary Model: Virtues and Vices of Plagiarism in American Literature

Many American writers have openly and unashamedly used literary models for their work. A literary model is usually defined as an author or text that is imitated or copied on account of its particular characteristics, most frequently its specific qualities. For a long time the models selected came from the Old Continent (Shakespeare must hold the all time record), but more recently models are just as likely to be found in the canon of American literature. William Faulkner, for example, has been and probably still is an overwhelming inspiration for many, so much so that Flannery O’Connor, seeking to find her own path in his shadow, would astutely compare him to the Dixie Limited, a chugging locomotive. In an article entitled “Faulkner’s Enduring Dixie Limited”, Thomas Inge charts the extent of Faulkner’s influence, claimed by such varied authors as Lillian Hellman, Richard Wright, Chester Himes, William Styron, Richard Ford, Cormac McCarthy, Toni Morrison and Ron Rash (to name but a few), reaching as far as contemporary China where Mo Yan, winner of the Nobel Prize for Literature in 2012, speaks of his debt to Faulkner; The Sound and the Fury being, on his own admission, one of the novels which has left the strongest impression on his own writing.
Imitating a model, consciously or not, is generally caused by a strong feeling of admiration. However, between homage and plagiarism the dividing line is sometimes very thin – the scandal following the publication of Brad Vice’s short stories, which were withdrawn from sale before being rereleased in a distinctly expurgated version in 2007, immediately comes to mind. In his remarkable essay Voleur des Mots (Word Thief), Michel Schneider writes: “From a moral point of view, plagiarism is a premeditated activity, aiming to make use of other people’s efforts and to appropriate the intellectual fruit of their labors. Plagiarism in the strictest sense of the word is not the same thing as cryptomnesia, where the writers is unaware he is copying the source texts, or involuntary influence, as it implies conscious borrowing of words whose source is deliberately not mentioned” (38). Even if it is often difficult to prove it, plagiarism is the same thing as forgery, which is a crime. In Marion Charret-Del Bove and Françoise Palleau-Papin’s interview with Vanessa Place, published in Transatlantica (1, 2012), the writer explains how she got as close as possible to the limit by publishing Gone With the Wind under her own name, openly admitting her theft: “I also did a version of the book where I didn’t do anything to the text, it just had the entire book Gone With The Wind republished with my name on it. I keep trying to explain that I’m stealing it, I’m not parodying, I’m not rephrasing, I’m not adding artistic value, I’m just stealing”.
But is it really possible for an author to be free of all literary models? Can a work ignore all those that have preceded it? Is absolute originality any more than a dream? Has not Walter Benjamin already denounced the fetishism inherent in the einmalig – that which is only seen one single time? Along the same lines, is not the idea that a writer, by claiming the authorship of an original work, also becomes its owner a little out-of-date? Is not a text, as Roland Barthes invites us to think, just a collection of quotations, “anonymous, unplaceable and yet words we have already read […], quotations without inverted commas In the last resort, isn’t plagiarizing someone else a way to learn to be oneself? While Proust invited writers to “get rid of the natural vices of idolatry and imitation” and to write open pastiches of the authors they admired in order to “go back down to being just oneself”, one of his fervent readers considers that “plagiarism is an opportunity to think thorough the need we all have to go via other people (imagining, reflecting, capturing and failing to live up to them) in order to become somebody” (Schneider 84). As the supreme form of imitation, may we see plagiarism as similar to a process of finding one’s identity? Is it an integral part of the search for a style of one’s own?
Postmodernism is quite willing “To Justify Plagiarism”, to borrow – or plagiarize – the title of a book by Jean-Luc Hennig, considering it as just another resource for the writer. On the other hand, in his article “The Ecstasy of Influence”, Jonathan Lethem boasts of the beauties of reusing a work in order to give it a new destiny – “the beauty of second use” (64). Jonathan Safran Foer created a sensation by literally cutting out pieces of a text to create a new story: “I took my favorite book, Bruno Schulz’s Street of Crocodiles, and by removing words carved out a new story”. Published in this new form as Tree of Codes (2010), Schulz’s text, which is no longer quite his text, but a text that resembles it, gains a second life, more than seventy years after the death of its author. Borges’s idea of a universal literature that takes the form of a hall of mirrors where the idea of an author would be abolished in an endless spiral also forms the basis of The History of Love (2005), where Nicole Krauss reflects on the temptation to usurp the authorship of other people’s work and the consequences of such an action. Is it just chance if the novel also includes a character who, in order to balance his monthly budget, in spite of being hunched up, works as a nude model in front of a class full of art students? We invite participants to explore with us this shadow country between being inspired by a literary model and plagiarizing it.
Proposals should be sent to Frédérique Spill and Gérald Préher, by December 20, 2013.

11. WAGNER EN AMÉRIQUE : modele(s )et contre-modele(s) wagnerien(s) dans la littérature et les arts américains – Wagner in America:
Wagnerian Model(s) and counter-model(s) in American Literature and Arts

Mathieu Duplay (Université Paris Diderot — Paris 7)
Axel Nesme (Université Lumière — Lyon 2)

« Is there a poetry of the future just dawning as the music of the future dawned some years ago ? Is Walt Whitman another and greater Richard Wagner ? » se demandait un journaliste du Chicago Herald en 1890. L’objectif de cet atelier sera d’interroger la fortune du « vieil enchanteur » aux Etats-Unis. Il pourra y être question de l’histoire des mises en scène wagnériennes aux Etats-Unis, de l’influence qu’a exercée sur celles-ci le modèle bayreuthien, mais aussi de l’apport spécifique des Etats-Unis en matière de direction d’orchestre (James Levine) et d’art vocal (Lillian Nordica, Helen Traubel, Eleanor Steber, James King, Deborah Voigt) en réponse aux choix esthétiques des grands chefs et des artistes européens du XIXe siècle jusqu’à nos jours. A un autre niveau, on pourra s’interroger sur la manière dont l’accueil réservé aux Etats-Unis à la musique de Wagner et à ses interprètes européens les plus prestigieux (notamment pendant la période 1933-1945) s’est accompagnée d’une réinterprétation originale de ses ?uvres dans un contexte culturel, social, politique et idéologique très différent de celui qui les a vues naître. Plus qu’aucun autre compositeur, Wagner a suscité chez certains de ses admirateurs une forme de vénération, qui ne fait pas obstacle à une dynamique complexe d’appropriation et de relecture dont les résultats s’avèrent parfois contraires à ses intentions explicites. Ce fut notamment le cas en 1903 lorsque le Metropolitan Opera choisit de monter une production de Parsifal malgré l’opposition de Cosima Wagner et les instructions écrites du musicien qui souhaitait que cette ?uvre ne soit exécutée qu’à Bayreuth — acte de naissance d’un « Wagner américain » dont il conviendrait de dessiner la figure, tout sauf figée et sans doute assez différente de celle qui a marqué l’histoire culturelle européenne.
Il s’agira aussi d’examiner le rôle d’inspirateur que Wagner a joué auprès des artistes américains, sans se limiter au domaine de la musique et des arts de la scène. On examinera par exemple l’impact de Wagner sur la musique américaine dite « classique » et notamment sur les compositeurs, librettistes et metteurs en scène qui contribuent au renouveau de l’opéra américain depuis les années 1980 (John Adams, Philip Glass, Alice Goodman, Peter Sellars…). Quel est le Wagner vers lequel se tournent des artistes d’aujourd’hui lorsqu’ils cherchent à repenser le théâtre lyrique après Sch?nberg et John Cage (Europeras, 1987-1991) ? Quels échos la conception wagnérienne du Gesamtkunstwerk est-elle susceptible d’éveiller chez des musiciens et des gens de théâtre qui entendent dialoguer avec l’avant-garde européenne tout en cherchant à apporter aux débats esthétiques de notre époque une contribution originale, dans un contexte culturel où la distinction entre musique « savante » et musique « populaire » est beaucoup plus floue qu’en Europe ? On s’intéressera également aux auteurs de musiques de films hollywoodiens (depuis Bernard Herrmann jusqu’à James Horner, sans oublier Erich Wolfgang Korngold), mais aussi au modèle, voire au contre-modèle parodique que l’auteur du Ring représente depuis longtemps pour certains musiciens et metteurs en scène de cinéma. On songe par exemple à l’exploitation burlesque de la musique wagnérienne à laquelle les Warner Brothers se livrent dans What’s Opera, Doc ? où l’idylle de Bugs Bunny et d’Elmer Fudd revêt les accents du ch?ur des pèlerins de Tannhäuser. On pense également à The Producers de Mel Brooks, dont le scénario prévoyait un serment prêté à Siegfried sur fond de chevauchée des Walkyries, ou à Charlie Chaplin, dont le Dictateur danse sur la musique de Lohengrin un mégalomane ballet aux antipodes des danses hongroises de Brahms qui accompagnent l’inoffensif manège de son sosie le barbier. Beaucoup plus près de nous, Quentin Tarantino rend à Siegfried un hommage ambigu dans Django Unchained (2013). Par ailleurs, on n’oubliera pas non plus que le (contre-)modèle wagnérien continue d’exercer une influence sur les autres arts, comme en témoignent les ?uvres inspirées par Tristan und Isolde au plasticien Bill Viola.
Enfin, c’est aussi la présence de Wagner dans l’écriture américaine qu’il conviendra d’examiner. Quels ont été les échos littéraires de la théorie du Gesamtkunstwerk dont, par exemple, W. E. B. DuBois se réclame dans The Souls of Black Folk ? Comment les nombreuses citations du Ring et de Tristan interviennent-elles dans la semiosis de « The Love Song of J. Alfred Prufrock » et dans The Waste Land ? Pour des raisons historiques et esthétiques qu’il conviendrait de (ré)interroger, cette question concerne plus particulièrement les écritures modernistes, mais elle se pose déjà dans les romans de Willa Cather, qui dresse dans The Song of the Lark (1915) le portrait d’une cantatrice wagnérienne née dans le Colorado et implicitement présentée comme une figure exemplaire de l’artiste américain(e). De même, il ne faut pas oublier le rôle que jouent les emprunts ou les renvois à Wagner dans les textes postérieurs au modernisme, dans le contexte d’une réflexion esthétique, idéologique, voire éthique et politique sur laquelle pèse le souvenir de la Shoah (on pense par exemple aux allusions récurrentes à l’antisémitisme de Wagner dans les derniers romans de David Markson).
Merci d’envoyer vos propostions à Mathieu Duplay et Axel Nesme avant le 20 décembre 2013

Wagner in America:
Wagnerian Model(s) and counter-model(s) in American Literature and Arts

“Is there a poetry of the future just dawning as the music of the future dawned some years ago? Is Walt Whitman another and greater Richard Wagner?” a journalist for the Chicago Herald asked in 1890. In this workshop, we wish to examine the “old sorcerer’s” reception in America. We welcome studies on the production history of Wagner’s operas in the United States as well as on the influence of Bayreuth as a model or counter-model, but also on the specific contributions of American conductors (James Levine) and vocal artists (Lillian Nordica, Helen Traubel, Eleanor Steber, James King, Deborah Voigt) to Wagnerian interpretation, and on how these relate to the aesthetic choices made by major European conductors and singers since the 19th century. On another level, we wish to examine the ways in which the reception of Wagner’s music and the welcome extended in the United States to his most prestigious European interpreters (especially between 1933 and 1945) have led to creative reappraisals of his works in a cultural, social, political, and ideological context far removed from the one in which they were first performed. More than any other composer, Wagner has been the object of a form of near-religious worship by his most devoted followers, but this has never stood in the way of complex modes of re-appropriation and reinterpretation whose results sometimes contradict his own explicit intentions. This happened for instance in 1903 when the Metropolitan Opera company staged a production of Parsifal in the face of strong opposition from Cosima Wagner and despite the composer’s express desire that this particular work be performed only at Bayreuth. In retrospect, this historic production marks the appearance of an “American Wagner” whose changing features are worthy of interest, different as they are from those of the musician who has left such a strong imprint on European culture.
We also wish to examine how Wagner has inspired American artists, including (but not limited to) other musicians. For instance, attention could be paid to Wagner’s impact on so-called “classical” American music and particularly on the composers, librettists, and stage producers responsible for the rebirth of American opera since the 1980s (John Adams, Philip Glass, Alice Goodman, Peter Sellars…). To what aspects of Wagner’s works do contemporary American artists most strongly respond as they try to rethink musical theater after Schoenberg and John Cage (Europeras, 1987-1991)? What echoes does the Wagnerian concept of the Gesamtkunstwerk awaken among musicians, writers, and performers who seek to respond to the European avant-garde even as they try to make original contributions to contemporary aesthetic debates, in the context of a culture where the distinction between “art” and “popular” music is much less meaningful than in Europe? Attention will also be paid to Hollywood film composers (Bernard Herrmann, James Horner, Erich Wolfgang Korngold) as well as to the Wagnerian model or counter-model invoked by a number of film directors. The following examples come to mind: the Warner Brothers’ burlesque rendition of Wagner’s musical showpieces in What’s Opera, Doc? where Bugs Bunny’s and Elmer Fudd’s idyll is sung to the music of the Pilgrim’s Choir from Tannhäuser; Mel Brooks’s The Producers, whose original screenplay contained an oath to Siegfried with the ride of the Valkyries as a musical background; and Charlie Chaplin’s The Great Dictator, where Adenoyd Hinkel’s famous megalomaniac ballet to the music of Lohengrin stands in sharp contrast to Brahms’s Hungarian Dances, the musical accompaniment to which are set the harmless antics of Hinkel’s body double, the barber. Much closer to us, Quentin Tarantino pays an ambiguous homage to Siegfried in his recent movie Django Unchained (2013). Contributions could also focus on the influence exerted by the Wagnerian (counter-)model in other artistic fields, as suggested for instance by video artist Bill Viola’s reinterpretation of Tristan und Isolde.
Finally, Wagner’s presence in American writing needs to be examined. What were the literary echoes of the theory of the Gesamtkunstwerk to which W.E.B. Du Bois explicitly refers in The Soul of Black Folk? How do the numerous quotes from The Ring and Tristan und Isolde build into the semiosis of Eliot’s “The Love Song of J. Alfred Prufrock” and The Waste Land? For historical and aesthetic reasons that bear further examination, this question seems particularly relevant in the case of Modernist writing; however, similar issues already arise in the works of Willa Cather, whose 1915 novel The Song of the Lark deals with a Colorado-born opera singer implicitly presented as a paragon of the American artist. Likewise, attention could be paid to the role played by Wagnerian quotations or allusions in literature produced after the Modernist era, where they raise fresh aesthetic, ideological, ethical, and political questions in the wake of the Holocaust. (For example, David Markson’s last novels frequently mention Wagner’s anti-semitism.)
Merci d’envoyer vos propostions à Mathieu Duplay et Axel Nesme avant le 20 décembre 2013

12. La ville américaine et la nouvelle question urbaine – The American City and the New Urban Question

Catherine Pouzoulet, Université Lille 3

La colonisation des Amériques est née d’un rêve, et les origines de l’Amérique moderne furent d’abord dans l’invention d’un nouveau monde par les Européens de la Renaissance. Au moment où ceux-ci se prenaient à imaginer les plans de ce qui pourrait être une ville idéale, le Nouveau Monde fit figure de laboratoire d’expérimentation de ce nouvel art de bâtir la ville.
Rapidement cependant la ville nord-américaine devint plus un repoussoir qu’un modèle, avec son urbanisation anarchique, son absence de monumentalisme, et son aspect grouillant qui fait par exemple dire à Max Weber, découvrant en 1904 Chicago que « cette énorme ville, plus étendue que Londres, ressemble à un homme écorché dont on verrait fonctionner les viscères ». Si une image urbaine spécifiquement américaine finit par créer chez les voyageurs européens une certaine fascination – la ville américaine, au premier chef New York, avec ses gratte-ciel, son skyline, et son quartier des affaires – la ville américaine représente aussi un modèle urbanistique radicalement divergent du modèle européen en termes de division fonctionnelle des espaces et de géographie sociale (modèle de l’Ecole de Chicago).
C’est dans le contexte du passage à une économie dite post-industrielle et de transition vers un capitalisme financier globalisé que de nouvelles convergences se dessinent entre ville américaine et ville européenne. Non seulement on peut parler, comme Guy Burgel, de « revanche des villes » mais peut-être aussi de revanche de la ville américaine. Car l’émergence d’une nouvelle forme urbaine, la ville globale centre de décision d’un nouveau capitalisme financier, est d’abord mise en évidence par Saskia Sassen et Hank Savitch à New York , ainsi qu’à Londres et Tokyo, avant d’être étendue à une nouvelle hiérarchie de « villes de flux » (Olivier Mongin), si bien qu’aujourd’hui les mêmes logiques semblent à l’?uvre en Amérique et en Europe, au Sud et au Nord, dans le monde occidental comme dans les nouvelles puissances économiques que sont l’Inde, la Chine, et le Brésil. Dénombrées à 13 en 1985, Sassen estimait à 72 le nombre de villes globales vingt ans plus tard.
La question d’un modèle urbain américain se pose-t-elle encore alors que Shangai, Singapour ou Hong Kong ont sur de nombreux points dépassé Manhattan ? Ne faudrait-il pas alors, à l’instar de Saskia Sassen, parler de modèle de ville globale, qui serait la forme spatiale de la globalisation ? Cet atelier se propose d’ouvrir le débat sur l’avenir des villes, en explorant en particulier les liens entre ville et capitalisme, notamment à travers les thématiques suivantes :
-gentrification et revalorisation des centres historiques
-démarches innovantes dans la reconquête des friches industrielles
– enjeux de mobilité et incidence des réseaux de transport sur les accès au marché du travail
-violences urbaines, tensions inter-communautaires, et montée de nouvelles exclusions
– enjeux de développement durable
-gouvernance et financiarisation des politiques publiques
– stratégies de valorisation immobilière
Les propositions sont à envoyer à Catherine Pouzoulet avant le 20 décembre 2013.

The American City and the New Urban Question
Catherine Pouzoulet, Université Lille 3

The colonization of the Americas was born out of a dream and the origins of modern America are to be found in the invention of a new world by the Europeans of the Renaissance era. As they took to imagining the plans of an ideal city, the New World became a laboratory where to experiment the new art of building cities.
Yet the North American city soon became a reality that repelled more than it called for imitation, with its chaotic urbanization, its lack of aesthetic concerns, and its hyperdensity. This is how Max Weber, visiting Chicago in 1904, describes a sprawling city, larger than London, that made him think of a skinless man lying with his bowels exposed. If, by the 20th century, a distinctive American urban image did end up fascinating European visitors, first of all Manhattan with its skyscrapers, its skyline and CBD, the American city represented an inversion of the European model in terms of specialization of urban spaces and social geography (the School of Chicago model).
From the 1980’s, with the shift to a post-industrial economy and a globalized financial capitalism, new convergences emerged between American and European cities. It was not only the “revenge of the cities” (Guy Burgel) but the revenge of the American city. The emergence of a new urban form, the global city theorized by Saskia Sassen as the center of a new financial capitalism, was modeled after the transformations of New York City, as well as to a lesser extent London and Tokyo, before being observed in a new hierarchy of “cities in flux” (Olivier Mongin), so that by now the same processes seem to be at work in America as well as European cities, in the South as well as in the North, in the western world as in the new economic giants, China, India and Brazil.
Numbered at 13 in 1985, global cities by Sassen’s estimate were by 2005 up to 72! In this context, when Shangai, Singapour or Hong Kong are presented as the new models, is the notion of an American model still relevant? Or should we consider, as Sassen does, a model of a global city as the spatial inscription of globalization?
The workshop calls for contributions opening the debate on the future of our cities, while addressing the links between cities and financial capitalism, through a discussion of such themes as:
-Gentrification and the revival of historical centers
– innovative approaches to the upgrading of industrial wastelands
-mobility and impact of transportation networks on people’s ability to access the job market
-urban violence, inter-ethnic tensions, and new forms of social exclusion
-environmental sustainability of cities
-governance and financialization of public policies
– real estate development and speculation

Proposals should be sent to Catherine Pouzoulet by December 20.

13. Les Etats-Unis et le monde: vers la fin du “modèle” américain ? – The United States and the world: toward the end of the American “model” ?

Isabelle Vagnoux (LERMA, Aix-Marseille Université,)

Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis se sont faits les architectes d’un Nouvel ordre mondial censé promouvoir la démocratie libérale et ainsi assurer la paix. Cette période fut vécue par Washington comme une véritable naissance (cf Present at the Creation de Dean Acheson) à leur nouveau rôle de superpuissance. Pendant plus d’un demi-siècle, les États-Unis ont dominé le monde, répandant avec des fortunes diverses leurs valeurs et l’American Way of life.
Depuis l’avènement du XXIe siècle, cependant, le leadership américain est bousculé. Ce sont tout d’abord les attentats du 11 septembre qui mettent en évidence les fragilités de l’hyperpuissance. C’est également la montée en puissance d’autres pays, en germe depuis les années 1990, the rise of the rest, selon la formule de Fareed Zakaria, qui remet en question le leadership américain. C’est enfin une crise économique et sociale sans précédent depuis la Grande dépression qui frappe le pays. « Tout empire périra » écrivait l’historien Jean-Baptiste Duroselle. Que reste-t-il aujourd’hui du leadership américain ? Sommes-nous à l’orée d’un monde « post-américain » ? Ou bien les États-Unis sont-ils entrés dans un nouveau type de puissance (leading from behind) ? Comment les États-Unis continuent-ils à répandre leur « modèle » et leurs valeurs ? D’autres modèles émergent-ils ?
Cet atelier s’intéressera également aux dérivés de la politique étrangère et notamment aux migrations vers les États-Unis et au rôle transnational des diasporas. Les États-Unis constituent-ils toujours un aimant pour les populations du monde entier ? Quel impact ont eu la crise économique et sociale, les lois discriminatoires adoptées par certains États, les reconduites à la frontière, mais aussi, a contrario, les décisions de justice condamnant les mesures les plus discriminatoires, et les récentes dispositions présidentielles (DACA, 2012) ? À l’heure où d’autres économies peuvent paraître plus séduisantes, à l’heure où la réforme migratoire est devenue un enjeu politique, le « modèle » américain demeure-t-il toujours attractif ?
Les propositions sont à envoyer à Isabelle Vagnoux avant le 20 décembre.

The United States and the world: toward the end of the American “model” ?
In the post-World War II era the United States became the self-proclaimed architect of a new world order designed to promote liberal democracies and thus ensure peace. Washington gave birth (Present at the Creation by Dean Acheson) to the ‘Free World’s’ superpower. For more than half a century, the United States was a force of world domination as it disseminated, more or less successfully, its values and the Amercian Way of Life.
Since the dawn of the 21st century, American leadership has been disrupted/undermined. The 9/11 moment exposed the hyperpower’s underlying fragilities. Simultaneously, since the 1990s, the rise of the rest, in the words of Fareed Zakaria, had been emerging in other countries. And it was especially the social and economic crises, unprecedented since the Great Depression which devastated the nation. “All empires will perish”, wrote the historian Jean-Baptiste Duroselle. What remains today of American leadership? Are we on the verge of a “post-American” world? Or has the United States engaged a new form of power strategy – “leading from behind”? How has the United States continued to spread its “model” and values? Have other models emerged?
This panel will also be concerned with the consequences of foreign policy, notably migrations towards the United States and the role of transnational diasporas. Is the United States still a magnet for populations the world over? What impact has the economic and social crisis had with regards to discriminatory laws adopted by certain states, deportations, and also, to the contrary, legal decisions condemning discriminatory measures or recent presidential policies (DACA 2012)? At a time when other economies may be perceived as offering greater opportunities, when migration reform has become a key political stake, has the American “model” maintained its attractiveness?
PAPER POPOSALS SHOULD BE SENT TO ISABELLE VAGNOUX (isabelle.vagnoux@univ-amu.fr) BY DECEMBER 20, 2013

14. L’UNIVERSITÉ AUX ETATS-UNIS : modèles, contre-modèles, méta-modèles – The Universtity in the United States: models, conter-models, meta-models

François Cusset, Thierry Labica, Véronique Rauline
« Culture / cultures », EA370

Dans cet atelier, nous proposons d’envisager la problématique générale du Congrès 2014 à travers le prisme de l’Université. Toute proposition de communication qui visera à articuler une réflexion sur la notion de « modèle » et un ancrage dans le « lieu Université » états-unien sera examinée. Les propositions, qui pourront relever de tous les champs des études américaines, pourront, par exemple, interroger :
la notion de « modèle » à la lumière de l’ambivalence constitutive du système universitaire aux Etats-Unis envers ses référents historiques, immédiats ou plus lointains, dans « l’ancien monde universitaire » ;
le système universitaire états-unien en tant que « contre-modèle », s’émancipant, partiellement, des « modèles » européens, en particulier allemand et britannique ;
la dimension régulatrice de l’institution universitaire aux Etats-Unis, appareil de reproduction d’un « modèle » d’intégration sociale, et sa transformation progressive, en trente ans de saccage néolibéral, en un mécanisme de production de cet ordre social ;
l’émergence et la diffusion sur les campus états-unien de « contre-modèles » de rapport au(x) savoir(s) ;
la portée, aux Etats-Unis et dans le monde, de formes endogènes de contestation des « modèles » universitaires, qu’il s’agisse, par exemple, des débats autour des frontières disciplinaires ou des « Canon Wars » ;
l’exportation de la marque « université américaine » et la diffusion planétaire d’un « modèle » universitaire « made in USA », très largement fantasmé ;
les réactions, complexes et passionnées, dans le milieu universitaire français, par rapport à ce soi-disant « modèle américain », tels que les récents débats sur les MOOCs (« Massive Open On-line Courses »), présentés comme nouveau « modèle » de transmission du/des savoirs, ont pu les réactualiser ;
la célébration, mondialement médiatisée, de la fin du « modèle Université », par exemple par le mouvement « Uncollege » qui, dans son manifeste (dont l’épigraphe initiale est une citation de Mark Twain), en appelle à la « déviance académique » et à l’avènement d’une nouvelle génération de « hackademics ».

Propositions à envoyer avant le 20 décembre à François Cusset: (françoisqc@free.fr) , Thierry Labica (thierry.labica@yahoo.fr) et Véronique Rauline (veronique.rauline@wanadoo.fr ).

The Universtity in the United States: models, conter-models, meta-models

François Cusset, Thierry Labica, Véronique Rauline
« Culture / cultures », EA370

This workshop will consider the general theme of the 2014 AFEA Conference from the perspective of the University in the United States. All proposals aiming at developing an analysis on the notion of « model » anchored in American Academia will be examined. The proposals may relate to any of the fields covered by American studies and, for instance, question:
– the notion of « model » in relation to the original ambivalence of the university system in the United States towards their immediate or more distant historical references in the old academic world;
– the university system in the United States as a counter-model, emancipating itself, at least partially, from the European –especially German and British– models;
– the regulating dimension of the academic institution in the United States, an instrument to reproduce a specific model of social integration and, through thirty years of neoliberal « shcock therapy », to produce and reinforce the new social order;
– the emergence and dissemination on American campuses of counter-models of production and transmission of knowledge;
– the extent to which existing models such as literary canons or disciplinary paradigms are challenged and contested from within, in the American but also larger global academic scene;
– the exportation of the trademark « American University » and the worldwide imposition of a largely fantasized university model Made in USA;
– the complex and passionate reactions among French academics to this so-called « American model », as exemplified, for instance, by the recent debate in France over MOOCs, presented as a new model of knowledge transmission;
– the global celebration of the end of any type of « University model », for instance by the « Uncollege » movement which, in its manifesto –whose epigraph is a quotation by Mark Twain–calls for « academic deviance » and for the advent of a new generation of « hackademics ».

Contact : François Cusset, Thierry Labica, Véronique Rauline

15. “The Bonded/Resistant Slave Body and the Emergence of Neoliberalism in the U.S. Context”
Ashley Byock, English Department, Edgewood College

In his lectures of the 1970s at the Collège de France, Foucault theorizes that the modern state purports to defend the security of the populace through an exclusion of those imagined to threaten it. Positing the populace as the new figure of sovereignty, the neoliberal state puts itself forward as the model of democracy and equality. Foucault’s analysis centers on the shift in European states from the monarchic sovereign to the populace-as-sovereign, but how does the North American context intersect with this model of the evolution in Western culture from a juridical to a disciplinary to a security-centered socio-political structure?
Much earlier than Emerson’s assertion of a uniquely American voice speaking for a distinctive American culture, culture imagined itself to be exceptional as the seat of true equality and democracy. This vision of American Liberty defined itself in contradistinction to a Europe imagined to be weighted down by traditionalism and outmoded hierarchies. At the same time, far more than in the European context, U.S. Ways of imagining liberty were always undergirded by the logic of neoliberalism so that individual freedom was always effectively enmeshed with the primacy of the “free market”. According to this logic, identity can be consumed.
This panel proposes to argue that in order for the antebellum U.S. Culture to conceive of itself as a model democracy, the scandal of slavery had to be imaginatively resolved and its inconsistency with the logic of universal inherent rights covered over. In order to look closely at how security has become the dominant Western mode in the U.S. Context, the distinctiveness of the U.S. Context must be disentangled from its purported exceptionalism.
If the American conceptualization of freedom equated liberty with the neoliberal model, how does slavery fit in there?
This panel invites contributions that address the question: How can an examination of slavery and its aftermath help us to understand this internal contradiction? How did the emergence of neoliberal thinking naturalize human bondage, and how did certain individuals and group challenge this contradiction?
This panel is particularly interested in how figurations and representations of the slave body came into play. We welcome diverse perspectives and approaches to this questions.
Please send proposals to Ashley Byock before December 20, 2013.

16. “Creative Disruption”: Quand la gauche conteste l’exceptionnalisme américain – Creative Disruption: How the Left Challenges American Exceptionalism
Ambre Ivol (Université de Nantes), Jean-Baptiste Velut (Université Paris 3)

“Pourquoi n’y a t-il pas de socialisme aux Etats-Unis?” Une telle question a nourri, de façon récurrente, les débats sur l’exceptionnalisme américain. Certains ont considéré que la réponse relève de l’abondance matérielle (Sombart), d’autres ont argué de l’absence de conflit de classe (Hartz), d’autres encore évoquent les divisions dues à la question raciale (Morone, Marable) ou aux tendances conservatrices au sein du mouvement ouvrier (Aronowitz). Si ces diverses interprétations comportent des éléments pertinents, elles impliquent néanmoins aussi la perpétuation d’un mode narratif exceptionnaliste qui tend à effacer, voire à déconsidérer, les effets des mouvements progressistes aux Etats-Unis. A ce titre, l’utilisation du terme “L’autre Amérique” par les medias français est un indice supplémentaire de la marginalisation des politiques de gauche dans les représentations classiques du pays. Pourtant, comme l’ont montré certains historiens (Zinn, Kazin) et sociologues (Piven, Aronowitz), la contestation sociale a, historiquement, influé sur ce qui est désormais considéré comme le “modèle” politique et culturel des Etats-Unis. L’inscription des modes militants de ces “rêveurs” se décline tant au rythme des pics contestataires (New Deal, longue décennie des années 1960) que sur le temps long de l’histoire du pays. A ce titre, celle-ci se déploie également en dehors, voire en deçà, du champ politique national.

Cet atelier propose d’explorer comment les mouvements de gauche ont élaboré et continuent de développer des visions du monde ou contre-modèles visant à contester ou se réapproprier certaines notions considérées comme propres à l’exceptionnalisme américain – soit en se revendiquant des idéaux des pères fondateurs (Hall), en redéfinissant les contours du nationalisme (Hall, Hutchins) ou encore en capitalisant sur l’esprit entrepreneurial américain dans le but de perturber les sphères commerciale, politique et culturelle.
Notre objectif est d’étudier dans quelle mesure l’action contestataire est inhérente aux cycles de crise et de renouveau de la société américaine. L’atelier s’emploiera à éclairer de telles dynamiques, ayant trait par exemple aux interactions entre personnes ou groupes militants, aux oppositions entre les mouvements et leurs opposants (contre-mouvements) ou encore aux processus par lesquels les idéaux de gauche sont acceptés, rejetés, transformés mais aussi cooptés pour être intégrés aux instances institutionnelles.
Les contributions à vocation comparatiste ou croisée (mettant en regard, par exemple, la social-démocratie américaine et les expériences de l’Etat-providence en Europe ou présentant, au-delà des Etats-Unis, le mouvement altermondialiste dans son contexte international) seront également bienvenues. A ce titre, les propositions pourront interroger les ressorts internationaux de la contestation sociale pour faire ressortir les spécificités culturelles des tentatives de “tiers-parti” dans un pays où l’influence électorale continue de représenter un obstacle majeur à l’efficacité et au pragmatisme organisationnels de la gauche.
Nous sommes particulièrement intéressés par les mouvements sociaux contestant le capitalisme et la politique étrangère aux Etats-Unis ; cependant les propositions relevant d’autres formes oppositionnelles (infra)politiques pourront également trouver leur place dans cet atelier.
Merci d’envoyer vos suggestions Ambre Ivol, université de Nantes et Jean-Baptiste Velut avant le 20 décembre 2013.

Creative Disruption: How the Left Challenges American Exceptionalism
Ambre Ivol, université de Nantes et Jean-Baptiste Velut, Université Paris 3

“Why is there no socialism in America?” This question has long nurtured debates on American exceptionalism. Some argued that the answer lies in material abundance or “roast beef and apple pie” (Sombart); others famously – or notoriously – highlighted the putative absence of class conflict (Hartz); yet others pointed to the legacy of racial divisions (Morone, Marable) or the conservative trends within the labor movement (Aronowitz). Regardless of their respective pertinence, these interpretations tend to perpetuate an exceptionalist narrative that overshadows, if not simply dismisses the legacy of American progressive movements. The very use of the term “L’Autre Amérique” (The Other America) in the French media is indicative of the marginalization of progressive politics in common representations of the United States. Yet, as social historians (Zinn, Kazin) and sociologists (Piven, Aronowitz) have shown, leftwing movements have not only challenged but also considerably shaped what is today considered as the American political and cultural “model”. This legacy is not confined to the New Deal or the 1960s. Under the radar of national politics, between prominent cycles of contention, American “dreamers” have contributed to transform politics and culture.
This panel seeks to explore how leftwing movements developed and continue to develop alternative worldviews or counter-models in order to challenge or re-appropriate common notions of American exceptionalism – be it by reclaiming the Founding Fathers’ ideals (Hall), by redefining the contours of nationalism (Hall, Hutchins) or by capitalizing on America’s entrepreneurial spirit to disrupt the business, cultural and political spheres.
Our purpose is to show that disruptive action is inherent to the crisis and renewal of American society. We invite contributions that will shed light on the dynamics of contention, e.g. the interactions among advocacy groups and individual activists, the clashes between movements and “counter-movements”, the processes by which radical ideas are accepted, rejected, transformed or co-opted by mainstream politics.
We also encourage contributions addressing the limits of the exceptionalist framework through a comparative lens (e.g. US social democracy and its European counterparts; the Global Justice movement in the US and beyond, etc.). For instance, proposals may focus on the international politics of the US Left so as to bring out the cultural specificities of Third Party politics in a country where electoral influence has constituted a major impediment to institutional efficiency and pragmatic politics.
We are particularly interested in movements challenging American capitalism and US foreign policy although we will certainly consider contributions focusing on other political or infrapolitical forms of contentious action.
Proposals should be sent to Ambre Ivol, université de Nantes et Jean-Baptiste Velut Université Paris 3 and

17. Traverser l’Atlantique : La circulation des discours et des dispositifs d’action publique entre l’Europe et les États-Unis – Bridging the Atlantic: The Circulation of Public Policy and Discourse between Europe and America

Elisa Chelle (IEP Grenoble) et Gilles Chrsitoph (ENS Lyon)

Bien qu’enracinée de part en part dans des idées européennes, la nation américaine s’est construite sur l’ambition de rompre radicalement avec le « vieux continent ». Depuis lors, l’« exceptionnalisme américain » se donne à voir comme mythe fondateur de ses institutions et de sa culture politique. Dans le domaine des politiques publiques, comme dans d’autres domaines, l’Europe demeure un modèle et un contre-modèle pour les États-Unis, tout comme les États-Unis sont devenus un modèle et un contre-modèle pour l’Europe. L’attitude des Américains à l’égard du modèle social européen constitue un exemple de choix. Alors que les libéraux tournent en dérision le marché du travail européen, dont la rigidité passe pour la source d’un fort taux de chômage et d’une faible croissance, les forces progressistes voient dans l’État providence européen une source d’inspiration. Inversement, si le capitalisme américain a suscité une forme d’admiration pour son dynamisme économique, celle-ci est émoussée par les conséquences délétères de ce dynamisme pour le lien social aux États-Unis. À l’évidence, bien que la politique économique américaine ait fait des émules en Europe, les mesures fiscales et sociales n’ont fait qu’accroître les inégalités qui y règnent. La tardive et difficile adoption d’une couverture santé « universelle » a cependant démontré une volonté politique de résorber les effets d’une société individualiste et communautaire.
Cet atelier se propose d’examiner la relation complexe qui lie les États-Unis à l’Europe dans le large domaine des politiques publiques à travers le double prisme des transferts de politiques et de la circulation des discours. Par le biais des processus de transferts de politiques, les États-Unis ont importé les zones d’entreprises depuis le Royaume-Uni et exporté le crédit d’impôt en France, entre autres exemples. Qu’elles finissent par être adoptées ou non, les politiques publiques voyagent également de part et d’autre de l’Atlantique sous forme de discours. Les nouveaux économistes parisiens ont ainsi ouvert la France des années 1970 aux idées des anarcho-capitalistes américains, qui ont théorisé une société libérée du joug de l’État dans laquelle l’ensemble des problèmes sociaux seraient redevables d’une solution économique. En retour, l’appel lancé par Henri Lefebvre en 1968 en faveur d’une vie urbaine véritablement participative a suscité la prolifération à travers les États-Unis d’organisations promouvant le droit à la ville.
Les communications proposées dans le cadre de cet atelier pourront s’intéresser aux processus de transferts de politiques et à la circulation des discours entre les États-Unis et l’Europe, ainsi qu’au rôle joué dans ces processus et dans cette circulation par les experts, les militants et les think tanks, qui participent à la fois du monde de l’expertise et du militantisme.
Les propositions de communication devront être adressées à Élisa Chelle et Gilles Christoph avant le 20 décembre.

Bridging the Atlantic: The Circulation of Public Policy and Discourse between Europe and America
Elisa Chelle (IEP Grenoble) et Gilles Christoph (ENS Lyon)

Though built from European ideas through and through, the American nation was founded on the ambition to break radically from the “old continent”, giving rise to “American exceptionalism” as a defining myth for political institutions and culture. In public policy, as in many other areas, Europe was and remains a model and counter-model for America, just as America has become a model and counter-model for Europe. The attitudes of Americans to the European social model are a case in point. While free-market advocates deride Europe’s rigidified labor markets as the source of the continent’s high unemployment and slow growth, progressives envy the comprehensive welfare system of the core European states. Another case in point are the attitudes of Europeans toward American capitalism, the admiration for America’s economic dynamism being mitigated by the wariness of the strain such dynamism imposes on the country’s social fabric. Indeed, if American economic policy has long been a source of emulation for European policymakers, social and fiscal policy has dug the trenches of a deeply unequal society. The late and difficult adoption of a “universal” health coverage (Patient Protection and Affordable Care Act) demonstrated some political interest in curbing the scope of an individualistic and communitarian society.
This workshop offers to explore the complicated relationship between America and Europe in the broad field of socio-economic policy via two main avenues, that of policy transfers and that of discursive representations. Through the policy transfer process, the United States have imported enterprise zones from the United Kingdom and exported the negative income tax to France, among countless similar instances. Irrespective of whether they ultimately make it to the political agenda, policy initiatives also flow back and forth across the Atlantic as discursive representations. For example, the 1970s Parisian “nouveaux économistes” were drawn to the American anarcho-capitalist ideal of a polity freed from any kind of governmental organization, where all social problems could be taken care of by market solutions, and conversely Henri Lefebvre’s 1968 demand for a genuinely participatory urban life has spurred the proliferation of “right to the city” organizations throughout America.
Papers will be welcome that offer insights into the process of policy transfer and the flow of discursive representations between the United States and Europe and into the role played in these processes and flows by experts and activists as well as by think tanks, which straddle the world of expertise and activism. Abstracts should be sent to Élisa Chelleand Gilles Christophe before December 20.

18. « La construction de modèles politiques alternatifs au libéralisme de la Guerre froide»
Anne OLIVIER-MELLIOS, Université Lumière Lyon 2 Soraya GUÉNIFI, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3

La période d’après-guerre aux États-Unis redéfinit les clivages politiques et idéologiques. La prééminence du modèle de Guerre froide redessine sensiblement les contours du libéralisme américain en évacuant toute référence à l’expérience de l’ ‘ancienne gauche’ (Old Left) des années 1930, au profit d’une réflexion politique marquée notamment par l’anticommunisme, ainsi que par les théories de l’équilibre tel le Centre Vital (Vital Center) développé par Arthur Schlesinger. Avec l’installation de nombreux intellectuels libéraux comme les fameux « New York Jewish Intellectuals » au sein des centres institutionnels (universités, médias, gouvernement), ce modèle d’évolution politique s’impose comme une forme de realpolitik en réponse au clivage est-ouest. Pour de nombreux observateurs de la gauche américaine, le modèle idéologique et politique qu’offre le libéralisme de la Guerre froide (Cold War liberalism) permet donc de décrire fidèlement plus d’une décennie de consensus et de conformisme.
Cependant, dans la recherche d’une appréciation plus nuancée, d’autres courants historiographiques ont périodiquement émis l’hypothèse selon laquelle les années 1950 offraient également un cadre de réflexion politique libéral alternatif, en continuité avec les idéaux de justice sociale célébrés par la Old Left, et comme antichambre de la contestation de la Nouvelle Gauche des années 1960. En effet, rejetant l’opposition est-ouest comme paradigme idéologique et combattant la chasse aux sorcières comme manifestation nationale de cette doctrine, de nombreux intellectuels et activistes américains travaillèrent à construire un modèle alternatif basé sur l’entente internationale et la liberté d’expression. Les artisans de cette rhétorique alternative se trouvent non seulement chez les fondateurs de l’école révisionniste (C. Wright Mills, William Appleman Williams), mais aussi dans l’expérience organisationnelle pacifiste, anti-nucléaire et même anti-ségrégation (rappelons que de nombreuses associations pour la promotion de l’égalité raciale étaient la cible des chasseurs des sorcières), ainsi que dans la presse de gauche (I.F. Stone’s Weekly, Monthly Review, National Guardian).
Cet atelier vise donc à mettre en évidence la construction par des intellectuels, activistes ou même artistes de modèles alternatifs à la rhétorique de la Guerre froide chez les progressistes américains. Il s’agit d’y questionner les différentes approches visant à modéliser le champ politique et historiographique afin d’y réintroduire des figures et mouvements progressistes marginalisés et de reconstruire la réalité politique et idéologique d’une période de transformation du libéralisme aux Etats-Unis.
Merci d’envoyer vos propositions avant le 20 décembre.

19. Nouvelles technologies de l’information et de la communication et reconfiguration des relations d’emploi – The new information and communication technologies and the restructuring of employment relationships
Olivier Frayssé, Université Paris 4 et Eliza Koechlin,

Il n’est pas exagéré de dire que les États-Unis ont été à l’origine de la dissémination / exportation de trois régimes ou modèles de travail au cours du « siècle américain ».
Le premier est l’embrigadement des ouvriers attachés à la machine sur la ligne de montage : le Fordisme. Les idéologies véhiculées étaient alors la maximisation de la production par l’utilisation de la technologie et le rationalisme scientifique.
Le second fut le compromis social issu du New Deal et recadré par la loi Taft-Hartley, que l’école française de la régulation a également baptisé Fordisme. Ses slogans idéologiques étaient la négociation, l’équilibre et le compromis. Le troisième modèle, dit « néo-libéral », intègre le paradigme du télétravail (travail virtuel) et du « capitalisme numérique » ainsi que la dynamique de la mondialisation. Les maîtres mots à présent sont liberté, flexibilité et le gouvernement par le marché.
Les contributions pourront porter sur tous les sujets liés à cette problématique, formation des régimes/modèles, expansion, réception à l’étranger. Les approches historiques, géographiques, sociologiques, économiques sont les bienvenues. Le corpus peut inclure les médias, la littérature et le cinéma.
Les propositions de communication (400 mots) sont à envoyer à Olivier Frayssé et Elisabeth Koechlin avant le 20 décembre.

The new information and communication technologies and the restructuring of employment relationships
Olivier Frayssé, Université Paris 4 et Eliza Koechlin

The United States may rightly be said to have been at the origin of the dissemination / exportation of three work regimes or models over “the American century”:
The first work regime was the regimentation of workers bound to the machine on the assembly line known as Fordism. Its ideological underpinnings were the maximization of production, science and rationality. The second was the social compromise between Capital and Labor born of the New Deal and recast by the Taft-Hartley Act, which the French school of regulation also called Fordism. It was founded on regulation, balance and compromise in industrial relations. The third one is the current “neo-liberal” model that incorporates the paradigm of “virtual work” and “digital capitalism” as well as the dynamic of globalization. Freedom, flexibility and market-driven management have become the main tenets of this new creed.
Contributions are welcomed on any and all related subjects, including formation, ideological justification, expansion and reception abroad. These may be based on historical, sociological, geographical and/or economic approaches. The corpus can be extended to include the media, literature and cinema.
Proposals (400 words) are to be sent to Olivier Frayssé and Elisabeth Koechlin by December 20.

20. Culture rebelle ou modèle ? Le populaire et ses genres, entre défi aux conventions et établissement de nouvelles normes. – “Challenging Conventions or Establishing New Norms? The Use of Genres in US Popular Culture.”

Elsa Grassy, Université de Strasbourg & John Dean, Université de Versailles:

La culture américaine populaire use et abuse des genres, et semble reposer sur un mécanisme perpétuel de subversion et de construction de normes, a priori opposé au concept même de « populaire ».
Il s’agira lors de cet atelier, dans le cadre du thème général du congrès, « Les Etats-Unis, modèles, contre-modèles… fin des modèles ? » de réfléchir au rôle de la culture populaire dans l’économie des modèles culturels, notamment par un examen du statut de ses genres, et de la façon dont ils ont été utilisés, dépassés ou remplacés aux XXe et XXIe siècles.
Une des questions centrales que nous poserons est le rapport entre les conventions et la créativité. Les exigences des genres ont-elles permis à la culture populaire de se renouveler et de se sophistiquer, ou bien l’ont-elles enfermée dans des schémas connus, et amenée ainsi vers une répétition et donc appauvrissement intellectuel et créatif ?
Comme en témoigne la bibliographie constituée pour cet atelier, poser la question du genre dans la culture populaire peut paraître témoigner du même manque d’imagination : le sujet a déjà maintes fois été analysé. Nous inviterons les participants à cet atelier à l’explorer sous l’angle de la définition même du populaire et de ses rapports avec le conformisme. Alors que le populaire offre une alternative aux règles et aux conventions de la culture savante, il possède ses propres codes, qu’on peut briser et subvertir. Le populaire lance-t-il un défi à l’orthodoxie de la culture instituée, ou bien ne peut-il proposer qu’un autre type de conformité ? Musique, mode, BD, littérature pulp, films de super-héros, sport… il n’est pas un domaine populaire qui ne connaisse l’opposition entre le mainstream et l’underground, entre le populaire quantitatif qui remporte l’adhésion du plus grand nombre, et la marge alternative qui se définit par opposition à la masse. La norme du plus grand nombre est subvertie, pour créer une nouvelle norme, qu’un nouveau mouvement viendra bientôt renverser. Les genres du populaire lui apportent ainsi une structure autant que des occasions de la renverser.
Il se pourrait alors que, bien que les genres et leurs conventions semblent a priori s’opposer à l’esprit de liberté et d’accessibilité du populaire, ils participent en réalité à la simplicité et à l’immédiateté qui caractérisent ce domaine culturel. Les genres fournissent au public une satisfaction supplémentaire par la reconnaissance de conventions, de personnages-types, de ressorts dramatiques – satisfaction qui peut à tout moment glisser vers la saturation ou l’ennui.
Nous aborderons également la question de l’origine : la culture populaire américaine a-t-elle hérité ses genres des traditions dans lesquelles elle puise son inspiration ? Les a-t-elle modifiés, et comment ? Des folklores scandinave, germanique, celte et anglo-saxon, en passant par les mythologies européennes, asiatiques et moyen-orientales et la Bible, la culture populaire américaine s’est enrichie de traditions narratives qui lui ont fourni forme et fond. Nous apercevrons ainsi aussi peut-être comment les genres populaires reflètent cet héritage et le fait que « l’histoire des États-Unis est celle de l’interaction entre la culture de la Vieille Europe et l’environnement d’un Nouveau Monde, c’est-à-dire celle d’une modification précoce de la culture par l’environnement, et de la modification consécutive de l’environnement par cette culture » (Nevins & Commager; Pocket History of the US).
Nous laissons le choix aux participants : film, musique, littérature pulp, polars, modes vestimentaires, sport, jouets, argot, jeunesse, seniors, crime organisé, classes moyennes des banlieues, à l’échelle fédérale ou des Etats, lecteurs, auditeurs, internautes… quels que soient le public et le médium visés, le genre, en tant que modèle, contre-modèle, aspirant à la fin des modèles ( ?) conduira nécessairement à poser des questions essentielles sur le fonctionnement de la culture populaire américaine.
Les propositions de communication de 300 mots maximum, ainsi qu’une courte biographie, sont à envoyer à John Dean) et Elsa Grassy avant le 20 décembre 2013.

“Challenging Conventions or Establishing New Norms? The Use of Genres in US Popular Culture.”

They are used and abused. Supported and subverted. Genres are the basic models and slippery building blocks that shape all US popular culture.
With particular regard to “The USA: Models, Counter-models, the End of Models,” our inquiry addresses the issue of how American popular culture genres have been used, surpassed, or replaced in the 20th- and 21st-centuries’ global gallery of popular culture. Consider the creative tension. Do genres provide the supple rules by which the popular culture of all mass media achieves freedom of expression? Or are popular culture genres cumbersome molds more than they are means?
The critical mass of genre study in popular culture is immense (see brief bibliography below). But, among others, a list would easily include: Adorno, Aristotle, Benjamin, Frye, Bakhtin, Chandler, Eco, Barthes, Jameson, King, Lyotard, Calwetti, and others.
While the popular offers an alternative to the rules and conventions of high culture, it does have its own codes that one can challenge and break. Beyond the multitude of popular genres – from music to fashion, from comic book genres to pulp literature, superhero movies and sports – the rift between the popular mainstream and the subcultural underground is evidence to the fact that norms structure the popular as much as they muddle it.
Could it be that while genre conventions seem at first to be at odds with the popular ethos, they might in fact add to the attractiveness and straightforwardness of popular culture. Are genre conventions the key to why audiences find popular culture so satisfying? Or – alternatively – superficial? Plus, how do popular genres facilitate repetition and continuity for both producer and receiver? How do they effect reciprocity, provide a given social construct, stabilize personal and national identity?
We invite participants in this workshop session to question the relation between popular culture and conformity. Does the popular challenge high culture’s orthodoxy because it doesn’t like rules, or does it create another set of conventions — however funkier? Does this go beyond genre conventions? It seems that one of the dynamics of the popular is the tension between a mainstream and an underground set of genres – both successful in their own way – that edge each other on. While the mainstream popular culture flourishes in a more quantitative, conservative, comforting way, the underground exists in a more qualitative, subversive way that is in-your-face and rebellious.
Then there’s the question of sources. Where do genre models come from? Consider how Europe and the Mediterranean, Scandinavian, Germanic, and “Anglo-Saxon” legends, the Judeo-Christian Bible, mythologies of the Near and Middle East, routes and roots which extent to the Far East, and indigenous US popular culture models have each generated form and meaning. Isn’t here the way to a wealth of inquiries? Specially since the “story of America is the story of the interaction of an Old World culture & a New World environment – the early modification of the culture by environment, and the subsequent modification of the environment by the culture” (Nevins & Commager; Pocket History of the US).
Choose any popular medium or consumer group — from dolls to movies, clothing styles to spoken slang, youth culture through geriatric clusters, thug-headed organized criminals through suburban simpletons, the fandom of sports or adherents of detective fiction, the US audience regional or nation-wide in its relation to listenership, viewership, readership or digital web traffic — and the model of genres is essential to understanding why a particular expression of popular culture works or not.
Send your proposals (300 words + a short biography) to both John Dean and Elsa Grassy before December 20, 2012.

21. “Quel futur modèle pour l’Amérique politique: destiné manifestement partisane ou union réinventée? What future model for political America: manifestly gridlocked destiny or reinvented union?
Jérôme Noirot, Ecole Centrale, Lyon
Depuis la mise en oeuvre du New Deal sous Franklin Delano Roosevelt et l’opposition subséquente de Barry Goldwater et de Ronald Reagan à l’élargissement du rôle de l’Etat qui a résulté de cette politique, deux modèles distincts de la société américaine semblent se faire face au point de générer des blocages politiques et législatifs considérés comme néfastes pour la prospérité du pays. Cette confrontation repose sur les réponses prétendument antinomiques que les deux modèles apportent à deux questions philosophiques et politiques essentielles : quelles doivent être la nature du contrat social américain et la répartition appropriée des responsabilités individuelles, sociales et politiques ? Par ailleurs, quel doit être le rôle de la Constitution et, plus généralement, de la tradition judéo-chrétienne dans la codification de cette répartition ?
D’un côté, se trouve le modèle conçu par les Pères Fondateurs de la nation à la fin du 18ème siècle. Ce modèle reflète l’idée selon laquelle l’individu est, du simple fait de sa nature, doté des droits inaliénables notamment définis dans la Déclaration d’Indépendance. Dans le but de protéger ces droits et d’éviter « la guerre de tous contre tous » redoutée par Thomas Hobbes, les individus sont amenés à s’associer. Telle est la dynamique du contrat social qui donne finalement naissance à l’Etat, dont le rôle consiste alors essentiellement à favoriser l’exercice serein des droits individuels. Toutefois, en raison de ce qui est analysé comme la dépravation originelle de la nature humaine, manifestée à travers l’égoïsme et la propension à la domination, la prudence recommande de borner l’exercice du pouvoir politique. C’est donc de la crainte du despotisme que découle le principe de la séparation des pouvoirs. Selon les Pères Fondateurs, l’élaboration d’une constitution écrite devient alors indispensable pour procéder à cette séparation, à la fois horizontalement entre le législatif, l’exécutif, et le judiciaire, et verticalement, entre l’Etat fédéral et les Etats fédérés. Cependant, à lui seul, le document constitutionnel n’est pas en mesure de préserver l’intégrité du contrat social républicain fondé sur le principe de la liberté individuelle. Les Pères fondateurs soulignent, en effet, l’importance de cultiver simultanément, parmi gouvernants et gouvernés, le sens de la vertu, comprise alors comme la capacité morale d’inspiration religieuse de dompter les passions égoïstes dans l’intérêt général.
L’autre modèle du contrat social américain, successivement conçu, complété et partiellement mis en oeuvre par Woodrow Wilson, Franklin Roosevelt, Lyndon Baines Johnson et aujourd’hui Barack Obama, envisage avec optimisme la capacité de l’Etat à relever les défis économiques, sociaux, et sociétaux contemporains. Selon ce schéma de pensée, l’Etat prend des contours plus unitaires que fédéraux et doit pouvoir ainsi systématiquement intervenir afin d’administrer l’égale répartition des avantages du progrès, permettre l’exercice de la liberté individuelle, notamment à travers l’accès universel aux soins et à l’éducation, et adapter la tradition à l’évolution des pratiques courantes. Dans ce cadre, la séparation des pouvoirs élaborée par les Pères Fondateurs est dénoncée comme un carcan désuet. D’où la volonté, sinon de réécrire la Constitution, de faire au moins du texte un instrument souple, vivant et évolutionniste mieux à même de capter les valeurs contemporaines, un concept connu sous le nom de living constitution.
Cet atelier examinera l’ampleur et l’intensité des désaccords politiques, législatifs et juridiques que semblent générer ces deux modèles distincts de la société américaine tant au niveau fédéral qu’à celui des Etats fédérés. En particulier, la question sera posée de savoir si ces désaccords peuvent être le reflet de positionnements partisans plus ou moins artificiels, dictés par la notion d’alternance démocratique, ou s’ils se manifestent comme une sorte de contrepoids à l’unification des pouvoirs exécutif et législatif que l’on peut peut-être détecter depuis la présidence de George W. Bush lorsque l’un des deux partis détient ces pouvoirs simultanément. En d’autres termes, sommes-nous en présence de tensions centrifuges avérées, qu’il conviendra, le cas échéant, d’évaluer et dont il faudra envisager les conséquences à plus long terme, ou existe-t-il encore aujourd’hui aux Etats-Unis un socle culturel commun, dont les communicants s’efforceront alors de définir le contenu et les potentialités ? Si la survie des nations repose sur la dynamique du renouveau perpétuel, l’atelier se demandera si le renouveau américain peut passer par l’élaboration d’une synthèse entre d’une part, l’innovation, et d’autre part, la réactualisation de principes ancestraux.

What future model for political America: manifestly gridlocked destiny or reinvented union?
Conventional wisdom has it that ever since New Deal policies were first carried out and fuelled conservative opposition to the growth of government, two increasingly distinct visions of American society have vied for public support and moved the nation closer to political gridlock with potentially dire economic consequences. The gap between these two visions is said to originate in the seemingly irreconcilable answers which they give to two basic philosophical and political questions: first, what are respectively the proper limits of government and individual freedom? Second, what role should the Constitution, and more generally the country’s Judeo-Christian heritage, play in marking out those limits?
On one side is the vision of the Founding Fathers who designed a system of government focusing on the primacy of inalienable individual rights particularly as defined in the Declaration of Independence. From this perspective, the need to protect such rights and obviate any risk of a “war of all against all” mechanically brings individuals together and societies into existence. That in turn leads to the creation of government whose role consists essentially in promoting the peaceful exercise of individual rights and freedoms. However because of the fallen condition of human nature as reflected in selfishness and the lust for domination, limits must be set to political power. It is therefore to neutralize the threat of tyranny that separation of power came to be adopted as a guiding principle by the Founding Fathers. The Founders regarded a written constitution as the essential tool to codify that separation both horizontally between the legislative, the executive and the judiciary, and vertically between the federal government and the States. Yet such a constitution could not on its own guarantee the success of a republican form of government based on the consistent exercise of individual freedom. The Founding Fathers therefore stressed the need to foster durably, both among the governed and their elected representatives, the notion of virtue described as the religiously-inspired moral ability to tame selfish impulses for the common good.
The opposing vision of American society has successively been conceived and partly implemented by Woodrow Wilson, Franklin Delano Roosevelt, Lyndon Baines Johnson, and today Barack Obama. It is based on a more optimistic view of government’s ability to craft solutions to contemporary social and economic issues. Consequently, less divided government may well be needed to share out the country’s wealth more equitably, allow the exercise of individual freedom more fully particularly through universal access to health care and education, and adjust tradition to changing lifestyles. Seen from this perspective, the Constitution is dismissed as both obsolete and a political, social, and economic straitjacket that needs to be made more “living”, flexible, and inclusive to reflect society’s constantly changing norms.
The aim of this panel is to examine the actual scope and depth of the increasingly strident political, legislative, and judicial strifes that the two visions of American society seem to be generating both at the federal level and within the States. More particularly, the panel will look into whether such strifes reflect artificially partisan positioning naturally dictated by the rules of democratic electioneering, or whether they act as a check on the growing unification of the executive and legislative branches that may have been developing since the presidency of George W. Bush whenever either party has held the two branches simultaneously. In other words, is American society hopeless riven by divergent philosophical and political views of its nature and function, or is there still enough common ground for the American people to shape their country’s destiny consensually? If the survival of nations does depend on constant renewal, the panel will test the proposition that American renewal may ultimately rest on a combination of innovation and tradition in yet another rendition of E Pluribus Unum.

Merci d’envoyer vos propostitions à Jérôme Noirot avant le 20 décembre.

22. Race-consciousness v. colorblindness : two competing models
Olivier Richomme, Université Lyon 2.

Since the minority rights revolution of the 1960’s, the US has implemented race-conscious public policies in order to reform its institutions and eradicate racial discrimination. In spite of the undeniable results they produced these policies have been highly controversial. From a pratical standpoint opponents argue that they are imperfect tools that are too divisive and need to be temporary. But maybe more importantly, from a phylosophical standpoint they argue that these policies do nothing to eliminate racism, quite the contrary. They contend that taking race into account to fight racism actually amounts to the reification of race and undermines the meritocratic ideal. Scociologists and political scientists in many countries have been discussing these two rival models for decades and have tried to determine the better approach to reach race equality. And in this international discussion, the US has often been used as a model or a countermodel.
This workshop proposes to analyse the political and cultural clash between the race-conscious and colordblind models in a comparative approach or in one centered solely on the US. For exemple one could discuss the role the US plays in other countries as a model or a countermodel in the debates about the implementation of anti-discrimination public policies. But because the american system is often used as a caricature by proponents and opponents alike, it could also be useful for our workshop to focus on the US and the ways in which this issue divides the country and often cuts across party lines and ethno-racial affiliations. Indeed a more detailed analysis of the debate around race and equality in the US through the political instrumentalisation, the tortuous jurisprudence or the opaque implementation of race-conscious public policies (affirmative action policies in jobs recruitment and university enrollment, busing of school children and eletoral redistricting…) would allow us to highlight how this figth between these two models has defined the political and cultural landscape of the last half century.

Proposals to be sent to Olivier Richomme by December 20.

23. Les Etats-Unis : modèle ou contre-modèle écologique ? – Is the US an Environmental Example or Counter-Example?

Gelareh Djahansouz-Yvard (Université d’Angers)
La politique de l’environnement s’enracine au coeur de la culture américaine. Le respect de la terre et de ses ressources fait partie des mythes fondateurs américains. Le mouvement écologique de la deuxième moitié du 20ème siècle trouve ses origines à la fin du dix-neuvième et au début du vingtième siècle, époque à laquelle les actions concernaient la protection des terres du domaine public. Les Américains ont été parmi les premiers à agir en matière d’environnement, préservant d’abord les terres, puis étendant cette action, un siècle plus tard, à la lutte contre les diverses pollutions. C’est à partir de la deuxième moitié du 20ème siècle avec l’apparition des diverses pollutions, que l’on peut noter une évolution dans la mentalité des Américains et un intérêt véritable pour l’environnement sur tous les plans, ce qui a conduit le gouvernement fédéral à brandir le flambeau de la lutte contre toutes les formes de pollution et à devenir le précurseur du mouvement écologique sur le plan international. Les initiatives écologiques et énergétiques des Etats-Unis ont servi de modèle aux autres pays industrialisés. Mais l’attitude du gouvernement américain et son rôle dominant dans la communauté internationale en tant que modèle écologique ont évolué depuis les trente dernières années, les intérêts économiques passant en premier, bien avant les préoccupations écologiques. Si certains états, comme la Californie, peuvent faire figure de modèle en matière d’environnementalisme, ce n’est pas le cas du gouvernement américain qui a refusé d’assumer son rôle de leader écologique global, en dépit des efforts de l’administration actuelle pour donner l’exemple afin de relancer l’économie verte en promouvant les énergies alternatives et les emplois verts. D’autres pays industrialisés, comme le Canada ou certains membres de l’UE, ont pris de l’avance dans le domaine.
L’objectif de cet atelier est d’analyser les enjeux politiques, économiques, sociaux et idéologiques de l’écologie aux Etats-Unis afin de s’interroger sur l’existence d’un modèle ou contre-modèle américain. Les propositions pourront explorer l’environnementalisme dans l’arène politique américaine aux niveaux local, national, ou international, ainsi que l’impact des partis politiques sur les diverses administrations présidentielles et le Congrès. Pays de contraste et de diversité, on pourra également s’interroger sur l’importance accordée à l’écologie dans la société américaine et dans l’existence quotidienne des Américains aujourd’hui.
Les propositions de communication doivent être adressées à Gelareh Djahansouz-Yvard avant le 20 décembre.

Is the US an Environmental Example or Counter-Example?
Gelareh Djahansouz-Yvard (University of Angers)

Environmentalism is at the heart of American culture. Respect for the land and its resources has always been one of America’s founding myths. The environmental movement of the second half of the 20th century had its roots in the late nineteenth and early twentieth centuries, an era which focused on the protection of public lands. The Americans were among the first to fight in favor of protecting the environment, initially by preserving nature, then a century later, by fighting against various forms of pollution. The Americans changed their approach to the environment in the mid-20th century and a genuine interest for the environment at all levels appeared, which encouraged the federal government to take up the battle against all forms of pollution and assume a leading role in the environmental movement internationally. The ecological and energy initiatives of the US served as examples for other industrialized countries. However the attitude of the U.S. government as an environmental role model has evolved in the last thirty years, as economic concerns have taken precedence over ecological concerns. If some states, such as California, are looked on as environmental models, such is certainly not the case for the US government, which refused to assume a leadership role in global environmentalism, in spite of the present administration’s efforts to set an example to boost the green economy by promoting alternative energies and green jobs. Other industrialized nations, such as Canada or some members of the European Union, have emerged as international environmental leaders.
The aim of this workshop is to analyze the political, economic, social and ideological issues at stake concerning the environment today, in order to understand whether the US can be considered as an environmental example or counter-example for the rest of the world. This workshop welcomes papers dealing with state, federal and global environmental policies, as well the impact of political parties on various presidential administrations and the Congress. The US is a nation of contrast and diversity; therefore papers may also focus on the importance of environmental protection in American society and daily life today.
Proposals for papers should be sent to Gelareh Djahansouz-Yvard by December 20.

24. Le Modèle médiatique américain en question: fondements, mutations, évolutions. – Questioning the US Media Model: Foundations, Changes, Evolutions.
Divina Frau-Meigs, Université Paris 3, Sébastien Mort, Université de Lorraine

Archétype du modèle « libéral nord-atlantique » selon David C. Hallin et Paolo Mancini (Comparing Media Systems: Three Models of Media and Politics, 2004), le système médiatique américain est fondé sur quatre principes qui le distinguent très nettement des modèles médiatiques européens : l’intervention limitée de l’Etat dans la gestion des supports techniques et des contenus, la prépondérance de la diffusion commerciale – apparue très tôt historiquement – et la quasi-absence de diffusion publique, le niveau élevé de professionnalisation des médias d’information rendu possible par l’adhésion à des normes et codes explicitement édictés et ratifiés – dont la « norme d’objectivité » constitue le pilier central –, et l’indépendance par rapport au pouvoir politique, garante à la fois du statut de contrepouvoir des médias et de leur rentabilité financière.
Au cours des dernières décennies, le modèle médiatique américain a toutefois subi des mutations de taille, et ce, sous les effets conjugués de l’évolution technologique – avènement de la télévision câblée à partir des années 1980 et de l’Internet au tournant des années 2000 –, des changements du cadre législatif – abrogation de la Fairness Doctrine en 1987 et passage du Telecommunications Act of 1996 – et de la mondialisation. Le modèle médiatique américain de l’ère numérique est donc bien différent de celui de l’ère hertzienne, et ces changements ne sont pas sans effets sur la façon dont les publics se représentent le monde, sur l’engagement politique ni sur la participation citoyenne.
Cet atelier se propose d’explorer les fondements du système médiatique américain dans le domaine de l’information, ses spécificités, et ses mutations historiques et évolutions récentes. Les communications pourront porter sur les thèmes suivants :

– la déréglementation et ses effets : démultiplication de l’offre, libération de la parole partisane,
– les mutations du journalisme : redéfinition de l’objectivité, crowd-sourcing
– l’info-divertissement,
– l’information en continu,
– les médias alternatifs et leur relation à la citoyenneté,
– le documentaire « à la Michael Moore »
– les nouveaux contrats spectatoriels,
– la segmentation de l’offre et ses effets : polarisation des publics, émergence de communautés à intérêts spécifiques (issue publics)

Ces thèmes ne sont pas limitatifs, ni exclusifs d’autres propositions de communication. Les propositions n’excéderont pas 2 000 signes et devront être envoyées conjointement à Sébastien Mortet Divina Frau-Meigs avant le 20 décembre 2013.

Questioning the US Media Model: Foundations, Changes, Evolutions.
Divina Frau-Meigs, Université Paris 3, Sébastien Mort, Université de Lorraine.

As part of its annual conference on “The USA: Models, Counter-Models, The End of Models?” (May 21st to 24th, 2014), the French Association of American Studies invites participants to a workshop on the US media model entitled “Questioning the US Media Model: Foundations, Changes, Evolutions.”

Defined as archetypal of the “Liberal or North-Atlantic” model by David C. Hallin and Paolo Mancini (Comparing Media Systems: Three Models of Media and Politics, 2004), the US media model is based on four distinctive principles: a limited Government intervention in the regulation of technology and content, the predominance of commercial broadcasting—an early development in the history of US media—and an almost inexistent public broadcasting, a high level of professionalization resulting from journalists’ abiding by explicitly stated and ratified norms and codes—chief among which is the “objectivity norm”—and the very low degree of political parallelism guaranteeing both the status of US media as watchdog and their financial profitability.
Over the past decades, the US media model has undergone significant changes resulting altogether from technological evolutions—the advent of cable television from the 1980s and of the Internet at the turn of the 21st century—changes in the legislative framework—the repeal of the Fairness Doctrine in 1987 and the enactment of the Telecommunications Act of 1996—and globalization. The US media model of the digital era does differ from that of the broadcast era, with considerable effects on how publics cultivate their representations of the world, on political engagement, as well as on citizen agency and participation.
This workshop aims to explore the foundations of the US media model, its specificity, the historical changes it underwent, as well as its recent evolutions. It invites papers addressing, but not limited to, the following topics:
– Deregulation and its effects: infinite media offer, unrestricted partisan discourse
– Changes in journalism: redefinition of objectivity, crowd-sourcing
– Infotainment,
– 24-hour news
– Alternative media and how they relate to citizenship
– Michael Moore style documentaries
– New forms of spectatorial contracts
– Media segmentation and its effects: audience polarization, emergence of issue publics
Abstracts not exceeding 3,000 characters should be sent jointly to Sébastien Mort and Divina Frau-Meigs by 20 December 2013.

25. « Modèle de charité chrétienne » ou nation pluraliste ? L’Amérique comme (contre) modèle religieux – “A Model of Christian Charity” or a Pluralistic Nation? America as a Religious (Counter-) Model

Nathalie Caron (Paris Sorbonne) et Sabine Remanofsky (ENS Lyon)

Parce que l’Amérique a été imaginée dès l’origine la fois comme cité protestante exemplaire – « la cité sur la colline » de John Winthrop – et comme refuge spirituel pour les persécutés d’Europe, elle se pose tour à tour comme modèle de pureté réformée et comme havre de tolérance religieuse. Les colonies auraient en effet été fondées en réaction contre les modèles européens en matière de religion, que ce soit par des puritains désireux de fonder la cité protestante parfaite, ou bien par des Anglais tels le quaker William Penn, soucieux d’établir dans le nouveau monde une terre d’accueil où régnerait la liberté de culte.
Cette lecture d’une Amérique chrétienne tolérante, terre d’asile religieuse, ainsi que la mise en place d’un cadre constitutionnel favorable au foisonnement des différentes dénominations du protestantisme comme des autres religions, explique que les États-Unis soient fréquemment cités comme exemple de pluralisme religieux par des personnalités politiques ou législateurs européens. Les États-Unis constituent également un exemple pour avoir été l’un des premiers pays occidentaux à établir une séparation durable entre Églises et État, en 1791, soit plus de cent ans avant la loi française de 1905.
Modèle de pluralisme et de laïcité précoces, les États-Unis sont souvent aussi perçus comme un contre-modèle de sécularisation, en raison du fort taux de religiosité, ainsi que de l’imbrication du religieux et du politique, telle qu’elle apparaît par exemple lors de moments politiques symboliques forts, comme les serments présidentiels prêtés sur la Bible, ou bien encore telle qu’elle a pu être manifestée par la proximité de certaines personnalités politiques avec des prédicateurs évangéliques en vue comme Billy Graham ou Jerry Falwell.
Les communications de cet atelier pourront s’intéresser à l’exceptionnalisme américain en matière de religion ou encore interroger la notion de « laïcité à l’américaine », dans ses fonctions de modèle et de contre modèle, à la fois pour la France mais aussi pour d’autres pays européens. Les contributions examinant la prégnance culturelle de la religion aux États-Unis et les confusions que le « retard » de la sécularisation occasionne seront également bienvenues. Dans une perspective historique, enfin, on pourra s’intéresser tout autant à la volonté des premiers puritains de fonder la cité religieuse exemplaire qu’aux débats du XIXe siècle concernant l’exemplarité du protestantisme américain par rapport aux catholicisme et protestantisme du vieux continent jugés dévoyés ou trop libéraux, ou encore au modèle religieux incarné par les Etats-Unis pendant la Guerre froide.

“A Model of Christian Charity” or a Pluralistic Nation? America as a Religious (Counter-) Model

Nathalie Caron (Paris Sorbonne) and Sabine Remanofsky (ENS Lyon)

Because America has been perceived as being both, since its origin, a model Protestant land—John Winthrop’s “city upon a hill”—and a spiritual refuge for the persecuted of Europe, the country alternatively appears as a model of reformed purity and a haven of religious tolerance. It is indeed commonly assumed that the American colonies were founded in reaction against European religious models, whether be it by Puritans, desirous of founding the perfect Protestant city or by Englishmen such as the Quaker William Penn, who sought to establish a promised land of religious freedom in the New World.
America’s image as a religious asylum having fostered the proliferation of the various denominations of Protestantism and the emergence of many other religions, together with a particularly favorable constitutional framework, explains why the United States is often viewed as an example of religious pluralism by European politicians or lawmakers. The United States also constitutes an example of early secularism, since the First Amendment established a durable separation between Church and State as early as 1791, more than a hundred years before France’s 1905 law.
A model of pluralism and secularism, the United States is also regarded as a counter-model of secularization, given its high rates of religiosity and also what has been perceived as an excessive intertwining of religion with politics, which transpires during symbolic moments, such as the incumbent president’s oath of office taken on the Bible, or has been evinced by the proximity between politicians and world-famous preachers like Billy Graham or Jerry Falwell.
This panel welcomes papers dealing with American religious exceptionalism and with the specificity of American “laïcité” in its function both as a model and a counter-model for France but also for other European countries. Contributions examining the enduring cultural significance of religion in the United States and the confusions American “backwardness” in terms of secularization engenders will also be welcome. Historically, proposals may address topics as varied as the early Puritans’ plan to establish an exemplary religious city in the New World, the nineteenth-century debates surrounding the exemplarity of American Protestantism as opposed to the Old World’s corrupt or too liberal Protestantism or Catholicism, or the place of the United States as a religious role model during the Cold War.
Les propositions sont à envoyer avant le 20 décembre 2013 à Nathalie Caron et Sabine Remanofsky.

26. Super-héros et modélisation(s) – Superheroes and modelization(s)

Yann Roblou, Université de Valenciennes et Clémentine Tholas, UPEC.
Super-héros et modélisation(s)
Si une grande partie des productions culturelles sont aujourd’hui perçues comme transnationales, il est une composante de la culture populaire du vingtième siècle qui peut être identifiée d’emblée comme particulièrement américaine : les super-héros. Ils demeurent strictement américains pendant plusieurs décennies, s’affirmant comme le parangon de l’identité nationale. Nés dans les Comic Books des années 1930 (Superman, 1938), popularisés par la radio mais surtout par le cinéma et la télévision à partir des années 1970, les super-héros n’ont rien perdu de leur superbe depuis leur création et sont omniprésents sur l’ensemble de la toile médiatique internationale. Qui aurait cru que ces costauds en collant aux noms presque simplistes deviendraient des ambassadeurs privilégiés des idéaux états-unien à travers le monde ?
En effet, les super-héros sur papier, petit écran ou grand écran ont un super-pouvoir inégalé : ils sont fédérateurs, puisqu’ils renvoient à des situations et des valeurs à la fois particulières et universelles. Le secret de cette force d’adhésion tient dans leur capacité à suivre les évolutions de la société américaine ainsi que l’histoire et l’actualité internationale, offrant ainsi une certaine vision du familier et du connu. Ils s’inscrivent dans un maintenant en perpétuel mutation et remportent de fait la même adhésion chez les adolescents et des amateurs plus âgés. Ils illustrent de façon détournée ou directe, l’histoire des sociétés et des échanges internationaux, de la montée du totalitarisme en Europe à la mondialisation, en passant par la guerre froide, la déségrégation, l’égalité sexuelle, l’éclatement de la famille nucléaire, l’essor du communautarisme, la mondialisation, entre autres.
Le caractère protéiforme des aventures de super-héros, lié à l’utilisation de différents formats montre que le genre semble difficilement épuisable. Les super-héros et leur univers arrivent même à inspirer d’autres formes de création dites plus nobles, telles que la littérature (Sylvia Plath, Superman and Paula Brown’s New Snowsuit, 1955, Michael Chandon, The Amazing Adventure of Kavalier and Clay, 2000 ou Marco Mancassola, La Vie sexuelle des super-héros, 2011), ou sont utilisés pour régénérer et réécrire des histoires et des ?uvres classiques (on pense aux deux Sherlock Holmes de Guy Ritchie ou tout simplement à la mythologie grecque et romaine, voire aux Morality Plays). Les super-héros peuvent désormais apparaître comme une sorte de prisme fécond pour la création ou la compréhension qui pourrait décloisonner les formes artistiques et réduire les distances entre les cultures highbrow et lowbrow, même s’ils appartiennent à un système de production extrêmement rentable, basé sur la répétition (sérialité), la multiplication et la consommation (produits dérivés).
Forts de cette capacité de transformation pour toujours coller au moment présent et de cette intertextualité, les super-héros semblent indémodables, unificateurs et constituent donc, au même titre que d’autres créations culturelles, un instrument efficace du soft-power, certes états-unien mais pas exclusivement. Outils de propagande « douce », chère à la diplomatie publique, les super-héros distillent un message discret mais actif aux publics de différentes époques ou de divers lieux. Sous couvert de divertissement et de légèreté, ils peuvent jouer, sans que l’on s’en aperçoive, leur rôle d’agents de promotion d’un système idéologique, politique et économique, tout en offrant par moment une double lecture de l’Amérique à la fois glorifiante et critique. Cette dualité permettrait de promouvoir de façon moins frontale et plus subtile un système social ou de pensée comme modèle à suivre, sans l’imposer lourdement. Par exemple, la représentation du corps masculin peut figurer la puissance nationale et la capacité à convaincre l’autre de sa supériorité, proposant alors un discours sur les échanges internationaux.
Alors que nous sommes en plein dans ce que certains appellent « l’ère moderne » des super-héros, il convient de s’interroger sur l’efficacité de leur système de représentation et la constance de leur force de conviction. S’appuyant sur les dimensions sociales, politiques, économiques mais aussi esthétiques, littéraires ou linguistiques des super-héros sur papier comme à l’écran, les propositions d’intervention pourront se focaliser sur quelques pistes non-exhaustives de réflexion: les super-héros sont-ils purement américains ou sont-ils une réappropriation de modèles culturels (européens) préexistants? Le passage de la bande dessinée à d’autres supports (le cinéma, les dessins animés, les jeux vidéo…) a-t-il entraîné une modification des personnages (situations, enjeux, discours…) modèles? Comment s’articulent des productions plus critiques ou noires comme Mystery Men (1999), The Incredibles (2004), Superhero Movie (2008), Kick-Ass (2010, 2013), Death of a Superhero (2011), All Superheroes Must Die (2011)… dans leur rapport au modèle des superproductions? Quel avenir y a-t-il pour les films de super-héros à Hollywood? Aujourd’hui, les super-héros peuvent-ils toujours servir de modèle(s) pour de la diffusion de systèmes culturels et de valeurs ?
Les propositions sont à envoyer avant le 20 décembre à Yann Roblou, Université de Valenciennes et Clémentine Thola, UPEC.

Superheroes and modelization(s)
A large portion of today’s cultural productions can be perceived as transnational. Yet one component of the popular culture of the twentieth century may be identified as typically American: the superhero. He has remained a strictly American fixture for several decades, be it only because he epitomized national identity. Born in the comic books of the 1930s (Superman, 1938), he became a popular figure through the radio and essentially through television and the movies from the seventies onwards. Since then, he hasn’t lost any of his attraction as his omnipresence on the worldwide media web testifies. Who would have thought those almost simplistic tough guys in tights could become the heralds of American ideals throughout the world?
As a matter of fact, superheroes on the printed page, the small and the silver screens possess an unequaled power: they federate, since they echo at once particular and universal values. The secret behind this capacity for adhesion stems from their being able to be in sync with the evolutions of the American society as well as the current international affairs and history, thus offering a certain perception of the familiar and the known. They are inscribed in the perpetually evolving here and now and so allow a similar type of adhesion from young and old(er) audiences alike. More or less directly they illustrate the history of societies and international exchanges, from the rise of totalitarianism in Europe to globalization, as well as the Cold War, the Civil Rights movement, sexual equality, the end of the nuclear family, the soaring communitarianism, globalization, among other things.
The protean dimension of the superheroes’ adventures, as it is intimately connected to the recourse to different media, seems unlikely to wane. These characters and the universes they induce are even able to inspire other so-called nobler forms of creation. Literature is one of them as Sylvia Plath’s 1955 Paula Brown’s New Snowsuit, Michael Chandon’s The Amazing Adventure of Kavalier and Clay (2000) or Marco Mancassola’s La Vie sexuelle des super-héros (2011) testify. They may also be used to regenerate or rewrite classical stories or works: Guy Ritchie’s two Sherlock Holmes movies, Greek and Roman mythologies or even Morality Plays come to mind. Super-heroes now seem to appear as a pregnant type of prism which could help create, comprehend and thus help to desegregate art forms as well as bring highbrow and lowbrow cultural phenomena closer, all the while bearing in mind these characters belong to a highly profitable system of production based on repetition (serialization), multiplication and consumption (product placement and by-products).
Because of their capacity to transform to be able to keep up with the times and of the intertextuality they promote, superheroes seem impervious to the changes of fashion while preserving, like other cultural creations, unifying traits which make them powerful tools of the principally (but not uniquely) US soft power. As constituents of the “soft” propaganda that is so dear to foreign policy, superheroes distillate a discreet yet active message to audiences in different times and places. Under the guise of light entertainment, they manage to play the undetectable role of agents promoting a political, economic and ideological system, while proposing a two-fold (both critical and glorifying) observation of America. This duality could allow for a less frontal, less heavy-handed promotion of a social system or way of thinking to be emulated. For instance, the representation of the male body may embody both national power and the means to convince the Other of one’s superiority, thus may formulate a discourse on international relations.
As we are in the midst of what is being called the “modern age” of superheroes, it is necessary to ponder over the efficiency of that system of representation and the permanence of its force of persuasion. Paper proposals, while drawing from social, political, economic as well as aesthetic, literary or linguistic dimensions, could focus on some of the following (non exhaustive) avenues of reflection: are superheroes purely American and to what extent are they re-appropriations of pre-existing cultural (European) models? Have the original (model) characters, when passing from one medium (comic books) to another (film, cartoons, animated films, video games…), been modified and if so, to what extent (in terms of situations, discourses, values…)? How is it possible to connect darker or more critical productions – such as Mystery Men (1999), The Incredibles (2004), Superhero Movie (2008), Kick-Ass (2010, 2013), Death of a Superhero (2011) – to the dominant production of blockbusters? What is the future of superhero movies in Hollywood? Can superheroes still serve as models for the diffusion of cultural and value systems nowadays?

Proposals to be sent to Yann Roblou, Université de Valenciennes et Clémentine Thola, UPEC, by December 20.

27. Les séries télévisées américaines : modèles, contre-modèles, fin des modèles – American TV series: Models, Counter-Models, The End of Models?

Anne Crémieux, Université Paris Ouest-Nanterre, Shannon Wells-Lassagne
Même si les Etats-Unis ne sont pas les seuls à produire des séries à succès (on pense aux telenovelas ou aux japanimations), ils dominent très largement le marché mondial. Or les séries américaines proposent, comme l’ensemble de la production audio-visuelle américaine, une représentation le plus souvent en accord avec les valeurs que l’Amérique offre en « modèle ». Parallèlement, elles sont devenues par leur succès un modèle de production, de construction narrative, de diversité et de longévité pour le reste du monde.
Pour autant, ces modèles ne sont pas infaillibles et on notera d’ailleurs que nombre de séries américaines ne sont pas des productions originales mais s’inspirent au contraire de séries de tous horizons, dont l’importation est difficile et que l’on préfère re-produire pour le public américain, comme Queer as Folk ou The Office, venues de Grande-Bretagne, ou Ugly Betty, inspirée de la série colombienne Yo soy Betty, la fea. Que découvre-t-on à l’analyse de ces transfuges ? Quels éléments du modèle doivent être modifiés pour intégrer la production nationale ? La nature sérielle que préfèrent de nombreuses séries télévisées actuelles ne trouve-t-elle pas son modèle dans le roman-feuilleton du dix-neuvième siècle, dans lequel la BBC a d’ailleurs puisé pour créer parmi les mini-séries les plus poignantes de l’histoire de la télévision ? Les séries télévisées américaines n’ont jamais été autant prisées du public, des critiques et depuis relativement peu, des universitaires. Or elles ont acquis leurs lettres de noblesse en abordant des thématiques qui questionnent la démocratie américaine, comme dans Oz ou Breaking Bad. Les héros déprimés de Six Feet Under, The Sopranos ou Deadwood s’opposent par bien des aspects aux valeurs traditionnelles de la société américaine. D’autres héros sadiques ou psychopathes (Hannibal, Dexter) explorent les potentiels narratifs de l’anti-héros, tandis que des séries comme Desperate Housewives, Glee ou Weeds transgressent les codes du soap opera pour offrir une satire des banlieues et du « rêve américain ». Autant de « contre-modèles » qui fascinent les téléspectateurs. La production des séries les plus prestigieuses par des chaînes câblées que sont HBO ou Showtime mais aussi des réseaux internet, comme YouTube, ou des entreprises de vidéo à la demande comme Netflix, libèrent les auteurs de contraintes constitutives des modèles du passé. Ainsi, les limites de la représentation du sexe et de la violence sont sans cesse repoussées (Game of Thrones), les dialogues ne semblent plus censurés (The Wire) et les expérimentations formelles sont légion (24 et ses split-screens qui donnent l’illusion du temps réel, Damages et sa chronologie fragmentée). Peut-on alors parler de « fin des modèles » ou tout du moins, de leur renouvellement infini ?
Les propositions de communication sont à envoyer à Anne Crémieux et Shannon Wells-Lassagne avant le 20 décembre.

American TV series: Models, Counter-Models, The End of Models?
Anne Crémieux, Université de Nanterre, Shannon Wells-Lassagne

The United States may not be the only country to produce successful television series (one has only to think of telenovelas or japanimation), but there is no doubt that it has long dominated the world market. However, like all products of the American film industry, television series present a vision of American values offered as a model to the viewer. Likewise, their success has inspired the rest of the world to follow in their footsteps, causing them to become a model in terms of production, narrative construction, diversity and longevity.
Nonetheless, the American model is far from infallible; in fact, many American series are not original ideas, but adaptations from different sources that studios prefer to reconstruct for an American public. Shows like Queer as Folk or The Office both originally hail from Britain, while Ugly Betty is adapted from the Colombian series Yo soy Betty, la fea. What can we learn from the analysis of these cultural reappropriations? What parts of the model need be modified to assimilate into the country’s cultural framework? Likewise, the seriality that has become the preferred model for many current shows could itself be considered an importation from the nineteenth-century serialized novel, whose adaptations (particularly by the BBC) spawned some of the most poignant miniseries in the history of television.
American television series have never been so popular with the public, the critics, and fairly recently, with the academic community. Their success, however, resides in their willingness to take on subjects that challenge the notion of American democracy, —think of Breaking Bad or Oz. The depressed heroes of Six Feet Under, The Sopranos, or Deadwood reject many traditional American values, while the sadists and psychopaths in Hannibal or Dexter take the narrative possibilities of the antihero to a new level. In a less threatening way, series like Weeds, Desperate Housewives or Glee transgress soap codes to satirize suburbia and the American Dream, and create “counter-models” that clearly fascinate many viewers.
The production model of television is also being transformed, as prestigious shows by premium cable networks like HBO or Showtime, webseries by internet channels like YouTube, or shows created by VOD companies like Netflix free authors from the constraints of past models. Be it the break with the censorship imposed on representations of sex and violence (Game of Thrones) and the use of profanity (The Wire) or the formalist experimentation rampant in contemporary TV (24 and its split-screens that give the impression of experiencing events in real time, or Damages and its broken chronology), small screen fiction seems to have come into its own. As such, does this suggest the death of older models – or rather, the endless emergence of new ones?
Abstracts should be sent to Anne Crémieux and Shannon Wells-Lassagne by December 20.

28. Le modèle à l’épreuve des genres : du cinéma muet au nouvel Hollywood
Anne-Marie Paquet-Deyris, Université Paris Ouest-Nanterre, Gilles Menegaldo, Université de Poitiers.

La question des modèles et contre-modèles se pose à l’évidence dans la cinéma américain sous différents aspects. Le système des studios a longtemps imposé des modèles structurels, économiques, esthétiques, mais aussi idéologiques (ce qui n’a pas empêché les divers talents de s’exprimer, parfois en « contrebande » comme le rappelle Scorsese) et le cinéma indépendant n’a pu développer de manière significative des contre-modèles en termes d’organisation et de production, mais aussi au plan narratif et formel que tardivement, à la fin de l’ère des studios. L’autre question majeure concerne les relations entre les modèles dominants du cinéma hollywoodien et le cinéma européen qui s’en inspire ou les conteste.
Cet atelier vise à explorer un aspect particulier de cette vaste problématique, la question du genre qui traverse l’histoire du cinéma hollywoodien. Compte tenu des nombreux travaux consacrés récemment aux échanges et regards croisés entre Hollywood et le cinéma européen, nous souhaitons nous consacrer plutôt à la question de la genèse des genres, à la pluralité des histoires des genres et des modèles génériques, et à leurs diverses mutations. Un intérêt particulier sera porté au cinéma muet qui voit très tôt l’émergence de genres comme le western qui donne très vite lieu à des modèles ou encore le film de gangster qui existe très tôt dans l’histoire du cinéma (avec The Musketeers of Pig Alley (1912) de DW Griffith ou Regeneration (1915) de Raoul Walsh) associant souvent intrigue criminelle et mélodrame (selon des modèles issus de la littérature et du théâtre). D’autres genres se constituent plus tardivement et d’abord de manière moins modélisée. Ainsi le film fantastique (ou film d’horreur) existe de manière sporadique dès les années vingt, souvent issu de sources littéraires (Frankenstein, Dr Jekyll et Mr Hyde etc.) et souvent aussi sous influence du cinéma expressionniste européen, mais ne se constitue en genre relativement codifié qu’au début des années trente, avec en particulier, le cycle de films produits par Universal. De même la comédie ne constitue ses principaux modèles (comédie sophistiquée, burlesque, screwball) qu’à partir de l’avènement du parlant même si le mode existe bien plus tôt. Un genre comme le film noir (même si cette étiquette générique est parfois contestée), ne se constitue que rétrospectivement sur la base d’un discours théorique qui vient d’ailleurs. D’autres modèles génériques comme le road movie sont reconnus plus tardivement. La transformation des modèles génériques est aussi tributaire des évolutions technologiques (liées au parlant par exemple) et des idéologies, mais elle peut être induite par d’autres facteurs, comme par exemple la censure interne (PCA) qui oblige les studios à proposer de nouveaux modèles scénaristiques pour les films de gangster à partir de 1934. La question des contre-modèles se pose aussi très tôt et elle permet de faire évoluer les genres, afin de dépasser des modèles trop stéréotypés et figés dans la répétition (c’est le cas des différents avatars du western). Une rupture plus radicale en termes de modèle générique se produit au début des années soixante dix (avec le nouvel Hollywood en particulier) en raison du développement d’un cinéma moins dépendant des grands studios, parfois provocateur et subversif. On pourra examiner les diverses mutations génériques qui se produisent à cette période même si certains modèles dominants perdurent.
Les propositions doivent être adressées à Anne-Marie Paquet-Deyris et Gilles Ménégaldo avant le 20 décembre .

29. « Détourner les modèles au cinéma » – “Overturning the models on screen”

Emmanuelle Delanoë-Brun, Université Paris Diderot-Paris 7 et Delphine Letort, Université du Mans.

Le cinéma classique hollywoodien obéit à des conventions de mise en scène et a imposé des structures narratives dont David Bordwell, Janet Staiger et Kristin Thompson se sont efforcés de délimiter les contours dans The Classical Hollywood Cinema (1985). Bien que l’industrie des studios ait ?uvré pour le maintien de ces règles filmiques censées préserver la production cinématographique de la censure, nombreux sont les réalisateurs qui ont affirmé leur voix d’auteur en détournant ces conventions. Alfred Hitchcock, Howard Hawks, Orson Welles ou encore Billy Wilder entre autres ont ainsi laissé leur empreinte sur les genres qu’ils ont contribué à modeler et à transformer. Érigés en modèle par la théorie des auteurs, dont les Cahiers du cinéma ont fait l’apologie en en soulignant l’originalité, les films de ces réalisateurs ont marqué la mémoire du cinéma hollywoodien à travers des scènes devenues « cultes », des personnages archétypaux (détectives privés, femmes fatales, cow-boys, etc.), ainsi que des stars dont les visages semblent éternels… Tous ont été pastichés et parodiés, démontrant à la fois l’autorité des maîtres et le plaisir de « détourner les modèles ». Entre hommage et influence, l’héritage du cinéma hollywoodien est convoqué pour mieux être mis à distance dans des films réflexifs qui interrogent le pouvoir des mythes. De la blaxploitation au néo-noir, du remake au néo-western, le cinéma contemporain ne cesse d’affirmer son indépendance à l’égard des modèles dont il renverse les codes et les stéréotypes, mais dont il ravive aussi la séduction troublante. Les réécritures sont autant de tentatives de subversion ou au contraire de réactivation des modèles, entreprise esthétique dont les fondements sont également idéologiques. Nous invitons les participants de cet atelier à explorer cette tension créatrice d’un art cinématographique nouveau à l’écran, tentative de subversion qui est aussi un jeu subtil avec les modèles.
Merci d’envoyer vos proposition à Emmanuelle Delanoe-Brun et Delphine Letort avant le 20 décembre.

“Overturning the models on screen”
Emmanuelle Delanoe-Brun, Delphine Letort

The narrative conventions and mise-en-scène strategies employed in Hollywood classical cinema have provided the focus of study in The Classical Hollywood Cinema (David Bordwell, Janet Staiger, Kristin Thompson, 1985). Although the studio industry strove to maintain a set of film rules, which were to protect Hollywood films from censorship, many directors asserted their authorial voice by deviating from these conventions. Alfred Hitchcock, Howard Hawks, Orson Welles, Billy Wilder, among others, left their imprint on the genres they helped shape and transform. These directors’ films were hailed as models to be emulated by the authors’ theory, which the Cahiers du cinéma promoted while underlining their originality. They marked the memory of cinema through creating “cult” scenes, archetypal characters (private eyes, femmes fatales, cow-boys, etc.) and stars whose features appear eternal. All of these elements have been pastiched and parodied, both establishing the authority of the masters and testifying to the pleasure of “overturning the models”. The legacy of Hollywood cinema inspires homages and reveals its influence on films that reflexively engage with the power of its mythology. From Blaxploitation and neo-noir to remakes and neo-westerns, contemporary cinema is characterized by its independence from models whose codes and stereotypes filmmakers overturn, simultaneously reviving their troubling seductiveness. Re-writings represent attempts to subvert and to rejuvenate the models, questioning the ideological underpinning of an aesthetic tradition. We invite the participants of this workshop to explore the creative tension between present and past cinema, turning acts of subversion into a subtle play with the models.
Proposals should be sent to Emmanuelle Delanoe-Brun and Delphine Letort by December 20.