CFP - "Numéro 5 de ReS Futurae"
Appel a textes pour le numéro 5 de ReS Futurae
Direction du dossier : Mehdi Achouche et Samuel Minne.
Échéances :
Les auteurs sont invités a prendre connaissance des consignes d’écritures et
de soumission des articles <http://resf.revues.org/244>
sur le site de la
revue ou sur le carnet de ReS Futurae.
La culture visuelle de la science-fiction, entre culture populaire et
avant-garde
Traditionnellement opposées, la culture populaire et l’avant-garde ont
cependant une riche histoire d’interactions, de reprises et d’inspiration
réciproque. C’est particulierement vrai dans le cas de la science-fiction :
attachée a la culture populaire, elle a aussi sa propre avant-garde, tout en
nourrissant l’avant-garde artistique, tant dans l’art contemporain que
cinématographique.
Loin de ne s’exprimer que sous forme littéraire, la science-fiction le fait
aussi sous forme visuelle, apparaissant aussi bien dans l’art contemporain
que dans le street art, la bande dessinée, le cinéma et de nombreux
courts-métrages, les jeux-vidéos, la publicité, l’illustration, le Web Art,
la peinture ou la série télévisée. Elle peut meme prendre corps dans le
design ou l’architecture, irriguant de son imaginaire tous les pans du réel
et représentant pour beaucoup leur appréhension principale, voire unique, de
la science-fiction. Or cette science-fiction spécifiquement visuelle n’a pas
encore reçu toute l’attention qu’elle méritait, tendant a etre perçue comme
tributaire de la science-fiction littéraire et comme étant purement
illustrative et contingente et donc dénuée d’intéret analytique propre.
Souvent associée a la culture populaire, les liens qui l’unissent aux oeuvres
et courants d’avant-garde ont en particulier été tres peu étudiés jusqu’a ce
jour.
La présence de la science-fiction dans la culture visuelle s’affirme
historiquement plus particulierement au sein de la culture dite populaire,
qu’il s’agisse des couvertures des pulp magazines, des comics et des petits
formats de bandes dessinées, des « séries Z » ou du « cinéma bis », héritant
pour une part de l’inspiration du roman populaire, et pour une autre part
des traditions visuelles de leurs supports spécifiques. Cette
science-fiction visuelle dite populaire n’est pas exempte de dissonances
l’éloignant d’une science-fiction mainstream plus sage ou plus sérieuse. Le
sense of wonder s’accompagne ainsi volontiers de sadisme ou d’érotisme, ou
l’horreur et le sublime coexistent de maniere brutale et sans ménagement
sans tout a fait pouvoir etre assimilés aux genres du fantastique ou de
l’horreur, meme si les convergences existent. Plus que dans ces derniers
genres, ces représentations apparaissent souvent comme exprimant sans filtre
les peurs, les fantasmes et les problématiques d’une société ou d’une
époque, au-dela meme de l’impact du progres et de la technologie, auquel la
science-fiction ne se réduit pas ou plus. Leur forme et leur esthétique,
cependant, n’est pas exempte d’une polysémie qui reste a explorer, et qui
dément précisément la réification thématique qui leur est couramment
réservée.
Par ailleurs, la science-fiction sous sa forme visuelle ne se cantonne pas a
la culture populaire mais apparaît aussi dans des oeuvres et des courants se
revendiquant peu ou prou de l’avant-garde. A ce titre, la science-fiction
visuelle, dont ont été partiellement soulignés les liens historiques et
iconographiques avec le surréalisme, devient un lieu d’expérimentation
formelle, recourant a l’abstraction, a des procédés esthétiques plus
audacieux, renouvelant des procédés narratifs et proposant une alternative a
un imaginaire visuel souvent dominé par le cinéma commercial et ses codes.
Cette science-fiction d’avant-garde joue souvent des références avec la
culture populaire, ouvrant parfois un véritable dialogue avec celle-ci,
jusqu’a parfois s’y confondre. Dans le meme temps, l’avant-garde s’inspire
depuis au moins le pop art de l’imaginaire et des stéréotypes de la
science-fiction pour nourrir sa réflexion, renouveler son esthétique ou
décrire le monde contemporain, tandis que ces memes artistes d’avant-garde
vont par la suite oeuvrer eux-memes en science-fiction (Eduardo Paolozzi et
Richard Hamilton illustrant New Worlds dans les années soixante, par
exemple), chacune se nourrissant ainsi de l’autre.
Ainsi, entre stéréotypes et innovation, originalité et reprise, la culture
visuelle de la science-fiction, ou la science-fictionnalité de la culture
visuelle, suscite de nombreux axes d’études dans son rapport a l’avant-garde
: parodie et détournement, pastiche au second degré, intericonicité,
transmédialité...
Nous proposons d’étudier pour ce cinquieme numéro de ReS Futurae la culture
visuelle de la science-fiction dans ses relations multiples a l’avant-garde.
D’abord dans la façon dont la science-fiction dite populaire et commerciale
témoigne de l’influence de l’avant-garde, manifestant des convergences
esthétiques ou thématiques ou des inspirations communes avec celle-ci.
Ensuite comme science-fiction d’avant-garde ou avant-garde de
science-fiction, en étudiant la maniere dont l’avant-garde s’inspire de la
science-fiction ou rejoint celle-ci, la façon dont cette derniere devient
pour l’avant-garde le moyen de repousser les limites du réalisme, de
dépasser ou de subvertir l’esthétique de l’époque, de provoquer le public ou
encore de brouiller les frontieres culturelles et sociétales. Enfin,
l’attention peut se porter sur un mélange plus complexe des deux pôles, leur
combinaison ou les tensions pouvant apparaître dans des oeuvres spécifiques,
populaires ou avant-gardistes.
Il s’agit entre autres d’examiner la science-fiction visuelle aussi bien
dans ces contextes historiques, nationaux, culturels, technologiques et
artistiques spécifiques que les rapports que ceux-ci peuvent entretenir, par
exemple :
généralement du paratexte iconique (couvertures, affiches, etc.)
Ouvrages et études suggérés
Ash Brian (dir.), The Visual Encyclopedia of Science Fiction, Londres : Pan
Books/New York : Harmony Books, 1977.
Booker M. Keith, Alternate Americas : Science Fiction Film and American
Culture, Westport : Praeger, 2006.
Bosson Yves et Abdelouahab Farid, Dictionnaire visuel des mondes
extraterrestres, Paris : Flammarion, 2010.
Britain David, Eduardo Paolozzi at New Worlds. Science Fiction and Art in
the Sixties, Londres : Savoy Books, 2013
Cartmell Deborah, Hunter I. Q., Kaye Heidi, Whelehan Imelda, Trash
Aesthetics. Popular Culture and Its Audience, Londres : Pluto Press, 1997.
Chion Michel, Les Films de science-fiction, Paris : Les Éditions de
l’étoile, 2008.
Dufour Éric, Le Cinéma de science-fiction, Paris : Armand Colin, 2011.
Holland Steve et Summersby Alex, Sci-Fi Art : A Graphic History, New York :
Harper Design, 2009.
Johnston-Smith Jan, American Science Fiction TV : Star Trek, Stargate, and
Beyond, Middletown : Wesleyan University Press, 2012.
Kripal Jeffrey J., Mutants & Mystics : Science Fiction, Superhero Comics, and
the Paranormal, Chicago : Chicago University Press, 2011.
Poussin Gilles et Marmonnier Christian, Métal Hurlant, la machine a rever,
1975-1987, Paris : Denoël, 2005, collection « Graphic ».
Simon Richard Keller, Trash Culture : Popular Culture and the Great
Tradition, Berkeley : University of California Press, 1999.
Strauven Wanda (dir.), The Cinema of Attractions Reloaded, Amsterdam :
Amsterdam University Press, 2006.
Westfahl Gary, Slusser George, Plummer Kathleen Church, Unearthly Visions :
Approaches to Science Fiction and Fantasy Art, Westport : Greenwood Press,
2002.